Égypte > provenance inconnue
Moyen Empire >XIIe dynastie
H. 13 CM : L. 31 CM : P. 3,6 CM
Calcaire
Co. 939
Égypte > provenance inconnue
Moyen Empire >XIIe dynastie
H. 13 CM : L. 31 CM : P. 3,6 CM
Calcaire
Co. 939
L’œuvre est en assez bon état de conservation. La partie droite de la table est cependant légèrement arasée, probablement à la suite d’une exposition prolongée à l’air libre. De grands éclats mutilent également les bords, dont les deux plus conséquents, visibles au centre des chants inférieur et supérieur, correspondent peut-être à un soclage antérieur. L’épiderme de la face gravée étant desquamé, la pierre s’est soulevée par endroits. On observe aussi de nombreuses épaufrures qui ont fait disparaître une partie des signes, dégradant par là même l'inscription sans en altérer la compréhension.
Cette table d’offrandes rectangulaire est agrémentée d’un léger relief et d’une frise de hiéroglyphes réalisée dans le creux. Le nom du propriétaire, les formules employées ainsi que la graphie constituent autant d’indices pour situer la réalisation de cette table d’offrandes au début de la XIIe dynastie. Des pigments bleus subsistent dans le creux de certains hiéroglyphes.
Malgré son apparence assez simple, cette table d’offrandes est pourtant relativement sophistiquée, tant dans le choix du matériau – un calcaire fin, dépourvu d’inclusion – que par sa forme et l’ordonnancement de son décor. Il s’agit d’un objet particulièrement important pour le culte funéraire, dans la mesure où il permet, mais aussi suscite l’offrande et les libations perpétuelles pour le dignitaire auquel il est destiné. Les formules d'offrandes autour de la table livrent le nom et titre du propriétaire, le "directeur des choses scellées" Hénénou. En tant que « directeur des choses scellées », il s'agissait d'un personnage à la tête de l'administration centrale.
Les tables d’offrandes apparaissent dès le début de l’Ancien Empire, et l’Égypte en a livré un nombre incalculable tout au long de la période pharaonique. Il s’agit d’un élément incontournable du mobilier funéraire. Elles étaient habituellement placées dans la chapelle de culte du propriétaire de la tombe et donc laissées accessibles après l’enterrement, afin de permettre au personnel religieux d’y effectuer les libations, le dépôt d’offrandes et les rites afférant.
L’ensemble de la composition de l’objet est très réfléchi et ne laisse rien au hasard. La forme générale du relief reproduit ainsi l’apparence du signe hiéroglyphique hetep, idéogramme précisément utilisé dans l’écriture égyptienne pour signifier un autel (funéraire ou divin), et plus tard par métonymie l’offrande en elle-même. Le grand rectangle en léger creux, au centre, évoque ce qui est à l’origine une natte en roseau, tandis que le relief en forme de cloche représente un pain, offrande alimentaire par excellence. L’ensemble constitue un jeu de mots entre écriture et image signifiant « être reposé » ou « être satisfait » et suffit donc en lui-même à assurer au défunt la survie après la mort.
Sur la table, apparaît la forme de pain setjat, fabriqué uniquement dans l'Ancien Empire, mais qui sert de signe canonique pour désigner le pain durant toute l'histoire pharaonique, Les moules en usage à l’Ancien et au Moyen Empire sont de forme conique, comme le montrent autant les trouvailles céramiques innombrables que les scènes de boulangerie représentées dans les tombes. Le pain représenté ici est particulièrement évasé. Dès la Deuxième Période intermédiaire et le Nouvel Empire, ce symbole entre dans la composition de nombreux objets à usage funéraire ou évoquant la réjuvénation, comme les « vases de Nouvel An » offerts lorsque la crue du Nil est arrivée.
Devant le pain, sont taillés deux bassins à libation rectangulaires, représentés eux aussi vus de-dessus. Ces deux bassins creusés sont reliés à un léger sillon qui permettait au liquide de s'écouler vers le canal central. La face supérieure de l’objet est taillé en plan incliné pour orienter l'écoulement de la libation, alors que les autres sont parfaitement perpendiculaires.
La représentation directe du pain et des bassins à eau sur l’espace de la pierre n’a pas seulement pour but de signifier son usage et de permettre la réalisation de l’offrande. Leur inscription dans la pierre assure également, dans le cas où plus aucune personne vivante n’effectuerait les rituels pour le bénéfice de ce défunt, de suscite son alimentation pérenne dans l’au-delà. L’intérêt d’un tel objet réside ainsi dans sa triple fonction : fournir un support de réalisation de l’offrande, propre et dévoué à ce seul but ; assurer par la magie de l’image performative une offrande perpétuelle au défunt, nécessaire pour assurer la survie de son ka ; et pérenniser son immortalité grâce à l’inscription de son nom et de ses titres directement dans la pierre.
Acquis par Rodin auprès de l'antiquaire Oxan Aslanian le 5 avril 1911.
BOREUX 1913 : Hôtel Biron, 271, "Table d’offrandes, de forme rectangulaire, avec bec à rainure. L’inscription qui court tout au long de la bordure donne le nom de [hiéroglyphes] fils de [hiéroglyphes] Un morceau de bord manque. Calcaire. 37 x 22 Longueur du bec : 9 cent. ½. Estimée cent francs."
Donation Rodin à l’État français 1916.
Le relief fut exposé à l’hôtel Biron, parmi les chefs-d’œuvre de la collection égyptienne, là où Charles Boreux le décrivit à l’été 1913 dans l’inventaire qu’il fit en vue de la donation à l’État français.