Provenance inconnue, Égypte ?
Ier-IIe siècle ap. J.-C.
L. 15,5 cm ; l. 0,48 cm ; D. max. 0,45 cm
Os teint
Co. 5670
Provenance inconnue, Égypte ?
Ier-IIe siècle ap. J.-C.
L. 15,5 cm ; l. 0,48 cm ; D. max. 0,45 cm
Os teint
Co. 5670
Conservé dans son intégralité, l’objet offre une polychromie particulièrement bien préservée. Des sédiments se logent encore dans l’incision pratiquée au milieu du cuilleron. De légères taches brunes, correspondant à de petits sédiments incrustés dans le tissu osseux s’observent sur toute la longueur de la tige. Quelques traces d’étiquettes subsistent au dos de l’ustensile, sur sa partie distale.
Cette cuiller à parfum est constituée d’un corps rectiligne de section circulaire, effilé vers l’extrémité proximale, et qui s’élargit vers l’extrémité distale, pour donner naissance à un cuilleron ovale en forme de goutte. En son centre, une incision a permis de surcreuser le cuilleron, et de le doter d’une section en V. Le dos du cuilleron est légèrement incliné. Les caractéristiques typologiques de la cuiller-sonde semblent être particulièrement bien adaptées au prélèvement de crèmes, de fards ou d’onguents, conservés dans des flacons à col étroit, à l’image des balsamaires, des unguentaria, ou des ampoules de formes variées. La partie utile assez plate permettait également le mélange de différents produits ou cosmétiques, leur application sur la peau, ou leur retrait.
Répandu au Haut-Empire dans tout le bassin méditerranéen et perdurant jusqu’à une époque tardive, cet accessoire de toilette féminin est bien attesté en Égypte (PETRIE 1927, n° 68-69 p. 28, pl. XXIII). Les fouilles anciennes menées à Alexandrie et dans ses environs ont en livré plusieurs exemplaires : deux, issus des campagnes conduites à la demande d’E. von Sieglin, appartenaient à l’Albertinum Museum de Dresde (PAGENSTECHER 1913, n° 2 p. 235, pl. LIX-2), un troisième se trouvait dans les collections du Staatliche Museen de Berlin (I 3943 : WULFF 1909, n° 503 p. 128, pl. XXI). Plusieurs sites du Fayoum ont aussi révélé ce type d’ustensile. La missions archéologiques d’A. S. Hunt et B. P. Greffel, conduite à Tebtynis en 1899-1900, en a exhumé deux spécimens, abrités dans les collections du Phoebe A. Heart Museum à Berkeley (6-20462, 6-20463). On peut mentionner également une cuiller-sonde provenant de Karanis (FRIEDMAN 1989, n° 57 p. 147). Des instruments similaires ont été mis au jour sur des sites de Moyenne-Égypte : Médinet Madi (BRESCIANI 1976, n° 127-128, p. 18, Tav. XXIII), et Antinoé. Dans la nécropole nord de cette cité, la mission italienne a découvert deux sonde-cuillers (PINTAUDI 2014, fig. 40 p. 12).
Contrairement à l’ensemble de ces exemples qui présentent un cuilleron légèrement évasé et débordant par rapport au corps droit, notre objet offre un cuilleron placé dans l’exact prolongement du manche. Ce type peut être reconnu à la fois à Corinthe (DAVIDSON 1952, p. 181, n° 1328-1330 p. 184, pl. 82), mais aussi le long du limes à Mayence, en Suisse, à Augst, Lausanne et à Avenches. On le retrouve également à Lyon et à Nîmes (BÉAL 1984, n° 262, 268 p. 66, pl. 13).
Notre pièce a pour particularité de conserver un décor spiralé de couleur rose, l’habillant sur toute sa longueur. On imaginera volontiers que l’objet entouré d’un ruban, ou d’un fil attaché au sommet, a dû être plongé dans un bain de teinture de couleur carmin, ou badigeonné entièrement, afin de créer un décor en réserve, de spirales claires sur fond rouge. Ce genre d’ornementation se rencontre fréquemment sur des cuillers ou des épingles supposées provenir d’Égypte (WULFF 1909, n° 469 p. 125, pl. XXIII). Il constituait peut-être une alternative au façonnage de spirales dans la matière même de l’objet, ou s’inspirait d’exemplaires au manche torsadé en bronze. Il a été également mis en évidence sur un petit nombre d’artefacts découverts en Occident : le site autrichien de Magdalensberg a révélé cinq exemplaires de sonde-cuillers de même typologie que la nôtre, à décor de ruban en négatif (GOSTENČNIK 2005, p. 452, pl. 24/1.4.7, p. 454, pl. 25/5-6). De tels décors paraient d’autres catégories d’objets trouvés à Salzbourg, Lyon et Vienne.
La plupart des objets de comparaison cités ont été exhumés dans des contextes du Ier ou IIe siècle (SCHENK 2088 p. 41). L’un des exemplaires du site de Magdalensberg (GOSTENČNIK 2005, p. 452, pl. 24/1), particulièrement proche par sa forme et son ornementation, est attribué au règne de Claude. Bien qu’une cuiller à parfum ait été découverte dans un niveau du Ve siècle à Ostie, celle du musée Rodin peut être datée des deux premiers siècles de l’Empire romain.
Comparaisons
-Augst (DESCHLER-ERB 1998, p. 158, n° 2016-2020 p. 171-172, pl. 30).
-Avenches (SCHENK 2008, p. 41, n° 381 p. 189, fig. 107 p. 265).
-Lausanne (ANDERES 2015, p. 64-65, p. 120, 134).
-Lyon (BÉAL 1983, n° 774, p. 246, pl. XLVI).
-Magdalensberg (GOSTENČNIK 2005, p. 452, 454, pl. 24/1.4.7, pl. 25/5-6 : typologie et décor spiralé).
-Mayence (MIKLER 1997, p. 36, fig. 7 pl. 27).
Acquis par A. Rodin entre 1893 et 1917. Donation A. Rodin à l’État français en 1916.