Ménade au tympanon

Applique de mobilier

Égypte > provenance inconnue

IIIe-IVe ap. J.-C. ?

H. 16 cm ; l. 7,1 cm ; P. max. 2,1 cm

Os, humérus droit de bœuf, face latérale

Co. 2067

Commentaire

Etat de conservation

Cette pièce constitue l’un des rares exemples de la collection du musée Rodin à être presque intégralement conservé. Les seuls véritables dommages que l’on peut constater sont une cassure du bord interne senestre en partie inférieure, et un petit délitement de son coin supérieur. Sur la face principale, s’étend un réseau de fentes, courant sur le ventre, les jambes et le vêtement de la figure. Un certain nombre de soulèvements stables s’observent également. De couleur crème, le relief sculpté montre une tonalité plus crayeuse dans les zones fragilisées (angle inférieur dextre et partie supérieure senestre). Une légère tache d’oxydation se distingue près de l’épaule droite de la ménade. Le revers, blanc rosé, révèle sur ses bords internes, de longues fissures verticales. Celles-ci traversent toute l’épaisseur du tissu compact puisque leur tracé se retrouve aussi sur le chant sommital du placage. Des sédiments subsistent dans les trabécules.

Description

La courbure des parois de la matrice osseuse, prélevée dans un humérus de bœuf, a été mise à profit, pour faire écho aux lignes sinueuses de la ménade, emportée par l’élan de la danse. Progressant d’un pas enlevé vers la gauche, cette dernière fait subir à son cou une torsion hardie afin de porter son regard vers l’arrière. Aux chairs lisses du corps nu, s’opposent les lignes en arabesque du chiton. Le vêtement, tombant des épaules, épouse la cambrure de la jeune femme, puis coincé derrière sa jambe droite, se déploie en un pan souple animé de nombreux plis. Le bouillonnement des drapés s’accorde à la fois à l’attitude frénétique, mais est aussi évocateur du son saccadé du tympanon que la ménade frappe de sa main droite. Alors qu’elle lève à hauteur de son visage l’instrument, qui revêt la forme d’un disque étiré souligné d’une bordure, un second tambourin se trouve posé au sol, à sa droite. Le visage sculpté avec attention est coiffé d’une chevelure organisée en mèches ondulées, ramenées vers l’arrière et rejoignant un chignon surmontant la nuque.


Par sa posture générale, la ménade rappelle le fragment Co. 2251 du musée Rodin. Elle affiche toutefois, une parenté iconographique et stylistique plus évidente, avec une applique du musée Benaki (18876 : MARANGOU 1976, p. 103, n° 92, pl. 28d). S’y remarquent plusieurs caractéristiques analogues : un corps aux lignes souples mais relativement plat, une poitrine comprimée de façon maladroite sous le bras droit, un visage aux détails rendus avec soin, surmonté d’une chevelure tirée en arrière aux mèches incisées de manière méticuleuse. La prédominance du graphisme sur le volume se lit également dans le pourtour incisé du tambourin, ou le listel formant un cadre rectangulaire en partie supérieure de la pièce. Le traitement du visage offre des points de comparaison, comme le globe oculaire suggéré par une bille en saillie. L’applique mise en vente à Londres chez Bonhams le 13 avril 2011 propose une variante de notre pièce, avec un chiton moins densément plissé et un tympanon au sol disposé à gauche de la ménade. Des pièces de plus petite taille, telle celle découverte à Ehnasiya que conserve le Nicholson museum de Sydney (inv. NM00.176), reprennent parfois le schéma iconographique à l’identique. Il n’est guère étonnant d’identifier sur quelques reliefs en os les images en miroir de notre ménade : ainsi un exemplaire fragmentaire des collections du département des Antiquités égyptiennes du musée du Louvre (E 17192 : MARANGOU 1976, p. 35, 103, pl. 29b), cette fois-ci sculpté dans un humérus gauche de bœuf, livre une version aux formes harmonieuses et aux chairs modelées avec une certaine sensibilité, qualités qui se répètent sur une autre pièce repérée sur le marché de l’art en 2015 (Vente Oxford, Bonhams, 15 avril 2015, The Oxford Fine Sale, lot 478).

 

Les exemplaires des musée Benaki, du musée du Louvre ou de la vente Bonhams à Oxford, à la fois par l’accent porté sur le volume ou l’aspect calligraphique de leur drapé, s’inscrivent dans l’esprit de la sculpture de l’époque sévérienne. Pour autant, la perte de volume qui caractérise notre pièce, au profit d’un jeu de courbes et de contre-courbes, comme la simplification de l’anatomie et des plis du drapé qui s’y observent, permettent d’envisager une datation légèrement plus tardive. En l’absence de provenance et de contexte archéologique, seule une analyse stylistique constitue un moyen pour nous orienter vers une période donnée, bien qu’il faille conserver la plus extrême prudence quant à la date avancée. L’hypothèse d’une réalisation au cours du IIIe ou IVe siècle est donc plausible.

 

 

Comparaisons 

-Athènes, musée Benaki, 18876 (iconographie et style).

-Paris, musée du Louvre, DAE, E 17192 (type iconographique symétrique).

-Vente Londres, 13 avril 2011, Antiquities including Property from the collection of Sir Daniel Donohue, lot 438 (iconographie et style).

-Vente Oxford, Bonhams, 15 avril 2015, The Oxford Fine Sale, lot 478 (type iconographique symétrique).

-Sydney, Nicholson Museum, inv. NM00.176 (type iconographique).

 

Historique

Acquis par A. Rodin entre 1893 et 1917. Donation A. Rodin à l’État français en 1916.

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