Ouchebti momiforme au nom de Neithemhat, fils de Roudbastet

ÉGYPTE > PROVENANCE INCONNUE.

BASSE ÉPOQUE, époque saïte, PROBABLEMENT XXVIe-XXVIIe DYNASTIES

[VOIR CHRONOLOGIE].

Faïence siliceuse BLEU-VERT

H. 8,9 CM : l. 2,4 CM (BRAS) : P. 1,9 CM (SOCLE)

CO. 2356

Commentaire

Etat de conservation

Complet. Très bon état de conservation : la glaçure a gardé sa couleur vive et son aspect brillant. Seules l’oreille et l’épaule droites sont légèrement endommagées. Des concrétions maculent la surface et les creux (voir en particulier l’espace entre les mèches de la perruque et la barbe postiche).

Description

Ouchebti en faïence siliceuse de couleur bleu-vert intense et brillant. Le personnage se tient debout, dressé sur une petite base rectangulaire légèrement trapézoïdale. Son corps est entièrement emmailloté : les membres ne sont pas visibles. Seules les mains – sommairement exécutées en relief – apparaissent croisées au niveau de la poitrine : celle de droite tient une houe et celle de gauche un pic. Le pouce gauche est visible. Le personnage porte une lourde perruque tripartite et une longue barbe fine et tressée. Les traits du visage sont soigneusement détaillés (arcades sourcilières et paupières sont visibles). De grandes oreilles, de forme triangulaire, sont indiquées. Au revers de l’objet figure un épais pilier dorsal qui atteint la hauteur de la tête. L’ouchebti faisait partie de l’équipement funéraire des défunts aisés. Chargée de répondre à l’appel du défunt pour effectuer à sa place les tâches agricoles dans le monde des morts (transposition de celui des vivants), la figurine Co. 2356 porte un sac de graines sur le dos. Placé du côté gauche, ce sac est représenté au moyen de croisillons réguliers et profondément incisés.

 

Le matériau et le style de l’ouchebti Co. 2356 permettent de le dater avec certitude de la Basse Époque (SCHNEIDER 1977, type 5.3.1). À cette période en effet, les deux houes qui étaient visibles dans les mains du serviteur à partir de la XVIIIe dynastie sont remplacées par un pic et une houe. Le pilier dorsal et les pieds de la figurine sont dorénavant placés sur une base rectangulaire. Autrefois privilège royal, les particuliers peuvent alors porter une barbe et tous les ouchebtis sont, à partir de cette époque, pourvus d’une barbe. Cette barbe peut être soigneusement détaillée, ce qui est le cas sur le Co. 2356.

 

Parmi les plus beaux exemplaires connus figurent les ouchebtis d’Hekaemsaef (XXVIe dynastie). La tombe de cet amiral, contemporain du pharaon Amasis (vers 550 av. J.-C.), a été découverte en 1903 près de la pyramide d’Ounas à Saqqara. Elle contenait 401 ouchebtis. L’un d’entre eux est actuellement conservé au Metropolitan Museum of Art de New York (16.9.1).

 

Un proche parallèle à Co. 2356, au nom de Padineboun, a été vendu chez Christie en 2000. Il a été daté entre la XXIXe dynastie et l’époque Ptolémaïque. Son inscription se trouve également sur le pilier du dorsal.

 

L’inscription gravée sur le pilier dorsal permet de préciser la datation de l’ouchebti Co. 2356 : l’époque saïto-perse. Le nom de son propriétaire, Neithemhat (« (la déesse) Neith est à l’avant ») est bien attesté à la Basse Époque. S’il s’agit généralement d’un prénom féminin (RANKE 1935, Bd I, p. 182, 1), la représentation et les titres de l’ouchebti correspondent à ceux d’un homme.

 

Les plus proches parallèles se trouvent dans la collection du musée Rodin. Les figurines Co. 2344, Co. 2354 et Co. 2372 sont de même type que Co. 2356, mais en moins bon état de conservation. La barbe et les traits du visage de Co. 2356 et Co. 2372 sont identiques.

 

Également appelés chabtis ou chaouabtis avant la XXIe dynastie, les ouchebtis (du verbe oucheb, « répondre ») sont des « répondants », des figurines funéraires chargées de répondre à l’appel du défunt pour effectuer à sa place les tâches agricoles dans le monde des morts. Les exemplaires les plus anciens sont peut-être à identifier parmi les figurines en terre crue ou en cire de la XIe dynastie (vers 2000 av. J.-C.). Au début du Moyen Empire, une formule magique devait être récitée sur une statue du maître défunt afin de le protéger des basses besognes obligatoires dans l’Au-delà. Cette effigie était généralement momiforme et en bois (cf. SCHNEIDER 1977, vol. I, p. 67). Les figurines en pierre apparaissent à la deuxième moitié de la XIIe dynastie et une formule magique apparaît alors sur leur corps. Il s’agit d’un extrait du chapitre VI du Livre des morts. Le nombre et la qualité des statuettes augmentent progressivement au cours du Nouvel Empire et, à partir de la Troisième Période intermédiaire (vers 1070 av. J.-C.), elles sont généralement réalisées dans une fritte émaillée de couleur bleue qui accroche le regard. Les ouchebtis sont particulièrement nombreux à la Basse Époque, une seule tombe pouvant en contenir environ quatre cent. (Concernant l’origine et la fonction des ouchebtis, cf. SCHNEIDER 1977, vol. I, p. 62-70 ; BOVOT 2003, p. 11-18 et p. 46-52)

Inscription

L’inscription a été gravée à l’arrière de la figurine. Une colonne de hiéroglyphes en creux est disposée en colonne sur toute la hauteur du pilier dorsal, depuis le haut de la tête jusqu’au bas du socle. Le texte se lit de droite à gauche : Osiris Neithemhat (RN 181, 1 ?) fils de ... Bastet-Roud (traduit par Jean-Luc Bovot)

Le signe nb et le signe pr seraient fragmentaires en raison d'une mauvaise application du moule.

Historique

Acquis par Rodin entre 1893 et 1913.

BOREUX 1913 : Hôtel Biron, 133, "Ushabti anépigraphe en terre émaillée verdâtre. Haut. 10 cent. 1/2. [Estimé 15 francs avec le 134]."

Donation Rodin à l’État français 1916.

 

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