Satyre tenant une grappe de raisin

Applique de mobilier 

Égypte > Provenance inconnue

IVe - Ve siècle ap. J.-C.  ?

[VOIR CHRONOLOGIE]

H. 15,4 CM; l. 5,65 CM ; P. 1,7 CM

Os, humérus droit de bœuf, face latérale. 

Co. 2057

Commentaire

Etat de conservation

La bordure dextre est brisée sur toute sa hauteur. Des éclats viennent aussi endommager l’angle inférieur senestre et la surface interne de l’angle supérieur du même côté. Les cassures ont généré une fente qui court le long de la main droite du personnage. L’angle supérieur senestre présente un fendillement longitudinal très léger. Les trabécules, sur la surface interne, sont encore emplies de sédiment. Quelques taches brunes peuvent être relevées sur la paroi de la cavité médullaire.

Description

Occupant toute la hauteur de l’applique, le jeune satyre est sculpté dans l’attitude de la marche ou dansant, les jambes se croisant. Alors qu’il avance vers la droite, il tourne la tête vers l’arrière, ce qui imprime un mouvement de torsion à l’ensemble de son corps. Son bras gauche semble être relevé dans un geste exprimant la nonchalance ou le repos. Cette pose n’est toutefois pas totalement intelligible, d’autant plus que le bras semble coupé au niveau du coude, le manque de hauteur de la diaphyse l’empêchant de décrire un arc-de-cercle autour de la tête. Il est néanmoins intéressant de souligner qu’une autre applique du musée Rodin (Co. 2056), souscrit à ce type iconographique qui renvoie aux figures de Dionysos ou de Silène, la main ramenée au-dessus de la tête, et par de là ces modèles, à l’Apollon Lykeios. Cette attitude s’observe également sur trois appliques du musée Benaki (MARANGOU 1976 : 18917, n° 35 p. 93, n° 35, pl. 12f ; 18914, n° 38 p. 93, n° 38, pl. 12c ; 18913, p. 94, n°39, pl. 13c), sur un relief conservé au musée Pouchkine à Moscou (3120 : BANK, BESSONOVA 1977, p. 161, n° 302), et sur un fragment d’applique passé en vente aux enchères à Paris en 2015 (Rémy Le Fur & associés, Art précolombien, mobilier et objets d'art, Hôtel Drouot, 21/10/2015, lot 54). Une applique mise en vente aux enchères à Paris par F. de Ricqlès en 2001 (F. de Ricqlès, Archéologie, Drouot-Montaigne, 22-23/04/2001, lot 122) propose une figure de satyre au bras levé qui ne se prolonge par au-delà du coude, comme sur notre applique, sans doute par manque de place.

 

Au lieu d’un panier, le satyre tient une grappe de raisin, attribut qui appartient au répertoire dionysiaque (DELASSUS 2020, p. 51, n. 20). Le fruit, agrémenté d’une large feuille, se distingue aussi sur l’applique Co. 2093 du musée Rodin et sur une pièce conservée au Virginia Museum of Fine Arts de Richmond (66.12.3 : GONOSOVÁ, KONDOLEON 1994, p. 206-207, n° 68). Le relief 30.62 des collections du musée Pouchkine de Moscou (BANK, BESSONOVA 1977, p. 161-162, n° 304), correspond à l’image en miroir de notre applique. Enfin, le fragment mis au jour à Halusa en Palestine (GOLDFUS, BOWES 2000, p. 190, fig. 5, p. 191-192), devait sans doute appartenir à une applique à la silhouette proche du satyre qui retient notre attention.

 

Le visage aux joues pleines, vu de trois-quarts, est couronné d’une chevelure courte et crêpelée. Les yeux en léger relief placés sous des arcades sourcilières saillantes, sont séparés par un nez long et plutôt large, surmontant une bouche menue aux lèvres épaisses. La tête rappelle, malgré un travail moins soigné, le visage du satyre de l’applique 18919 du musée Benaki (MARANGOU 1976, p. 92, n° 30, pl. 12e). D’après L. Marangou, la traduction des pupilles au moyen de billes animées sur lesquelles viennent jouer l’ombre et la lumière se situe dans la lignée de la tradition hellénistique (MARANGOU 1976, p. 75).

 

 La tête se rattache au buste par un cou presque absent. Le changement d’orientation du satyre est beaucoup moins accentué que sur les pièces Co. 2056, Co. 2058 ou Co. 2201. Le torse demeure presque droit, ce qui confère à l’ensemble de la silhouette un caractère plus calme. Les proportions du personnage semblent plus équilibrées et le canon moins étiré que sur les pièces Co. 2056 et Co. 2066. Une incision au burin part de l’épaule droite pour marquer la clavicule, puis se poursuit au niveau du sternum et de la ligne blanche pour atteindre le nombril. Une ligne ondoyante souligne la musculature des pectoraux signifiée par une légère saillie. Les contours fortement incisés permettent de donner davantage de relief à une sculpture qui n’en possède pas beaucoup. Si le mouvement du corps est traduit avec un certain naturel, certains éléments ont été délaissés. C’est le cas du bras droit qui se termine par un moignon en guise de main, ou des pieds simplement esquissés. Un manteau, sans doute jeté sur les épaules retombe dans le dos et le long des cuisses du personnage.

 

Par ses chairs assez lisses à l’articulation des muscles estompée, la pièce rappelle fortement le satyre du relief Co. 2066. Quoique moins élancée, notre figure offre un degré de simplification des volumes assez proche. Le dessin frustre des membres concorde avec les nombreuses butées de lame laissées apparentes sur le corps et le visage, comme sculpté en de multiples petites facettes. La stylisation des formes, à laquelle s’ajoute la parenté iconographique avec la pièce découverte à Halusa dans un contexte archéologique du Ve-VIe siècle, invite à ne pas situer la réalisation de cette applique avant le IVe-Ve siècle.

 

Comparaisons 

-Athènes, musée Benaki, 18913, 18914, 18917 (type Lykeios), 18919 (visage et rendu des yeux).

-Halusa (Palestine), mission archéologique de 1997.

-Moscou, musée Pouchkine, 3120 (type Lykeios et grappe de raisin : contre-partie symétrique).

-Paris, musée Rodin, Co. 2066 (type Lykeios), Co. 2093 (grappe de raisin).

-Richmond, Virginia Museum of Fine Arts, 66.12. (grappe de raisin).

-Vente Paris, hôtel Drouot, Rémy Le Fur et associés, Art précolombien, mobilier et objets d'art, 21/10/2015, lot 54 (type Lykeios).

-Vente Paris, hôtel Drouot-Montaigne, F. de Ricqlès, Archéologie, 22-23/04/2001, lot 122 (type Lykeios).

Historique

Acquis par A. Rodin entre 1893 et 1917. Donation A. Rodin à l’État français en 1916.

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