Amulette de Thouéris

Égypte > Provenance inconnue

Période saïto-perse

[VOIR CHRONOLOGIE]

H. 5,6 CM : L. 2,2 CM : P. 2,3 CM 

Faïence

Co. 2331

Comment

State of preservation

L'œuvre est en mauvais état de conservation. Sous les naseaux, la partie droite du muffle a disparu. Le poignet droit et la main gauche de la déesse sont mutilés. La bélière dorsale est également cassée. La partie inférieure de la déesse a disparu, seul subsiste le haut de la cuisse droite, permettant de restituer une position debout.

 

Description

La figurine est debout, jambe droite en avant, les bras légèrement fléchis ballant le long du corps, mains placées au-dessus du nombril bien visible. Elle est coiffée d'une perruque tripartite qui descend jusque sous les omoplates et atteint le haut des seins pendants et généreux. Sa tête est celle d'un hippopotame à la gueule béante, aux oreilles horizontales débordant sur la perruque. Les arcades, les yeux, les joues, les yeux, les nasaux et les canines sont détaillés. Le ventre aux formes pleines rappelle celui d'une femme enceinte. Dans la partie basse de la perruque, apparaissent les attaches d'une bélière brisée. Sous la perruque se trouve un pilier dorsal orné de légères incisions en épis croisés qui représentent la queue de crococile caractéristique de la déesse Thouéris.

Cette figurine est à l’effigie de la déesse Thouéris, divinité à la popularité accrue dès le Nouvel Empire. Thouéris, forme hellénisée de la déesse égyptienne Ta-Ouret, « La Grande », s’inscrit dans la grande famille des divinités protectrices du foyer, telles que Bès ou Hathor. Représentée sous la forme d’un hippopotame, elle peut aussi arborer la tête d’une femme ou un corps totalement anthropomorphe. Déesse associée aux eaux primordiales, elle assure plus particulièrement la protection des femmes et assure le bon déroulement des accouchements. Ses seins et son ventre rappellent rappellent le caractère nourricier de la divinité.

Comme Bès et d'autres divinités protectrices du foyer, la déesse hippopotame a souvent la gueule ouverte pour effrayer et repousser les forces maléfiques. Le plus souvent, ses bras pendent le long de son corps, mais sur certaines amulettes la déesse tient un nœud d’Isis comme c'est le cas pour la figurine 83.2.311 conservée au Metropolitan Museum of Art de New York. La figurine Co. 2331 est donc un bel exemple des figurines protectrices également connues sous le nom d’amulettes. Ces objets, aux dimensions généralement petites, apparaissent dès le début de l’histoire. Si le mot amulette peut être traduit de différentes façons en égyptien, l’étymologie renvoie toujours à la notion de protection. Les amulettes, réalisées en différentes matières, représentaient des symboles mythologiques, comme par exemple l’œil oudjat ou le pillier djed, des signes hiéroglyphiques ou bien encore l’image de divinités. Mais il peut aussi s’agir de rouleaux de papyrus contenant des incantations magiques, pliés selon un certain procédé et portés par la personne à protéger. Cette tradition sera notamment très répandue au cours de la période ramesside (voir DONNAT 2016). Avant le Nouvel Empire, les amulettes ont été généralement retrouvées en contexte funéraire. Ces objets « précieux » étant utilisés aussi bien par les vivants que pour les morts, et ce  durant toute l’histoire pharaonique, on en plaçait, parfois en quantités conséquentes, entre les bandelettes des momies afin d’assurer au défunt un voyage paisible dans l’au-delà. Les amulettes sont également portées sur soi, soit en forme de pendentifs, de bracelets ou de bagues ; ce fut notamment le cas à Amarna (STEVENS 2009, p.10). La production des amulettes s’intensifia nettement au cours de la XVIIIdynastie, aidée en cela par une fabrication quasi industrielle d’objets en faïence siliceuse. Les amulettes, dont les matières devinrent de plus en plus variées, furent incluses en tant que bijoux dans les colliers ou les bracelets. Les amulettes, élément central de la piété populaire, nous informent sur les rituels ayant lieu au sein du foyer. Il n’est pas exclu que certaines d’entre elles étaient suspendues ou placées à divers de la demeure afin d’assurer la protection de la maisonnée. Malheureusement, la documentation actuelle nous livre peu d’informations concernant les rites de consécration de ces objets.

Bien qu’artificielle, la couleur bleu-vert de cette amulette est chargée de symbolique divine, soigneusement distinguée dans l’écriture de la couleur bleue naturelle pour laquelle les Egyptiens ajoutaient maa (véritable) devant hesebedj (bleu). Parmi les matières premières nécessaires à la fabrication d’objets émaillés de couleur dite “bleu égyptien”  se trouve la silice, élément nécessaire à la vitrification. La silice se trouve en particulier dans le quartz (disponible dans le désert oriental et à Assouan) ainsi que dans le sable d’Egypte.  L’ajout de feldspaths à la pâte peut compléter l’apport en silice. Comme il est nécessaire d’ajouter des substances au quartz pour le faire fondre à basse température, on retrouve dans les pâtes égyptiennes des alcalins tels que la soude, présente dans le natron disponible en particulier dans le Ouadi Natroun. L’ajout de chaux permet de former des silicates, permettant la fusion du quartz à basse température. Des éléments tels que la gomme arabique, l’argile et le natron sont également nécessaires pour conférer de la plasticité au quartz. C’est par l’oxyde de cuivre, issu de la calcination et de l’oxydation du cuivre, que naît cette tonalité bleue caractéristique de l’ancienne Egypte. Le cuivre était disponible dans le Sinaï, le désert oriental ou importé de Nubie et d’Asie mineure. L’ajout de cobalt pour renforcer la couleur bleue est possible. Afin de réaliser la figurine Co. 2331, la pâte composant la tête de Bès a été coulée dans un moule. Durant la cuisson, la vitrification a permis d’obtenir un objet finement émaillé.

De nombreuses amulettes à l’effigie de Thouéris, la plupart en faïence siliceuse ou en terre cuite vernissée,  ont été retrouvées à l’instar des amulettes 26.7.888 du Metropolian Museum of Art de New York. La figurine 26.7.887 du Metropolitan Museum of Art de New York est, par exemple,  similaire à celle du musée Rodin Co.2331. À Swansea, l’Egypt Centre conserve également une figurine similaire sous le numéro EC899.

