Vase plastique

Harpocrate assis sur une oie

ÉGYPTE > PROVENANCE INCONNUE

Époque impériale

[VOIR CHRONOLOGIE]

TERRE CUITE 

CO. 2609

Commentaire

Etat de conservation

Incomplet. La tête de l'oie est lacunaire. Sa queue est brisée (restaurée). 

Description

Un enfant est assis sur une oie aux ailes repliées. Il est nu, la jambe gauche pliée devant lui et la jambe droite tendue en avant, recouverte d'un pan de son manteau qu'il porte sur l'épaule gauche et lui drape transversalement le dos. Il a la main gauche posée sur la cuisse et l'index de la main droite placé devant sa bouche selon le traditionnel geste de l'enfance. Il a les cheveux bouclés et porte une couronne de fleurs surmontée d'un élément pointu, peut-être un pschent. À sa droite, sur le dos de l'oie, est posée une corne d'abondance servant d'entonnoir au vase. Un appendice perforé sous le cou de l'animal servait de bec verseur. Le geste de l’enfance, associé à ce que l’on peut reconnaître comme un pschent suggèrent qu’il s’agit du dieu enfant Harpocrate. 
Harpocrate ou « Horus l’enfant » est le fils d’Isis et d’Osiris, qui intégra le panthéon grec comme fils d’Isis et de Sérapis, quittant alors la sphère osiriaque. Il était « synnaos theos », c’est-à-dire qu’il partageait l’espace sacré du temple d’Isis et/ou de Sérapis. Néanmoins, il connaît une popularité croissante à l’époque ptolémaïque, ce dont témoigne l’important nombre d’images du dieu. Celles-ci proviennent majoritairement des nécropoles orientales d’Alexandrie mais d’autres lieux ont livré du matériel coroplathique représentant le dieu enfant comme le Fayoum, Athribis, Touna en Moyenne-Egypte, ou encore à Coptos par exemple. La répartition de ces représentations n’est pas homogène : elles sont presque absentes du Delta égyptien. En revanche, la popularité croissante d’Harpocrate permet l’exportation de son iconographie en dehors d’Egypte, à Délos, Myrina ou Tarse entre autres. Enfin, il a été proposé que la fondation, sous le règne de Ptolémée IV Philopatôr (222-204 av. J.-C.), d’un sanctuaire à Harpocrate au sein du temple de Sérapis à Alexandrie ait pu influer, en tant qu’acte officiel, sur l’image d’un Harpocrate hellénisé (Ballet 2020, p. 220).
Les images permettent en effet d’attester l’intégration du dieu égyptien dans le panthéon hellène. Bien qu’affublé de la double couronne pharaonique, le vase plastique Co.02609 propose une version hellénisée d’Harpocrate, la couronne de fleurs tenant davantage de l’iconographie grecque. Le style participe également à cet hellénisme. En effet, bien que le modelé soit de mauvaise facture, le ventre rond et bombé d’Harpocrate ainsi que ses membres dodus sont nettement visibles. Le dieu est donc représenté ici avec les caractères physiques d’un enfant, trait de naturalisme qui apparait dans l’art grec à l’époque hellénistique. 
En revanche, la combinaison d’attributs, ici la superposition de la couronne de fleur et du pschent, relève davantage de l’époque impériale, période où nous pouvons constater l’abondance de coiffes employée pour une seule figure, allant parfois jusqu’à la débauche. 
Dieu fertile associé à la protection des enfants, Harpocrate est ici représenté avec une corne d’abondance dont la présence matérialise sa puissance. Par ailleurs, les représentations d’Harpocrate accompagné d’un animal ou le chevauchant, ici une oie, sont nombreuses. La présence de ces figures zoomorphes est comprise comme un symbole supplémentaire de la puissance fertile du dieu, qui ne concerne donc pas que la fécondité des humains mais également celle des animaux. La multiplication d’attributs sur une seule et même image avait d’ailleurs pour effet d’augmenter la puissance du jeune dieu. 
D’autres représentations d’Harpocrate assis sur le dos d’une oie sont connues, dont deux figurines conservées à Tübingen et publiées par Jutta Fischer en 1994 (Fischer 1994, Nr. 616-617, p. 277-278, pl. 64). Bien que vêtus sur ces deux exemple, Harpocrate y adopte une attitude similaire, assis de face sur une oie de profil, le doigt porté à la bouche et coiffé d’une couronne de fleur. La figurine numérotée Nr. 616 par Jutta Fischer a la posture la plus proche de Co. 2609, le dieu étant assis la jambe gauche repliée devant lui et la droite écartée, alors que la Nr. 617 est visiblement assise à califourchon sur l’oie. Mais cette dernière arbore la même coiffure, une superposition d’une couronne de fleurs alvéolée et d’un pschent comme la Co. 2609. Elles sont respectivement datées du début du Ier siècle av. J.-C. et de la première moitié du IIe siècle apr. J.-C. ce qui permettrait peut-être de proposer une fourchette de datation, bien qu’assez large, pour Co. 2609. 
Enfin, les figures animales avec lesquels Harpocrate est parfois associé peuvent aussi être interprétées comme les signes de syncrétismes avec d’autres divinités. Or, l’oie est un animal sacré d’Ammon. Ce vase plastique, pourrait alors être un marqueur du rapprochement de ces deux cultes. 
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