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Statue naophore de Djeddjéhoutyioufankh

Naos avec effigie d’Osiris

Provenance > Saïs d’après les inscriptions ?
Datation > Époque saïte, seconde partie
H. 24,8 cm ; L. 10,5 cm ; P. 15 cm
Pierre dure noire
Co. 3382
 

Commentaire

Etat de conservation

Statue fragmentaire pour laquelle la tête, le bras gauche et la jambe droite sont manquants ou incomplets. De nombreux impacts et rayures se remarquent sur les différents côtés du monument, témoignant des multiples collisions subies par la statue. Le pilier dorsal est également fragmentaire. Le socle de la statue a disparu.

Description

L’homme est représenté en train de tenir entre ses deux mains un petit naos quadrangulaire à toit plat et qui repose directement sur ses cuisses. À l’intérieur, l’image du dieu Osiris est facilement identifiable. Debout, la divinité est représentée mammiforme, coiffée de la couronne-atef et tenant dans ses mains les deux sceptres royaux : la crosse aout et le flagellum nekhakha. L'homme se tient agenouillé, assis sur les talons, membres inférieurs pliés et pointes de pieds fléchies. Son corps est découvert, aucun pagne ou tunique n’étant visible. Le modelé de la musculature et des os est alors particulièrement perceptible, notamment la saillie des bras et des jambes ou encore les clavicules. L’espace laissé plein entre son cou et le haut de l’épaule suggère qu’il était coiffé d’une large perruque, peut-être à voir comme une perruque évasée, particulièrement à la mode durant l’époque tardive.
Un pilier dorsal, partiellement conservé, servait à maintenir la cohésion du bloc taillé, en créant un renfort derrière la nuque du personnage. 
 
Une inscription hiéroglyphique a été incisée sur tout l’encadrement du naos et sur sa face supérieure, qui correspond au toit en terrasse du sanctuaire. Deux colonnes de texte sont également conservées sur le pilier dorsal. Les textes nous apprennent l’identité du dédicant – Djed-Thot-iouef-ânkh –, un nom théophore à transcrire par « Thot a dit : ‘il est vivant’ ». Nous connaissons aussi l’identité de son père – Men-Pesemtjek-er-neheh (ou Men-er-neheh-Pesemtjek) « Psammétique est stable pour l’éternité des jours » – et de sa mère Tjes-Neith-péret, « Que Neith assemble la semence ». Son fils Iâhmès « c’est le dieu lune qui a mis au monde », est mentionné. Le nom de la mère d’Iâhmès suit et commencerait par un . Dans son étude du monument, R. el-SAYED a tenté une restitution de son nom et son titre (El-SAYED 1975, p. 157 - 158). Elle serait ainsi : « joueuse (de sistre de Neith), dame de Saïs, Hedjeb-Neith-iret-binet », nom à traduire par « Que Neith tue le mauvais œil ». Les textes mentionnent aussi les titres de Djeddjéhoutyioufânkh, conducteur des châteaux de Neith, supérieur des secrets et grand-prêtre pur.
 
En signe de dévotion, les particuliers déposaient des statues à leur effigie dans les temples divins. Une telle pratique leur permettait de bénéficier des offrandes quotidiennes offertes aux dieux. La divinité honorée dans le lieu était alors mentionnée dans les formules d’offrandes au sein desquelles elle est sollicitée. Ces statues déposées dans l’enceinte rituelle pouvaient prendre de nombreuses formes tout au long de l’époque pharaonique. À partir du Nouvel Empire, l’effigie divine est parfois associée au particulier et il peut désormais prendre différentes postures : agenouillée, debout ou assise. On en connaît plusieurs types, dont en particulier : les statues théophores – qui montrent une image divine –, les statues stélophores – qui présentent des stèles – et les statues naophores – qui présentent un naos. Mais, c’est surtout au cours de la Basse Époque que l’on dénombre une grande diversité des statues intégrant l’image divine, qu’il s’agisse de l’attitude adoptée par le dédicant, ou de la forme que prend le dieu. 
 