Inscription

Anépigraphe.

Historic

Acquis par Rodin entre 1893 et 1913.

BOREUX 1913 : Hôtel Biron, 208, "Partie supérieure d'une Toueris debout. Terre émaillée verte. Travail assez fin ; haut. 5 cent. 1/2. Estimée cinquante francs."

Donation Rodin à l’État français en 1916.

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BES - Amulette

Egypte > Provenance inconnue

L'Empire des conquérants > Nouvel Empire

[VOIR CHRONOLOGIE]

H. 3,8  CM : L. 2,9 CM : P. 0,5 CM : Pds. 0,007 kg

Co. 6397

Comment

State of preservation

La figurine, incomplète, est cassée au milieu du ventre du personnage. Des fissures sont visibles au niveau de la calotte que porte le personnage sur la tête. Des bulles d’air percent la glaçure, visibles notamment au revers.

L’objet est empoussiéré. De la terre de fouille est incrustée dans les replis.

Description

La figurine Co. 6397 représente un personnage de profil, tourné vers sa gauche. La partie inférieure du personnage est manquante.

 

Le visage, grimaçant, est osseux et anguleux. Les joues sont creusées et entourées d’une courte barbe. La bouche, aux lèvres charnues, est ouverte. Le faciès est léonin : nez épaté, orbites imposantes, oreilles de lion s’étalant sur la crinière qui entoure le visage. On remarque la présence de mèches tombant derrière le crâne, figurant une chevelure drue. Le crâne est surmonté d’une coiffe épousant la forme d’un cône renversé. Une perforation cylindrique latérale a été ménagée au centre de la coiffe, permettant une suspension ou une fixation. L’aménagement de cette perforation a néanmoins considérablement fragilisé la figurine à cet endroit.

Les deux bras, courts et musclés, sont repliés. Ils élèvent un objet ayant la forme d’un disque bombé, que le personnage tient devant son visage. Il s’agit d’un instrument de musique –un tambourin- qu’il maintient de la main gauche et qu’il frappe de la main droite. Si la main droite est représentée à plat, en train de battre le rythme, la main gauche qui tient fermement l’instrument est artificiellement placée devant l’instrument. Ce procédé soigneux permet de rendre l’intégralité des gestes du personnage. Le ventre, corpulent, est arqué. En son centre, une petite dépression circulaire semble matérialiser le nombril, représenté de face. Sur le flanc, des marques parallèles sont profondément incisées en diagonale sous le bras. Le revers de l’objet est complètement plat. Le numéro d’inventaire est inscrit au revers à l’encre noire sur pellicule isolante.

 

La figurine Co. 6397 est de toute évidence à l’effigie du dieu Bès. Souvent considéré comme dieu, Bès est plutôt une sorte de divinité secondaire et un des génies protecteurs du foyer. D’origine nubienne, ses représentations sont attestées dès le Moyen Empire et le génie acquière une immense popularité au Nouvel Empire. Bès est un nom générique donné à toute une série de nains qui peuvent parfois être confondus avec d’autres génies tel Aha ou Hity. De forme naine, donc, Bès possède de long bras, est joufflu et affublé d’épais sourcils, d’une barbe et très souvent d’une couronne de plumes d’autruche. Au Nouvel Empire, Bès porte arbore souvent une peau de félin. Une des caractéristiques principales de son iconographie réside dans le fait que le génie est presque toujours représenté de face. Le nain a une parèdre, Beset, mais on lui attribue plus généralement Taoueret comme épouse. Protecteur du foyer, Bès assure aux humains un sommeil reposant, chasse les cauchemars et est le garant d’une vie sexuelle épanouissante. La sexualité est un aspect essentiel de sa personnalité, ce qui lui conférait de toute évidence un esprit gai et jovial, renforcé par son surpoids, signe d’abondance. Bès est une figure particulièrement importante dans l’univers de la femme et de l’enfant. Protégeant la parturiente et son fœtus pendant la grossesse et au moment de l’accouchement, il garantit également l’harmonie familiale. On doit son visage sévère, ses grimaces parfois effrayantes et ses postures guerrières à son devoir de protection. Bès protège les humains en éloignant les forces du mal et est ainsi généralement désigné comme étant le « Combattant ». Il est l’assistant magique de la déesse Hathor et non son égal. Bon nombre de ses représentations et effigies ont d’ailleurs été retrouvées dans les sanctuaires dédiés à la déesse. Bès est un personnage important dans le mythe de la déesse lointaine dans lequel on raconte qu’il escorta Hathor durant son retour en Egypte en lui jouant de la musique. Le génie est donc aussi le protecteur des danseuses et des prêtresses d’Hathor. Il incarne les aspects violents et défensifs de la déesse, décourageant ainsi ses ennemis et défendant ses fidèles. Des représentations du nain sont attestées jusqu’au premier siècle du premier millénaire de notre ère.

 

Cette effigie de Bès est une amulette, qui permettait d’assurer la protection des personnes et des foyers. Réalisées en nombre croissant au fil du temps et en différentes matières, les amulettes se présentent sous la forme de symboles mythologiques, comme par exemple l’œil oudjat ou le pilier djed, de signes hiéroglyphiques ou encore de représentations de divinités. Il peut aussi s’agir de petits rouleaux de papyrus contenant des incantations magiques, pliés selon un certain procédé et portés par la personne à protéger. Cette tradition sera notamment très répandue au cours de la période ramesside (voir DONNAT, 2016). Avant le Nouvel Empire, les amulettes sont surtout retrouvées en contexte funéraire. En effet, ces objets étaient utilisés aussi bien pour les vivants que pour les morts et durant toute l’histoire pharaonique, on en plaçait, parfois en larges quantités, entre les bandelettes des momies afin d’assurer au défunt un voyage paisible dans l’au-delà. Les amulettes sont également portées sur soi, soit en forme de pendentifs, de bracelets ou de bagues, comme ce fut notamment le cas à Amarna (STEVENS 2009, p.10). La production des amulettes s’intensifie nettement au cours de la XVIIIème dynastie, les matières deviennent de plus en plus variées et elles sont de plus en plus incluses dans des colliers ou des bracelets. Les amulettes sont donc un élément central de la piété populaire. Il n’est pas exclu que certaines d’entre elles étaient suspendues ou placées à divers endroits des demeures afin d’assurer la protection de la maisonnée. Malheureusement, les rituels de consécration permettant de rendre une amulette active restent encore difficiles à restituer.

