Égypte > provenance inconnue
IVe siècle ap. J.-C.
H. 12,65 cm ; L. 3,4 cm ; P. 1,7 cm
Os, métatarse de bœuf, face antérieure
Co. 2106
Égypte > provenance inconnue
IVe siècle ap. J.-C.
H. 12,65 cm ; L. 3,4 cm ; P. 1,7 cm
Os, métatarse de bœuf, face antérieure
Co. 2106
L’applique est brisée en oblique au tiers de sa hauteur, ce qui a provoqué la disparition de la partie inférieure. L’angle supérieur dextre est également lacunaire, notamment au revers. L’ensemble de la pièce est recouvert de sédiments, très épais dans les creux, qui ne permettent pas d’apprécier la qualité des détails de la sculpture. La face principale présente une légère desquamation, avec des fentes et fissures, tandis que de nombreuses petites pertes de matière sont observables à la surface de la cavité médullaire. Elles correspondent aussi à un phénomène de desquamation, mais occasionnant des soulèvements. Le dos de la pièce révèle en partie supérieure une structure alvéolaire caractéristique du tissu osseux spongieux. Quelques légères taches ocre rouge ponctuent la surface. L’une d’elles est bien visible sur l’astragale du chapiteau.
Cette applique reproduit un pilastre sculpté d’amours vendangeurs, évoluant dans un rinceau de vigne, surmonté d’un chapiteau. Volant vers la gauche, un Éros détourne la tête vers la droite. Ses bras tendus vers l’avant, passant devant son buste, semblent agripper la tige ondoyante qui se déployait depuis la base disparue de l’applique. Il propose une silhouette gracile aux proportions très allongées. Deux ailes accrochées à sa taille encadrent un fin visage présentant son profil droit. Sous un ventre rebondi, se dessinent deux souples jambes, celle de gauche étant croisée derrière celle de droite, et bordée sans doute d’un drapé. Les membres, comme le visage, sont rendus en larges plans, avec une certaine simplification.
Un astragale en forte saillie surmonte directement la tête de l’amour. La corbeille du chapiteau est structurée par une ligne médiane, de part et d’autre de laquelle s’épanouissent deux feuilles d'acanthe à six nervures. L’extrémité supérieure semble amorcer, dans l’angle supérieur senestre, un enroulement annonçant un crochet. Le profil du chant senestre conforte de manière évidente, par son dessin, l’intention de l’artisan de suggérer cet enroulement. Un filet incisé perpendiculairement à l’axe médian, en partie sommitale, indique la ligne de l’abaque.
S’il faut sans doute rechercher l’origine du motif du rinceau peuplé d’animaux ou d’Érotes dans l’art de l’époque hellénistique (cf. TOYNBEE, WARD-PERKINS 1950, p. 3-8), celui-ci bénéficie d’une popularité certaine dans l’art romain, à partir de l’époque antonine jusqu’à une date tardive. S’épanouissant dans la sculpture décorative ou funéraire (voir à ce propos l’exemple du sarcophage de l’église San Lorenzo à Rome, datant du IIIe siècle : STUVERAS 1969, p. 77, fig. 131, pl. LVIII), il se développe également dans les domaines de l’orfèvrerie, comme l’attestent le Gobelet aux amours vendangeurs (Alexandrie, musée gréco-romain, 24201), ou la flasque en argent du trésor de l’Esquilin (British Museum, 1866, 1229.4), et du textile. Témoignent de l’intérêt pour ce thème iconographique au IVe siècle, la Tenture aux amours vendangeurs conservée au musée du Louvre (E 27205: RUTSCHOWSCAYA 1980, p. 147-149), et un carton de tapisserie sur papyrus provenant d’Hermopolis Magna (Turin, Museo Egizio, Suppl. 2200 bis (6) : STAUFFER 2008, p. 108-109, n° 24 ).
La fréquence du motif des amours effectuant la cueillette du raisin sur les éléments de placage provenant d’Égypte sculptés en relief, est illustrée par une série de cinq appliques conservée au musée Benaki (MARANGOU 1976, p. 127, n° 223-227, pl. 68 a, b, c, d, f), et un certain nombre de fragments appartenant autrefois aux Staatliche Museen de Berlin (WULFF 1909, p. 117-118, pl. XIX). La figure enfantine ailée, volant au sommet d’un sarment, et surmontée d’un chapiteau dérivant du type corinthien, trouve un écho dans deux appliques à la composition symétrique : l’une, au Victoria & Albert Museum (830-1905 : LONGHURST 1927, p. 24), et sa contrepartie, au musée gréco-romain d’Alexandrie (13303 : RODZIEWICZ 2016, p. 164 fig. 184). Nonobstant une proximité iconographique, notre applique se démarque de ces exemplaires plats, par sa convexité et son format beaucoup plus étiré. Contrairement à la figure dynamique dotée de membres potelés de ces deux spécimens, l’amour du fragment du musée Rodin offre une silhouette très allongée et fortement stylisée. De surcroît, la traduction à son sommet du chapiteau corinthien apparaît très simplifiée.
La souplesse de la tige du rinceau de vigne, la petitesse du visage et l’élongation du corps de l’Éros, rappellent une applique du musée Benaki, sculptée d’un pampre de vigne naissant d’un canthare, bien que l’exécution soit moins soignée (10319 : MARANGOU 1976, p. 127, n° 227, pl. 68 c). Ces caractéristiques ne sont pas sans évoquer, malgré des différences stylistiques notables, une pièce de la collection Altounian (vente Paris, Artcurial, 17-18/09/2019, lot 135). La comparaison se limite à la présence du chapiteau, de l’astragale en fort ressaut, ainsi qu’au petit visage de l’amour encadré par deux ailes, puisque la facture de cette pièce est d’une qualité nettement supérieure à celle du musée Rodin, à la sculpture plus hardie. Ne pouvant être mise en relation avec une pièce datée grâce à un contexte archéologique documenté, la date de fabrication de notre applique demeure incertaine. La forte stylisation des éléments sculptés ne permet guère de proposer une réalisation avant le IVe siècle ap. J.-C.
Comparaisons
-Alexandrie, musée gréco-romain, 13303 (contrepartie).
-Athènes, musée Benaki, 10319.
-Londres, Victoria & Albert Museum, 830-1905.
-Vente Paris, Artcurial, Collection Joseph Altounian, 17-18/09/2019, lot. 135.
Acquis par A. Rodin entre 1893 et 1917. Donation A. Rodin à l’État français en 1916.