La statue de Djeddjéhoutyioufânkh est de type naophore, le dédicant offrant une effigie du dieu Osiris. Le naos étant un élément architectural localisé dans le saint des saints de chaque sanctuaire égyptien, destiné à contenir la statue de la divinité, c’est donc une image cultuelle du dieu qui est employée dans ce type statuaire. L’iconographique d’un particulier agenouillé, tenant un naos dans lequel se trouve une effigie divine, apparaît dès la fin de la XVIIIe dynastie. Dans ce type très identifiable de statuaire, les productions en pierre dure noire dominent à partir de la Troisième Période intermédiaire. Sur la statue Co. 3382, la position du naos sur les genoux est un indicateur supplémentaire de datation puisque, dès le milieu de l’époque saïte, le positionnement du naos se fait en règle générale sur les cuisses et non plus sur le sol, devant les genoux (PERDU 2012, p. 59).
 
La figuration du dieu Osiris sur les statues naophores apparaît au Nouvel Empire (Louvre A67), mais devient plus courante durant la Basse Époque (Louvre E11604). Bien que l’on puisse noter une montée en puissance du culte d’Osiris dès le Nouvel Empire, les mutations profondes que connaît la religion égyptienne durant l’Époque tardive ont fortement fait évoluer les rites et les types de dévotions rendus à cette divinité. Outre le traditionnel Osiris d’Abydos, on constate une grande diversité des formes du dieu qui sont honorées dans différents sanctuaires locaux, comme Osiris-Apis, Osiris-Ândjty, Osiris de Coptos, ou encore Osiris Hemag. Parallèlement, les festivités de Khoïak prennent de l’importance au sein du calendrier liturgique égyptien. C’est également à cette époque que Karnak prend de plus en plus d’importance dans le culte osirien, avec notamment l’ajout progressif de chapelles osiriennes. C’est dans ces différents sanctuaires que des statues de particuliers, souhaitant rendre hommage aux divinités et bénéficier des offrandes, se sont accumulées. Il est à noter que, malgré la figuration du dieu Osiris dans le naos de la statue Co. 3382, c’est la déesse Neith de Saïs qui est mentionnée dans la formule funéraire qui l’accompagne. Plusieurs cas similaires se rencontrent, avec en particulier les statues Louvre E25499 ou Louvre A87, pour lesquelles ce sont également des membres du clergé de la déesse de Saïs qui offrent une effigie du dieu Osiris dans un naos.
 
Cette statue, à dater aux alentours probables de la seconde moitié de l’époque saïte, doit être vue comme une représentation double. C’est d’une part celle d’un orant défunt – Djeddjéhoutyioufânkh –, qui fait « face » au dieu des morts Osiris représenté dans le naos. C’est d’autre part celle d’un dignitaire offrant à cette divinité son image divine contenue dans un naos. Par réciprocité, Osiris accordera pour toujours, par le biais de cette statue, ses bienfaits à Djeddjéhoutyioufânkh en échange de son offrande. C’est dans un esprit de piété filiale que son fils Iâhmes, qualifié de « bien aimé », a commandité cette statue pour son père défunt. Avec les inscriptions se référant à la déesse Neith de Saïs, il peut être suggéré que la statue proviendrait de cette région.
 

Inscription

Une inscription hiéroglyphique a été incisée sur tout l’encadrement du naos et sur sa face supérieure, qui correspond au toit en terrasse du sanctuaire. Deux colonnes de texte sont également conservées sur le pilier dorsal. 

Historique

Acquis par Rodin entre 1893 et 1913.

BOREUX 1913 : Hôtel Biron, 289, "Statue fragmentaire d'un personnage agenouillé présentant devant lui un naos à l'intérieur duquel se tient un Osiris debout, manquent la tête, l'épaule gauche, le genou droit et les pieds. Les bras sont abimés. Inscriptions autour du naos et sur le piler dorsal. La première donne le nom [hiéroglyphes] (Thot ?) et le cartouche [hiéroglyphes]. Basalte. Haut. 20 cent. Estimé Trois cents francs."

Donation Rodin à l’État français 1916.

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