 

Dans le type de figurine du Co. 6397, où le dieu est représenté de profil et frappe la mesure avec un tambourin, Bès est généralement coiffé d’un simple mortier à la place de l’habituelle imposante couronne des plumes. Voir, par exemple, la figurine EA54488 conservée au British Museum (http://www.britishmuseum.org/research/collection_online/collection_object_details/collection_image_gallery.aspx?assetId=556630001&objectId=130030&partId=1). La majorité de ces figurines, produites dès le début du Nouvel Empire, sont le plus souvent réalisées en faïence. En invoquant les forces divines cette amulette, qui éloignait les démons et autres génies malfaisants, assurait l’harmonie du lieu où elle était placée car la musique permettait de communiquer avec les sphères divines.

 

La couleur bleue de cette amulette, évoquant la turquoise, est hautement chargée de symbolique divine. Les Egyptiens distinguaient la couleur bleue naturelle de la couleur synthétique en ajoutant maa (véritable) devant hesebedj (bleu). Des expérimentations visant à produire des objets émaillés de couleur bleue ont sans doute eu lieu dès le Prédynastique certainement motivées par l’arrêt de l’importation du lapis-lazuli provenant du Badakhshan durant les Ière et IIème dynasties. La fabrication d’objets émaillés de couleur dite « bleu égyptien » nécessite de maîtriser l’usage de différentes matières.  La silice, élément nécessaire à la vitrification, est présente dans le quartz (disponible dans le désert oriental et à Assouan) ainsi que dans le sable d’Egypte. L’ajout de feldspaths à la pâte peut compléter l’apport en silice. Le quartz nécessitant des fondants dans le cadre de ces cuissons à basse température, des alcalis tels que la soude, présente dans le natron provenant du Ouadi Natroun, d’El Kab ou de la province de Baharie, sont utilisés. L’ajout de chaux permet de former des silicates et d’aider la fusion du quartz à basse. Des éléments tels que la gomme arabique, l’argile et le natron sont nécessaires pour conférer de la plasticité au quartz. Enfin, l’oxyde de cuivre, issu de la calcination et de l’oxydation du cuivre produit la couleur bleue (le cuivre étant disponible dans le Sinaï, le désert oriental ou importé de Nubie et d’Asie mineure). L’ajout de cobalt pour renforcer la couleur bleue est possible. La figurine Co. 6397 a été moulée puis recouverte d’une pâte formée d’un mélange des ingrédients mentionnés ci-dessus. A la cuisson, la glaçure s’est opérée, produisant au final l’aspect fortement émaillé de cet objet.  

Related pieces

Aucun objet similaire n’est conservé dans la collection égyptienne du musée Rodin. Il est possible d’évoquer l’allure complète de cette amulette en la rapprochant de figurines restées entières :

amulette W961/P de Swansea  (http://www.egyptcentre.org.uk/index.asp?page=item&mwsquery={Identity%20number}={W961/p}) ,

amulette 11.215.181 du Metropolitan Museum of Art de New York (http://www.metmuseum.org/art/collection/search/551493)

figurine UC2022 conservée au Petrie Museum (http://petriecat.museums.ucl.ac.uk/detail.aspx?parentpriref=)

Inscription

Anépigraphe.

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Ouchebti momiforme au nom de Kapachépès (?)

Égypte > provenance inconnue.

Nouvel Empire, fin de la XIXe dynastie probablement (d’après le style)

[VOIR CHRONOLOGIE].

Terre cuite polychrome.

H. 18,5 CM ; L. 5,3 CM ; P. 4 CM

Co. 2350

Comment

State of preservation

Très bon. La peinture est très bien conservée, hormis l’inscription peinte en noire sur fond blanc, qui est en partie effacée. Un grand éclat permet d’y observer le matériau d’origine, une argile de couleur rouge. La pupille droite est effacée, le nez arasé. Une petite fissure est située du côté droit des jambes.

Description

Ouchebti inédit en terre cuite polychrome. Le personnage se tient debout, mais le dessous des pieds est arrondi ; la statuette ne peut pas tenir debout sans support. Le dessus des pieds est indiqué en léger relief. Les autres membres ne sont pas visibles, hormis les bras croisés sur la poitrine, le visage et la perruque, qui ont été grossièrement modelés. L’objet est entièrement recouvert de peinture aux tons soutenus.

 

Bien que le corps ait été représenté emmailloté comme une momie, il est entièrement badigeonné d’une couleur ocre jaune. Les détails sont rehaussés au moyen de peinture ocre rouge et noire. L’inscription hiéroglyphique est mise en valeur par un fond blanc.

Sont ainsi matérialisés en rouge : le visage, les avant-bras croisés sur la poitrine, les multiples rangs du collier-plastron recouvrant son torse, ainsi que les instruments agricoles : les houes tenues dans les mains fermées, les vases qui pendent à une corde derrière chaque bras et le sac de graines triangulaire visible dans le dos. Au revers de la statuette, cette même peinture rouge délimite soigneusement le bord de la perruque.

La peinture noire met en évidence les traits du visage : la bouche, les yeux fardés et les sourcils. La longue perruque tripartite est recouverte d’une épaisse couche de peinture noire, sans indication de mèches. Les signes hiéroglyphiques, placés sur les jambes à l’avant de la statuette, ont été dessinés en noir. L’inscription, qui adopte un tracé cursif, a été appliquée sur un fond blanc délimité par deux épaisses lignes verticales rouges.

 

Il est possible de reconstituer les étapes du travail de l’artisan, en observant au niveau de l’épaule droite la peinture noire du pan de la perruque qui déborde sur les rangs du collier-plaston ocre rouge, ou le cadre blanc de l’inscription qui déborde sur la peinture rouge d’encadrement. Un badigeon ocre jaune a tout d’abord été appliqué sur tout le corps. Les détails peints en ocre rouge ont alors été dessinés, puis ceux en noir. L’espace dévolu au texte a été ensuite badigeonné de blanc. En dernier, les signes de l’inscription, cursifs, ont été tracés en noir ; les deux derniers signes ont été dessinés hors du cadre banc, débordant sous les pieds de la statuette.

