ÉGYPTE > PROVENANCE INCONNUE
TROISIÈME PÉRIODE INTERMÉDIAIRE > XXIe – XXVe dynastie > 1069 - 656 AVANT J.-C.
BRONZE (ALLIAGE CUIVREUX)
H. : 20,2 cm ; L. : 6,4 cm ; P. : 10,3 cm
Co. 782
ÉGYPTE > PROVENANCE INCONNUE
TROISIÈME PÉRIODE INTERMÉDIAIRE > XXIe – XXVe dynastie > 1069 - 656 AVANT J.-C.
BRONZE (ALLIAGE CUIVREUX)
H. : 20,2 cm ; L. : 6,4 cm ; P. : 10,3 cm
Co. 782
L’œuvre présente un état de conservation correct.
La statuette est complète à l’exception de l’avant-bras droit, des plumes de la couronne, de la barbe postiche, du sceptre que tenait la main gauche et du siège sur lequel Amon était assis. Bien que le métal soit oxydé, les nombreux détails sont encore visibles. L’avant-bras gauche, sectionné, a été réajusté, de même que les pieds, sectionnés à partir du niveau des mollets. On remarque la présence de sable au sommet de la couronne qui pourrait être les vestiges du sédiment dans lequel la statuette reposait avant sa découverte. Le dos du personnage est plus abîmé que le devant ce qui suggère qu’il était placé à l’origine contre un dossier qui remontait contre la couronne. Une trace d’impact qui a engendré une perte de matière est visible sur l’épaule droite.
L’œuvre figure le dieu Amon assis sur un siège. Les jambes sont jointes et la pieds serrés. Le bras gauche est replié vers l’avant et sa main serrait à l’origine un sceptre aujourd’hui disparu ; un trou ménagé entre les doigts accueillait cet attribut rapporté. Il est probable que le bras droit, actuellement sectionné au-dessus du coude, adoptait la même position car aucune trace de main n’est visible sur le pagne du dieu.
Amon est coiffé de sa couronne habituelle qui se compose d’un mortier surmonté de hautes plumes rapportées comme le suggère l’encoche profonde sur le dessus, qui est plus évasé que la base. La partie sommitale de ce mortier est légèrement bombée. La coiffe est marquée par une ligne enserrant bas la tête du dieu dans la nuque et sur le front. C’est de cette couronne, devant les oreilles, qu’émergent les attaches de la barbe postiche, également rapportée. Elles longent les mâchoires pour finir sous le menton où la barbe était collée. Le cou d’Amon est paré d’un très large collier-ousekh fait de dix rangées de perles plus ou moins larges, lui recouvrant ainsi tout le plexus. Deux bracelets de type identique ornent le haut de ses bras. ils se composent de deux bandes planes de métal précieux encerclant un montage de perles rectangulaires montées en un décor de créneaux. Le bijou du bras gauche n’est pas d’origine, il a été incisé après la restauration du bras.
La taille est ceinturée d’un corselet qui s’engage sous les pectoraux. Il est constitué d’un décor en écailles, maintenu par une bande droite. Ce corselet couronne une large ceinture faite également de deux bandes planes encadrant un décor en dents de scie. Enfin, les hanches sont habillées d’un pagne court simple strié verticalement s’arrêtant au-dessus des genoux. Les pieds sont nus. Ces attributs vestimentaires sont à rapprocher de ceux visibles sur les statuettes de la Troisième Période intermédiaire conservées au British Museum de Londres, n° inv. EA 63581 et EA 60018.
Le visage d’Amon est rond, le menton se démarquant faiblement du reste de la face. On note un léger affaissement du visage et de la couronne du côté gauche ; couronne, œil et oreille y sont plus bas que du côté droit. Les sourcils sont arqués de façon naturelle. Ils surmontent des yeux assez étirés, cerclés de fard et remplis de pâte de verre, qui bien que toujours présente est très abîmée. Le nez est généreux à sa base comme à sa naissance. De profil, on remarque qu’il est légèrement en trompette. La largeur des narines est égale à celle de l’ouverture de la bouche. Celle-ci présente des lèvres d’égale épaisseur. Elle est encadrée de sillons labio-nasaux assez profonds et est surmontée d’une gouttière. Ces sillons naturels façonnent les joues, de même que le dessin des cernes. Les oreilles sont disproportionnées par rapport au reste du visage, notamment l’oreille gauche. Le cou est court et les épaules sont larges et rondes. Elles se poursuivent sur des bras relativement massifs sans net détail anatomique. Les pectoraux sont légèrement en relief alors que le modelé du nombril et des muscles dorsaux sont absents. La taille est très fine et les hanches larges en comparaison. On note la finesse d’exécution des genoux et des mollets sur lesquels leur galbe et les tibias sont clairement rendus. Les chevilles larges couronnent des pieds plats aux orteils séparés de lignes droites. Un épais tenon métallique a été façonné sous les talons pour permettre l’insertion de la statuette dans un socle antique aujourd’hui perdu et remplacé par un montage en bois moderne (Maison André vers 1967).
