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Silène

Applique de mobilier

Égypte > provenance inconnue

IVe siècle ap. J.-C. ?

[VOIR CHRONOLOGIE]

Os, humérus droit de bovidé ?

H. 6,9 cm ; L. 3,8 cm ; P. 1,8 cm

Co. 2150

Commentaire

Etat de conservation

L'œuvre est en bon état de conservation. Le fragment subsistant correspond à la partie gauche de la pièce. Sont préservés un segment de la bordure sommitale, ainsi que la moitié du bord senestre, marquée par une incurvation très prononcée. Une courte fente, surtout visible au dos de l’applique, fragilise l’angle supérieur conservé. La ligne de brisure, qui a entraîné la disparition des parties dextre et inférieure de la pièce, épouse les courbes du front et de l’épaule droite de la figure. Une tâche vert clair, sans doute liée à l’oxydation d’un objet métallique placé à proximité du relief lors de son enfouissement, se distingue légèrement au-dessus de la main du personnage. La surface, tout comme le revers, révèlent une usure importante.

Description

Bien que les arrachements qui interrompent la silhouette à la taille nous privent de sa partie inférieure, nombre de caractéristiques renvoient à une représentation de Silène. D’abord lié à l’univers théâtral, le type iconographique du vieux Silène au buste difforme et ventru, se met en place au IVe siècle av. J.-C. Reconnu à la fois comme le père nourricier de Dionysos et son précepteur, son image se répand rapidement dans les arts plastiques pour devenir une composante essentielle du cortège dionysiaque, aux côtés des satyres, du dieu Pan et des ménades.

 

Reconnaissable à son crâne dégarni, sa barbe abondante, et son embonpoint, Silène se présente de face tout en détournant la tête vers l’arrière. Sa main gauche s’appuie sur la hampe d’un thyrse tandis que sa main droite, difficile à identifier, semble être ramenée contre son ventre. Un Silène sculpté sur un fragment d’applique du musée Benaki à Athènes adopte la même attitude, qui ne semble pas particulièrement courante pour ce type iconographique (10318 : MARANGOU 1976, p. 97, n° 55, pl. 17c). L’amorce des plis d’un drapé au niveau de la cassure inférieure laisse supposer la présence d’un himation enveloppant les jambes, comme sur la plupart des appliques consacrées à cette iconographie. Les jeux d’étoffe devaient contraster avec le torse, resté nu, de manière à accentuer l’aspect adipeux du vieillard.

 

Le thyrse, attribut magique par excellence lié à Dionysos, s’observe fréquemment dans les mains de Silène. Il peut, à la fois rythmer les frénétiques mouvements de sa danse, tout en assurant son pas, comme sur le décor de placage en os conservé au département des Antiquités grecques, étrusques et romaines du musée du Louvre (MND 1866 : MARANGOU 1976, pl. 17a ; MICHON 1935-1937, p. 357-361, Pl.). La hampe lui sert aussi de soutien, évitant qu’il ne vacille sous l’effet de l’ivresse, à l’instar d’une figure tronquée de la série d’appliques du Staatliche Museum Ägyptischer Kunst de Münich (ÄS. 5296 : MARANGOU 1976, pl. 16c ; ESCHBACH 2014, p. 78, n. 13, p. 79, fig. 5), et des éléments de décor similaires découverts en 2002 sur l’acropole de Perge en Turquie (Inv. K.F1 / 44.02.6 ej : ESCHBACH 2014, p. 75-77, fig. 2).

 

Enfoncée dans les épaules, la tête se greffe sur un buste flasque. Les lourds plis de chairs sont matérialisés par une ligne redoublée en léger ressaut sur le ventre. Ce rendu de l’affaissement des tissus musculaires est récurrent sur bon nombre de reliefs. On l’observe notamment sur l’applique E 17199 du département des Antiquités égyptiennes du musée du Louvre (MARANGOU 1976, pl. 19b), et le relief 57.691 du Museum of Fine Arts de Boston (GRAEVEN 1903, p. 108, pl. 64). Cependant, le traitement plus synthétique du buste renvoie davantage à la figure qui se détache sur l’applique 18949 du musée Benaki (MARANGOU 1976, p. 96, n° 54, pl. 17b).

 

Le profil gauche du Silène dévoile un visage plutôt allongé, que termine une barbe en pointe aux poils raides incisés. L’œil enfoncé sous une arcade sourcilière proéminente et un front bombé, voisine avec un nez camus et une bouche lippue. À la base de la couronne de cheveux qui circonscrit le crâne chauve du personnage vient se loger une oreille au pavillon pointu. Bien que la tête offre un profil strict, son aspect rappelle, malgré des différences indéniables, les visages de Silène sur deux appliques : l’une au musée Benaki (10318 : MARANGOU 1976, op. cit.), la seconde au V & A Museum (823-1905 : LONGHURST 1927, p. 22 ; BECKWITH 1963, p. 12, 49, fig. 26).

 

En dépit d’une dépendance du type iconographique aux modèles hellénistiques, notre fragment ne peut avoir été sculpté avant le IIIe-IVe siècle. La rareté des reliefs en os datés des siècles précédents par contexte, et la rapidité d’exécution jointe à un manque de soin, sont deux arguments en faveur d’une attribution à cette période tardive. L. Marangou propose d’assigner à l’époque sévérienne les appliques 18949 et 10813 du musée Benaki, citées précédemment comme comparaisons, tandis qu’O. Wulff rattache au IIIe-IVe siècle, sur des critères stylistiques, deux appliques provenant d’Égypte, anciennement conservées aux musées de Berlin (WULFF 1909, p. 115, n° 403-404, pl. XVIII).

 

La seule applique supportant une image de Silène qui bénéficie d’un contexte archéologique est celle mise au jour à Perge (Turquie) (K.F1/44.02.6 ej : ESCHBACH 2014, op. cit.). N. Eschbach a proposé comme terminus ante quem pour la réalisation de celle-ci, la fin du IVe siècle ou le début du Ve siècle, date de destruction de la maison romaine dans le dernier niveau de laquelle le relief en os a été découvert. Ces analogies invitent à placer, de façon quelque peu arbitraire, la fabrication de notre applique au IVe siècle.

 

 

Comparaisons

-Athènes, musée Benaki, 10813 (position de la main sur le ventre et tête), inv. 18949 (buste).

-Boston, Museum of Fine Arts, 57.691 (plis de chairs du buste)

-Londres, V & A Museum, 823-1905 (visage).

-Paris, musée du Louvre, DAE, E 17199 (plis de chairs du buste).

Historique

Acquis par A. Rodin entre 1893 et 1917. Donation A. Rodin à l’État français en 1916.

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