 

En annonçant ses noms et titres, le texte contribue à assurer à Kapachépès/Ketje-chépès (sur l'anthropomnyme Kt, voir  RANKE, PN I, 350, 30-31-351, 1-2) une vie dans l’au-delà. Les deux lignes d’encadrement ocre rouge du texte épousent avec souplesse la silhouette du défunt et animent visuellement cet objet, réalisé dans un matériau simple : de la terre cuite moulée puis peinte. Cette couleur foncée étant celle des chairs masculines, ces deux lignes d’encadrement constituent de plus la partie inférieure de son corps, masquée par la colonne de texte. Jeune et souriant, les traits de son visage sont sereins pour l’éternité. Sa perruque laisse ses oreilles bien dégagées, ses yeux sont grands ouverts. Kapachépès peut écouter, voir, respirer le souffle de vie, s’alimenter. L’ouchebti peut avancer, puisque l’artisan a pris le soin d’individualiser ses deux pieds, et également travailler.

 

L’ouchebti faisait en effet partie de l’équipement funéraire des égyptiens aisés. Chargée de répondre à l’appel du défunt pour effectuer à sa place les tâches agricoles dans le monde des morts (transposition de celui des vivants), la figurine Co. 2350 tient dans ses poings fermés une houe. Peints de chaque côté le long des bras, ces deux instruments agraires sont en réalité à replacer dans l’axe voulu par l’artisan, c’est-à-dire dépassant des deux côtés du corps (sur la notion d’aspectivité dans les principes de représentation en Égypte ancienne, voir ZIEGLER, BOVOT 2001). Pour comparaison, voir par exemple le chaouabti de Toutânkhamon conservé au Musée Egyptien du Caire (Inv. N° JE 60830), où les insignes régaliens (le sceptre et le flagellum) du pharaon défunt sont insérés dans la figurine en bois.

 

Le matériau, la technique de fabrication et le style de la statuette Co. 2350 indiquent une datation du Nouvel Empire. On peut citer, à titre de comparaison stylistique, les douze ouchebtis en bois peint de la dame Henoutméhyt conservés au British Museum, à Londres.

 

La forme du sac de graines au milieu du dos et la présence des deux pots suspendus à une corde derrière les bras permettent de préciser la période de fabrication de cet objet : l’époque ramesside (XIXe dynastie, 13e siècle avant notre ère). Les pieds arrondis sont, quant à eux, caractéristiques de la fin de la XIXe dynastie, vers 1200 av. J.-C.

(source : https://www.ushabtis.com/chronological-overview/, 19th Dynasty)

Un exemplaire similaire à Co. 2350, au nom de Djéhoutymès, « Grand des Cinq » (titre des hauts prêtres de Thot à Hermopolis) est conservé dans une collection particulière. Il présente les mêmes caractéristiques que Co. 2350, comme les détails ajoutés au moyen de peinture, le sac de graines triangulaire dans le dos, et la formule contenue dans l’inscription.

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Le musée Rodin possède un autre ouchebti inscrit de l’époque ramesside (Co. 2357). Réalisé en calcaire polychrome,  il provient de l’équipement funéraire d’un certain Pentaour, grand dignitaire.

Inscription

Une colonne de hiéroglyphes cursifs a été peinte en noir sur fond blanc sur la face antérieure de la statuette. Elle s’étend jusque sous les orteils, les deux derniers signes dépassant du cadre blanc ménagé pour le texte. Elle donne le nom du défunt et ses titres funéraires qui l’assimilent au dieu des morts, Osiris. En raison de l’état de conservation de l’objet, la lecture du nom est incertaine. Aucun parallèle n’a été identifié dans l’état actuel des recherches.

 

Traduction fournie par D. Farout.

Historic

Acquis par Rodin entre 1893 et 1913.

BOREUX 1913 : Hôtel Biron, 222, "Ushabti en tere cuite peinte. Sur la face antérieure une ligne verticale d'hiéroglyphes noirs sur fond blanc dans le nom d'Osiris [hiéroglyphes]. Haut. 18 cent. Estimé vingt francs."

Donation Rodin à l’État français 1916.

 

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Ouchebti momiforme au nom de Ouâhibrê, fils de Hen (?)

Égypte > provenance inconnue.

Basse Époque, probablement XXVIe-XXVIIe dynasties (d’après l’inscription)

[VOIR CHRONOLOGIE].

Faïence siliceuse verte.

H. 19,2 CM ; L. 5,4 CM ; P. 3,9 CM

Co. 2401

Comment

State of preservation

Les pieds de la statuette ont été cassés puis recollés. La glaçure verte qui le recouvrait a en grande partie disparu et la surface est partout usée : les traits du visage ne sont plus reconnaissables et l’inscription est partiellement effacée. Un éclat récent dépare l’extrémité du nez.

Des taches rouges sont visibles à l’arrière, en bas de la figurine. Elles sont sans doute liées aux conditions d’enfouissement de l’objet (contact avec de la rouille ?)

Description

Ouchebti en faënce de couleur verte. Le personnage est représenté debout sur une petite base. Son corps est entièrement emmailloté, les bras croisés sur la poitrine. Seules les mains, qui tiennent chacune un instrument agricole (une houe et un pic), sont en relief et sortent de la gaine. On remarque que les doigts ont été rendus par des incisions et que le pouce, tendu, est particulièrement visible. La tête est ornée d’une longue perruque tripartite peinte en noir, aux mèches incisées, et le menton d’une longue barbe fine. Les oreilles, placées de chaque côté d’un visage allongé, sont soigneusement détaillées. Les pieds emmaillotés reposent sur une base très fine. Au revers de l’objet, un épais pilier dorsal s’arrête au bas de la perruque. Le polissage de sa surface n’a pas été effectué après démoulage.

Bien que gainée, la silhouette de ce défunt, d’un rang social élevé, respecte des formes et proportions adaptées. La courbe des reins, nettement marquée si l’on observe la figurine de profil, est puissante, ce qui montre un homme est en pleine possession de ses moyens.

 

L’ouchebti faisait partie de l’équipement funéraire des défunts aisés. Au fil du temps, ces figurines funéraires étaient réunies dans la tombe en nombre de plus en plus conséquent. Chargée de répondre à l’appel du défunt pour effectuer à sa place les tâches agricoles dans le monde des morts (transposition de celui des vivants), la figurine Co. 2401 tient dans ses poings fermés des instruments agricoles.