Enfin, remarquons que la face arrière de la statuette est de moins bonne qualité d’exécution et de conservation que la face avant. Ceci s’explique par le fait qu’Amon était placé sur un siège antique dont le dossier touchait l’œuvre au niveau du dos et de l’arrière de la couronne, comme le laisse penser le changement de coloration à cet endroit. Cette bande vert clair est assez fine et semble se rétrécir vers le haut, ce qui suggère que le dossier du siège prenait la forme d’un obélisque.
Le style général de cette œuvre, inspiré nettement de celui thoutmoside et ramesside, permet de la dater de la Troisième Période intermédiaire. En effet, le modelé du buste aux épaules larges et rondes comparable à la statuaire ramesside ; la taille fine et le dessin subtil des jambes assimilables à la plastique thoutmoside ; et les nombreux décors recherchés présents sur l’œuvre sont tout autant d’arguments confirmant cette datation. De plus, la statuette Co. 782 est très similaire dans le modelé du corps à celle conservée au Metropolitan Museum of Art de New York, n° inv. 26.7.1412, figurant un très bel Amon en or datant de la XXIIe dynastie.
Amon est seigneur de Karnak à Thèbes et de nombreux autres sanctuaires. De tous les dieux du panthéon égyptien, Amon fut certainement celui qui acquerra une renommée sans contexte en obtenant le rang très prestigieux de dieu dynastique. C’est à partir du Moyen Empire, sous le règne d’Amenemhat Ier, fondateur de la XIIe dynastie, qu’Amon devient le roi des dieux et donc « Amon, roi des dieux, maître des trônes du Double Pays ».
Les Égyptiens tirèrent partie de son nom, qui signifie « le caché », pour élaborer une théologie digne d’un dieu dynastique. Il emprunte donc certains éléments de cultes voisins, notamment ceux des dieux héliopolitains. En effet, dans un passage des Hymnes d’Amon du papyrus de Leyde, il est écrit : « Son nom est caché en tant qu’Amon, il est Rê par le visage ; son corps est Ptah » (I, 350). On fit de lui un dieu primordial et éternel, responsable de toute création et on le plaça à la tête d’une grande ennéade, l’ogdoade d’Hermopolis, son double féminin Amonet et lui régnant dans la tradition hermopolitaine.
Amon était aussi associé à la fertilité de par ses prérogatives fondatrices du monde. Il adopte alors la forme ithyphallique de Min et prend le nom d’Amon-Min-Kamoutef. Il porte sous cette forme un vêtement momiforme d’où s’échappe son phallus érigé, figurant la virilité créatrice, et peut parfois avoir la peau noire.
En tant qu’Amon-Rê, seigneur des temples de Karnak, que tous les rois depuis le Moyen Empire ont cherché à embellir et agrandir, il est représenté avec la peau bleue, couronné d’un mortier surmonté de deux hautes plumes droites. Il peut être aussi criocéphale ou de façon plus rare prendre la forme de ses animaux sacrés, le bélier aux cornes recourbées et l’oie du Nil. Avec Mout, sa parèdre, et Khonsou leur enfant, ils forment la triade thébaine qui se compte parmi les plus importantes de la théologie égyptienne. À l’est de son grand temple de Karnak, il possédait un sanctuaire d’« Amon-qui-écoute-les-prières » où il répondait aux suppliques et rendait des oracles comme en témoignent les « stèles à oreilles » que lui adressaient ses fidèles. La statuette Co. 782 pourrait certainement avoir eu ce rôle d’offrande et d’intercesseur avec le dieu. Elle aurait été déposée par un dévot dans l’un des nombreux centres de culte d’Amon afin d’obtenir ses faveurs.
Malgré ces formes les plus communes, Amon peut se manifester sous bien d’autres figurations. Il est parfois léontocéphale, sous la forme d’un faucon ou d’un criosphinx.
Son culte, qui avait été placé au premier rang par les rois koushites, déclina quelque peu après le sac de Thèbes par les Assyriens, bien qu’à l’époque gréco-romaine il soit toujours identifié à Zeus.
Les collections du musée Rodin conservent deux autres statuettes en bronze représentant le dieu Amon anthropomorphe, Co. 1461 et Co. 5611. Toutefois, ces deux œuvres présentent Amon debout dans la position de la marche apparente.
Anépigraphe.
Acquis par Rodin entre 1893 et 1913.
BOREUX 1913 : Biron, 128, "Amon assis dans la position habituelle, le siège, le bras droit, les plumes de la coiffure et la base manquent, yeux jadis incrustés. Bronze creux. Haut. 21 cent. Estimé cent francs."
Donation Rodin à l'État français 1916.