Égypte > provenance inconnue
IIIe-IVe siècle ap. J.-C. ?
H. 7,33 cm ; l. 3,2 cm ; P. max 1,5 cm
Os, humérus gauche de bœuf, face latérale
Co. 2055
Égypte > provenance inconnue
IIIe-IVe siècle ap. J.-C. ?
H. 7,33 cm ; l. 3,2 cm ; P. max 1,5 cm
Os, humérus gauche de bœuf, face latérale
Co. 2055
Les parties senestre et inférieure de l’applique ont disparu en raison de plusieurs cassures. L’une suit le profil du visage et le contour du torse, tandis que la seconde a amputé le personnage de ses jambes. Des manques s’observent aussi au revers : un éclat est à noter en haut du bord qui subsiste, générant un fendillement de la matière dans le sens de la hauteur. Une petite tache d’un vert très pâle se distingue à dextre de l’outre que soutient le satyre. Une coloration ocre rouge, très ténue, s’observe dans les creux des trabécules, à la surface de la cavité médullaire.
Chargé d’une outre, le satyre se dirige vers la droite, comme le laisse supposer l’orientation de son torse. Il détourne cependant violemment la tête vers la gauche, à l’instar d’autres acolytes de Dionysos, sculptés sur les appliques du musée Rodin Co. 2063, Co. 2068, Co. 2101 et Co. 2145. L’outre de vin, dont seule l’extrémité ovoïde est visible, repose sur l’épaule droite du jeune faune. La main qui la supporte, semble voilée par un pan du drapé de l’himation, qui retombe en larges plis, le long du flanc du personnage. Ce particularisme se retrouve sur les appliques Co. 2068 et Co. 2145, ou encore sur la pièce Co. 2058, qui offre en miroir exactement le même modèle. La présence de cet attribut rempli de vin affilie notre figure à la série des satyres askophoroi, souvent représentés sur les éléments de mobilier en os.
Si le buste du satyre est figuré de trois-quarts, le visage présente une vue strictement de profil, révélant son côté droit. Doté d’une joue pleine, bordant une petite bouche aux lèvres épaisses et entrouvertes, ce visage est couronné d’une chevelure constituée de boucles serrées globulaires, sculptées méticuleusement. Cette coiffure n’est pas sans rappeler celle du satyre, porteur de corbeille, de l’applique Co. 2086 du musée Rodin, ou de la pièce AF 6570, conservée au département des Antiquités égyptiennes du musée du Louvre (MARANGOU 1976, p. 96 ; QUONIAM 1970, p. 186, n° 243), bien que les boucles, traitées comme de gros grains, soient, dans notre cas, encore plus régulières. Une précision et un rendu plastique similaires se remarquent aussi dans le traitement des chevelures des satyres de deux fragments d’appliques d’une grande qualité d’exécution : la pièce 05045 du musée d’Art et Histoire de Bruxelles, et l’élément de placage E 17197, appartenant aux collections du département des Antiquités égyptiennes du musée du Louvre (MARANGOU 1976, p. 96). Un coup de petit burin a permis de creuser la cavité oculaire et de faire naître l’arcade sourcilière, alors qu’une deuxième incision de la matière a été nécessaire pour dessiner le contour de l’œil.
L’outre, dont la rotondité masque complètement l’épaule droite du satyre, sur laquelle elle prend place, offre un traitement de texture particulier. Comme sur les appliques Co. 2063, Co. 2145, ou encore Co. 2275, du musée Rodin, les aspérités de la peau animale sont transcrites par de courtes incisions qui ponctuent la surface de façon aléatoire (DELASSUS 2020, p. 51, n. 21). Elles se confondent d’ailleurs avec les cavités du tissu osseux spongieux qui réapparaît malencontreusement en partie supérieure. Le dessin de ces fines entailles ressemble étroitement à celui des motifs qui parsèment l’outre que porte le satyre de l’applique 18931 du musée Benaki (MARANGOU 1976, p. 96, n° 51, pl. 14c).
Le torse du satyre est rejeté vers l’arrière, pour accompagner le mouvement de torsion de la nuque et de la tête. Un cou haut et massif relie le visage au torse, dont la structure osseuse et musculaire est mise en exergue par des variations du relief et des incisions plus ou moins profondes. Le sternum court ici de la base du cou jusqu’au bas des pectoraux, pour se fondre dans la linea alba. Cette dernière descend jusqu’au nombril, matérialisé par une perforation de forme triangulaire. Le modelé tout en nuances du diaphragme et des muscles du ventre a été obtenu par un travail au ciseau, puis par un polissage très poussé. L’ondulation des chairs créée par l’articulation très prononcée des muscles obliques et droits de l’abdomen apparaît, de façon encore plus maîtrisée, sur l’applique 12757 du musée Benaki (MARANGOU 1976, p. 93, pl. 12b) et la pièce du Louvre E 17197, déjà citée. Le traitement du buste renvoie également à celui du satyre de l’applique Co. 2063 du musée Rodin, mais ce dernier se distingue par un rendu plus graphique, et une moindre souplesse des chairs.
Le sens de l’expression anatomique, l’aisance dans la traduction des chairs, ainsi que l’attention portée au rendu des textures, sont autant de gages d’une facture de qualité, et d’une volonté de s’inscrire à la suite de la tradition hellénistique. Aussi pouvons nous proposer de dater la réalisation de cet élément de mobilier, sculpté avec un soin particulier, du IIIe-IVe siècle.
Comparaisons
-Athènes, musée Benaki, 12757 (musculature), 18931 (traitement de l’outre).
-Bruxelles, musée Art et Histoire, 05045 (chevelure).
-Paris, musée du Louvre, DAE, AF 6570 (chevelure), E 17197 (chevelure et musculature).
-Paris, musée Rodin, Co. 2063, Co. 2068, Co. 2101, Co. 2145 (attitude et outre).
Acquis par A. Rodin entre 1893 et 1917. Donation A. Rodin à l’État français en 1916.