 

Le matériau et le style de l’ouchebti Co. 2401 permettent de le dater avec certitude de la Basse Époque (SCHNEIDER 1977, type 5.3.1). À cette période en effet, les deux houes qui étaient visibles dans les mains du serviteur à partir de la XVIIIe dynastie sont remplacées par un pic et une houe. Le pilier dorsal et les pieds de la figurine sont dorénavant placés sur une base rectangulaire. Autrefois privilège royal, les particuliers peuvent alors porter une barbe et tous les ouchebtis sont, à partir de cette époque, pourvus d’une barbe. Cette barbe peut être soigneusement détaillée.

 

Le nom du défunt suggère pour Co. 2401 une datation saïto-perse (XXVIe-XXVIIe dynasties). En effet, Ouâhibrê est un prénom masculin très courant à la Basse Époque (RANKE 1935-1977, p. 72 n° 28), notamment à la XXVIe dynastie. Il s’agit par exemple du nom de roi de Haute et Basse-Égypte du pharaon Psammétique Ier, qui a régné de 664 à 610 av. J.-C. On connaît également une dizaine de statues d’un gouverneur de Haute-Égypte du nom de Ouâhibrê, datant de la fin de la XXVIe dynastie (Louvre A 91).

 

Parmi les plus beaux exemplaires connus à cette époque figurent les ouchebtis d’Hekaemsaef. La tombe de cet amiral, contemporain du pharaon Amasis (vers 550 av. J.-C.), a été découverte en 1903 près de la pyramide d’Ounas à Saqqara. Elle contenait 401 ouchebtis. L’un d’entre eux est actuellement conservé au Metropolitan Museum of Art de New York (16.9.1). Contrairement à Co. 2401, il n’est pas inscrit.

 

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Les plus proches parallèles se trouvent dans la collection du musée Rodin. Les figurines Co. 2344, Co. 2354, Co. 2356 et Co. 2372 sont de même type que Co. 2401 et datent probablement de la même époque (VIIe-VIe s. av. J.-C.).

Inscription

Huit lignes de hiéroglyphes ont été gravées à l’avant de la statuette. Le texte contient le nom du défunt (Ouâhibrê) et une partie de celui de sa mère (Hen…), inclus dans un passage du chapitre 6 du Livre des Morts. Ce texte, classique, enjoint aux ouchebtis de répondre à l’appel au défunt au moment où celui-ci sera chargé de réaliser des travaux. Ils les effectueront à sa place.

 

Traduction fournie par Dominique Farout.

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Ouchebti momiforme d’Apis

Égypte > Sérapéum de Saqqâra probablement.

Nouvel Empire > XIXe ou XXe dynastie

[VOIR CHRONOLOGIE].

Faïence siliceuse bleu-vert clair.

H. 19,6 CM ; L. 4,8 CM ; P. 5,3 CM (hors tout) ; H. 15,6 CM ; L. 4,8 CM ; P. 3,6 CM (œuvre) ; H. 4 CM ; L. 4,2 CM ; P. 5,3 CM (socle)

Co. 2345

Comment

State of preservation

Bon état de conservation. La statuette est constituée de deux fragments. Les variations de couleur entre la partie supérieure et la partie inférieure de la figurine sont l’indice de conditions de conservation différentes. Étant donné qu’ils ne sont pas parfaitement jointifs, il est probable de suggérer que l’objet est en réalité l’assemblage de deux ouchebti d’un même type. À l’avant et à l’arrière de la figurine, une fissure court verticalement sur les jambes, conséquence de l’assemblage forcé des fragments de deux ouchebtis différents. Il est vraisemblable que cet assemblage ait été réalisé à l’époque de sa mise en vente sur le marché de l’art. La partie inférieure de la statuette – un socle de sarcophage emballant les pieds de la momie – a été brisée en deux parties, recollées.Toute la surface a perdu la vivacité de sa couleur bleu-vert pour tendre vers le blanc, notamment sur le visage, les bras et l’inscription. Le fragment inférieur a perdu sa glaçure, nettement plus verte à l’origine que celle du fragment supérieur.

Description

Co. 2345 est une statuette de serviteur funéraire, également appelé chabti, qui présente un corps humain et une tête de taureau (bucéphale). Le serviteur se tient debout, le corps entièrement emmailloté (seuls les bras, croisés sur la poitrine, sont figurés en relief). Les mains fermées, aux pouces visibles, tiennent chacune une houe peinte en noir sur le haut du bras. Ces deux outils sont l’évocation de la panoplie agricole nécessaire au défunt pour les corvées qui lui seront éventuellement confiées dans l’au-delà.

La partie supérieure a conservé les traces d’une colonne d’inscription, difficile à déchiffrer ; aucun signe n’est discernable sur la partie inférieure. De la peinture noire, en partie effacée, a été utilisée pour la perruque, le détail des yeux, du collier ousekh, des instruments agricoles et de l’inscription hiéroglyphique.

 

Toutes les caractéristiques de la tête d’un taureau sont représentées : un museau aux larges naseaux, des yeux écartés de part et d’autre de la boîte crânienne, de grandes oreilles de bovidé étirées de chaque côté et deux courtes cornes pointant au sommet du front. L’ensemble est encadré par une perruque tripartite longue qui s’ajuste subtilement aux caractéristiques physiques du taureau. La partie antérieure de la perruque s’avance en effet entre les deux cornes de l’animal et les oreilles du bovin sont bien visibles, totalement dégagées sur les mèches. Un collier à plusieurs rangs de perles moulés en relief puis rehaussés de noir se devine entre les deux pans de la perruque. Ce large collier assure une transition harmonieuse entre le cou de l’animal (en l’occurrence celui d’un bovidé) et le corps humain (emmailloté dans des bandelettes).

 

Dans le dos, la perruque s’arrête horizontalement au niveau des épaules. Un large sac à graines est dessiné sur ses reins, retenu sur les épaules par une cordelette.

 

Co. 2345 est un chabti de taureau Apis (sur le culte du taureau Apis, attesté dès la Ire dynastie, voir CORTEGGIANI 2007, « Apis », p. 46-48). Ce dieu, symbole de fertilité, de force physique et de puissance sexuelle, était représenté par un taureau, distingué de ses congénères par un pelage blanc tacheté de noir à certains endroits précis. Il pouvait également être représenté avec un corps d’homme bucéphale, aux cornes enserrant un disque solaire.

 

Son incarnation terrestre était vénérée sous la forme d’un taureau vivant, aux caractéristiques physiques déterminées. Il ne pouvait y avoir qu’un seul taureau Apis vivant. L’animal, repéré par les prêtres dans toute l’Égypte, était amené en grande pompe à Memphis et installé dans son temple, l’Apeium, voisin du grand temple de Ptah. Ptah était le dieu de Memphis et Apis était le fils du dieu Ptah. Le taureau sacré ne sortait du temple que pour des cérémonies religieuses, notamment la grande fête du Nouvel An. À sa mort, le taureau Apis était assimilé au dieu Osiris sous le nom d’Osiris-Apis (appelé Sérapis à l’époque gréco-romaine).

 

Selon les récits grecs et romains, l’incarnation terrestre du dieu ne pouvait pas vivre au-delà de vingt-cinq ans. Le taureau sacré était alors noyé dans un bassin prévu à cet effet sur les bords du Nil. Cette mise à mort rituelle, qui rappelle la noyade du dieu Osiris, devait respecter les textes sacrés égyptiens. Les prêtres partaient alors en quête de son successeur. Qu’il ait été sacrifié ou non, la mort du taureau Apis était un évènement majeur, et la durée de sa momification (soixante-dix jours) correspondait à un deuil national. L’embaumement faisait l’objet d’un rituel complexe et les funérailles étaient particulièrement fastueuses. Sa momie, déposée dans un sarcophage massif, était inhumée dans le Sérapéum de Saqqara, tombeau collectif construit à partir du Nouvel Empire et retrouvé en 1851 par Auguste Mariette (MARIETTE 1856).

Il est à noter que momifier un animal d’une telle taille impliquait une maîtrise parfaite des techniques d’embaumement, toute la difficulté résidant dans l’extraction des humeurs et la dessiccation des chairs, opération particulièrement conséquente en ce qui concerne un taureau.

 

Le premier Apis découvert au Sérapéum de Saqqara date du règne d’Amenhotep II (XVIIIe dynastie). Le tombeau a été agrandi par Ramsès II (XIXe dynastie), qui a fait construire des souterrains afin que chaque taureau puisse bénéficier d’un caveau qui lui était spécialement dédié. D’autres souterrains furent inaugurés par Psammétique Ier (XXVIe dynastie) et utilisés jusqu’à la fin de l’Antiquité.

 

Le mobilier funéraire qui accompagnait la momie du taureau était proche de celui des tombes égyptiennes classiques : ouchebtis, vases canopes, bijoux, amulettes (pour la période ramesside, voir le catalogue des objets exposés au Musée départemental Arles antique en 2016-2017 (CHARRON, BARBOTIN 2016). Lors de l’enterrement, ces figurines de serviteurs funéraires étaient offertes par des représentants de l’élite égyptienne, famille royale et hauts dignitaires (cf. AUBERT 2005, p. 15-54 : « À l’occasion de chaque enterrement, les dignitaires venaient rendre hommage à l’Osiris, substitut de Ptah, et lui offraient en dépôt votif un ou plusieurs superbes chaouabtis, qui sont aujourd’hui pour la plupart conservés au Louvre »).

Voici un exemplaire conservé au musée du Louvre. Le début de l’inscription est similaire à celle de l’ouchebti Co. 2345.

 

On constate grâce à ces autres exemples que l’iconographie du chabti du taureau Apis peut varier considérablement.

 

Concernant la figurine Co. 2345, les critères stylistiques suggèrent une datation de la fin du Nouvel Empire (XIXe ou XXe dynastie). En effet, les ouchebtis d’Apis plus tardifs (Troisième Période intermédiaire et Basse Époque) présentent généralement une tête humaine, parfois ornée d’une barbe osirienne (source : https://www.ushabtis.com/special-shabtis/). Exception à la règle néanmoins, deux des chaouabtis d’Apis en faïence siliceuse trouvés par Auguste Mariette dans les Petits Souterrains du Sérapéum de Saqqara et exposés à Arles en 2016-2017 (voir BOVOT Jean-Luc, « Chaouabti d’un taureau Apis », dans CHARRON-BARBOTIN 2016, notice 133, p. 286, et « Chaouabti d’Apis », id., notice 134 p. 286). Datés de la XIXe dynastie, ils sont conservés au musée du Louvre. Le premier possède une tête bovine (Inventaires N° N 5234, 14 ; IM 3213 ; S 1485 (partage de fouilles, Mariette) et le second une tête humaine (Inventaires N° N 5233 ; IM 3153 ; S 1870 (partage de fouilles, Mariette).

Inscription

Une colonne de hiéroglyphes est peinte à l’avant de la figurine. Seuls quatre signes sont encore lisibles.

 

Traduction fournie par D. Farout.

Historic

Acquis par Rodin entre 1893 et 1913.
BOREUX 1913 : Meudon / pavillon de l'Alma/vitrine 8, 339, "Ushabti à tête de taureau en terre émaillée verdâtre. Hiéroglyphes à peu près complètement effacés. Cassé et recollé. Haut. 15 cent. 1/2. Estimé dix francs."

Donation Rodin à l’État français 1916.

 

 

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Ouchebti momiforme

Egypte > Provenance inconnue

Basse Époque

[Voir chronologie]

H. 5 CM : L. 1,4 CM : P. 0,8 CM 

Co. 2397

Comment

State of preservation

L'œuvre est en mauvais état de conservation. L’ouchebti est complet mais très émoussé. Beaucoup d’inclusions et d’éclats sont visibles sur l’ensemble de la surface. 

Description

Il s’agit d’un ouchebti réalisé en faïence vernissée verte. Le personnage, au corps entièrement gainé, se tient debout, En dépit de l’état très émoussé de la matière, on distingue la forme arrondie du visage ainsi que la perruque tripartite, dont les mèches descendent jusqu’à la poitrine. Une barbe postiche est également identifiable. Les traits du visage sont complètement effacés. On constate que les bras sont plaqués contre le corps et repliés au niveau de la poitrine. Les poings sont serrés, laissant le pouce apparent et tiennent fermement deux instrumenst (houes ou pics). Un renflement le long de l’épaule gauche suggère la présence d’un sac à graines, pendant dans le dos. Le bas de la figurine est particulièrement accidenté. Les pieds présentent des défauts de modelage et une large fissure traverse la zone entre la cheville droite et la jambe gauche. L’ouchebti Co. 2397 a été moulé hâtivement, l’artisan n’ayant pas cherché à niveler les amas de matière (voir par exemple au sommet du crâne), ni à rectifier le modelage des pieds (défectueux), ni à effacer la fissure au niveau des chevilles (recouverture par la glaçure). Néanmoins, malgré des dimensions retreintes (la figurine est de la taille d’une amulette), les éléments nécessaires à un ouchebti sont présents. Ainsi, l’équipement agricole de base (houes ou pics et sac à graines) a bien été suggéré. Les pieds du personnage, entièrement gainé dans un linceul, reposent sur une petite base rectangulaire. Ce socle assure la stabilité du serviteur pour l’au-delà. La figurine est aux ordres du défunt, prête à assurer les corvées pour lui.

Le dos de cet ouchebti est plat. L’objet a été aplani afin de faciliter son dépôt dans la tombe (soit posé à plat, soit aligné dans un coffret). Une large dépression a été fortement imprimée de part et d’autre de l’objet, séparant la tête des épaules. La réalisation de cette dépression a provoqué un amas de pâte, qui dépasse légèrement de chaque côté.  de part et d’autre. Des inclusions et des éclats parsèment l’ensemble de la surface.

La figurine Co. 2397 s’inscrit dans la longue tradition du type bien particulier des ouchebtis, figurines funéraires égyptiennes attestées dès le début du Moyen Empire. Ces figurines sont à la fois une représentation du défunt et son substitut. La fonction de ces objets était d’accomplir dans l’au-delà les tâches serviles à la place du défunt, notamment les travaux agricoles. On en trouve les premiers exemples au cours de la Première Période Intermédiaire à travers des figurines de cire articulées. Les premiers ouchebtis traditionnels font leur apparition dans le matériel funéraire au cours de la XIème dynastie, indices de démocratisation des rites funéraires. On les trouve  mentionnés dans les Textes des Sarcophages,  désignés par le terme de shabou ou shabouty dont la racine renvoie à l’idée de « corvée ». Au cours du Nouvel Empire, c’est le terme shabti qui sera utilisé et qui renvoie cette fois-ci à l’idée de « remplacer ». À partir de la XXIème dynastie, le terme évoluera en ouchebti dont l’étymologie évoque la notion de « répondre ». 

D’aspect momiforme, non articulés, les ouchebtis peuvent être aussi bien féminins que masculins. Leurs dimensions varient, allant de quelques centimètres à plus de 60.  Jusqu’au Nouvel Empire, les ouchebtis sont réalisés en pierre. Au cours de la XVIIe dynastie, des exemples en bois sont produits, de forme rectangulaire et de facture assez frustre. Le Nouvel Empire voit l’apparition d’ouchebtis en faïence, et des modèles en terre cuite et en bronze sont produits dès la Basse Epoque. Au cours de la XIXe dynastie, des ouchebtis non momiformes mais représentés habillés sont réalisées. Un exemple de ce type d’ouchebti est conservé à l’Egypte Centre de Swansea sous le numéro d’inventaire W379. Plusieurs modèles sont représentés portant des outils agricoles ou encore des amulettes. Les ouchebtis peuvent être placés à différents endroits de la tombe. Certains furent retrouvés dans des petits sarcophages individuels ou bien dans de grandes caisses reprenant la forme des sarcophages de style rishi de la Seconde Période Intermédiaire. On a également retrouvé des ouchebtis dans des petits naos ou encore placés dans des cavités creusées dans les murs de la sépulture. On les rangeait également dans des coffrets décorés à l’instar de celui de Bakimen conservé au Musée du Louvre sous le numéro d’inventaire N2920.

Le nombre déposé variait selon les sépultures, de quelques exemplaires à plusieurs centaines de figurines. La cache royale de Deir el-Bahari, qui a livré les sarcophages et dépouilles de beaucoup de souverains du Nouvel Empire, enfermait également un nombre impressionnant d’ouchebtis en faïence.

 

C’est à partir du Nouvel Empire que la production des ouchebtis s’accélère. Produits en masse, ils connaîtront un succès populaire considérable jusqu’à la période gréco-romaine.

 

Beaucoup d’ouchebtis sont inscrits. Ces inscriptions peuvent être incisées ou peintes. Il s’agit de formules permettant de donner l’ordre aux ouchebtis de travailler pour leur maître. Ces formules, originellement inscites dans les différentes versions des Textes des Sarcophages ainsi que du Livre des Morts, sont incisées directement sur  les ouchebtis dès la XVIIe dynastie.

 

L’ouchebti Co.2397 a été réalisé en faïence dite égyptienne. Cette technique fait son apparition au Nouvel Empire et permet de créer des objets imitant l’aspect du lapis-lazuli et de la turquoise, la couleur bleue étant est chargée de symbolique divine. Les Egyptiens distinguaient d’ailleurs la couleur bleue naturelle de la couleur synthétique en ajoutant maa (véritable) devant hesebedj (bleu). Des expérimentations visant à produire des objets émaillés de couleur bleue ont sans doute eu lieu dès le Prédynastique certainement motivées par l’arrêt de l’importation du lapis-lazuli provenant du Badakhshan durant les Ière et IIème dynasties. Parmi les matières premières nécessaires à la fabrication d’objets émaillés de couleur dite bleu égyptien,  il y a la silice, élément nécessaire à la vitrification que l’on peut retrouver dans le quartz (disponible dans le désert oriental et à Assouan) ainsi que dans le sable d’Egypte.  L’ajout de feldspaths à la pâte peut compléter l’apport en silice. Le quartz nécessitant des fondants afin de fondre à basse température, on retrouve dans les pâtes égyptiennes des alcalis tels que la soude, présente dans le natron lui-même disponible dans le Ouadi Natroun, à El Kab ou dans la province de Baharie. L’ajout de chaux aide la fusion du quartz à basse température. Des éléments tels que la gomme arabique, l’argile et le natron sont également nécessaires pour conférer de la plasticité au quartz. Enfin, l’oxyde de cuivre, issu de la calcination et de l’oxydation du cuivre donne la couleur bleue (le cuivre étant disponible dans le Sinaï, le désert oriental ou importé de Nubie et d’Asie mineure). L’ajout de cobalt pour renforcer la couleur bleue est possible. Une fois les ingrédients réunis puis réduits en poudre, les ingrédients sont chauffés entre 750°C et 850°C. A cette température, ils ne fondent pas mais le gaz généré durant l’opération s’échappe, permettant aux composants de se mélanger. Cette technique de “frittage” peut durer de quelques heures à quelques jours. L’ensemble obtenu est brusquement refroidi, broyé, puis fondu en obtenant une température entre 1000 et 1200°C . Pour améliorer la qualité de la pâte, l’opération peut être recommencée jusqu’à l’obtention d’une masse vitreuse résistante. Cette pâte peut alors être moulée ou taillée. 

L’ouchebti Co.2397 a vraisemblablement été moulé en série. Sa forme et sa couleur suggèrent une production d’époque tardive. 

Si la très petite taille de cet ouchebti est unique dans la collection égyptienne du musée Rodin, des exemplaires similaires sont conservés dans différentes collections à l'instar de l'Egypt Centre, Swansea: N°EC798 et N° W5088, West Park Museum: N° 1821.1977 (JANES, 2010, p.37), ainsi qu'au Petrie Museum: N° UC57670.

Inscription

Anépigraphe.

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Isis Lactans

Isis allaitant Horus l'Enfant

ÉGYPTE > PROVENANCE INCONNUE

TROISÈME PÉRIODE INTERMÉDIAIRE OU ÉPOQUE TARDIVE > XXIe - XXXe dynastie > 1069 - 332 AVANT J.-C.

[voir chronologie]

FAÏENCE

H. : 6,7 cm ; L. : 2 cm ; P. : 2,3 cm 

Co. 2370

Comment

State of preservation

L'oeuvre est complète à l’exception de la pointe de la corne droite de la couronne. La vitrification à l’origine bleu clair qui recouvrait l’objet a presque disparu. Elle est visible en particulier au bas du pilier dorsal et sur le siège de la déesse.

Description

L’œuvre figure Isis assise les jambes jointes, donnant le sein à Horus-l’Enfant appelé également Harpocrate. Sur cette forme d’Horus (Hor-pa-Khered en égyptien, Harpocrate en grec), image populaire du dieu-fils du panthéon égyptien, voir SANDRI Sandra, Har-pa-Chered (Harpokrates). Die Genese eines ägyptischen Götterkindes, OLA 151, 2006 et CORTEGGIANI Jean-Pierre, « Harpocrate », L’Égypte ancienne et ses dieux. Dictionnaire illustré, s. l., 2007, p. 173-175. Sa main gauche est posée sur la nuque de l’enfant, soutenant sa tête. Pour faciliter l’allaitement, Isis a placé sa main droite sur son sein gauche.

Horus est assis sur les genoux de sa mère, tourné vers le côté droit, les bras le long du corps. La déesse est assise sur un siège rectangulaire à léger dosseret, recouvert d’un épais tissu formant un coussin. À l’arrière, un piler dorsal s’élève jusqu’au sommet de la couronne, consolidant l’ensemble. Les pieds de la déesse reposent sur une petite base rectangulaire. On note que les deux personnages ainsi que le siège et la base font partie d’un même ensemble contrairement aux figurines Co. 209 et Co. 210 pour lesquelles les sièges sont indépendants du groupe divin. Isis est coiffée d’une perruque tripartite surmontée de la couronne hathorique qui se compose d’un disque solaire flanqué de deux cornes de vache. La couronne est moulée dans la masse et est insérée dans un mortier qui surmonte la perruque. Isis est vêtue d’une longue robe moulante s’arrêtant au-dessus des chevilles. L’enfant est probablement nu et coiffé d’un bonnet. Il porte une épaisse mèche de l’enfance sur le côté droit du crâne.

La statuette Co. 2370 est de manufacture assez grossière. En effet, on remarque l’absence de cou et de détail anatomique pour la déesse, mise à part une poitrine volumineuse. Les traits de son visage sont arrondis. Son visage est carré avec des joues pleines, voire potelées. Le front est petit alors que les yeux sont grands et ouverts. Le nez est large et empâté alors que la bouche est petite et fine. Le court menton est volontaire. Enfin, les oreilles sont clairement modelées sur un même axe horizontal. Les épaules sont carrées, les bras massifs et sans détail de musculature. La taille n’est pas marquée, les jambes ne sont pas visibles au travers du tissu de la robe et les pieds, carrés et aplatis en leur extrémité, sont sommairement représentés. L’enfant possède des pieds ébauchés et ballants. De la tête d’Horus, seuls les oreilles et la mèche de l’enfance sont discernables.

Un large trou de suspension a été ménagé entre la base de la couronne d’Isis et le pilier dorsal. Conçue pour être vue de face et de petite taille, il est probable que la statuette Co. 2370 était destinée a être accrochée en hauteur et utilisée comme amulette.

 

Au-delà de l’image de l’amour maternel, les statuettes d’Isis allaitant Horus illustrent un des mythes fondateurs de la civilisation et de la royauté égyptiennes. Prodiguant ses soins au fils posthume d’Osiris, Isis assure la survie de son enfant et le protège des puissances maléfiques représentées par Seth. Mécontent de n’être que le frère du roi Osiris, Seth assassine son propre frère puis s’attaque à l’héritier du trône Horus. Or Isis, magicienne experte et déesse nourricière, cache son enfant dans les marais du Delta afin d’assurer la succession. Outre la symbolique mythologique, ces statuettes représentent également l’image du roi allaité par une divinité, image connue depuis l’Ancien Empire grâce entre autres aux Textes des Pyramides qui font mention d’Isis allaitant le roi (cf. LECLANT Jean, « Le rôle du lait et de l’allaitement d’après les Textes des Pyramides », JNES 10, 1951, p. 126). C’est par cet acte maternel que la déesse offre au souverain protection divine et le reconnaît comme étant de caractère divin. À l’origine, l’allaitement concerne exclusivement la survie du roi, avant d’être sous Montouhotep II (Moyen Empire, premier roi de la XIème dynastie), associé au couronnement pharaonique. En affirmant sa filiation au dieu Horus-enfant, il lui accorde la légitimité nécessaire pour régner. L’allaitement assure ainsi la continuité et la perpétuité de sa souveraineté.

 

À la Basse-Époque, Isis obtient un culte propre qui la démarque peu à peu du mythe osirien et par conséquent des cultes funéraires. Dans la pensée populaire, elle est étroitement associée à Hathor, déesse vache incarnant la prospérité grâce à son image nourricière. Elle reprend ainsi symbolisme et attributs d’Hathor, notamment les cornes de vache flanquant le disque solaire de la couronne. Isis devient par la suite l’emblème de la féminité en tant qu’épouse d’Osiris et mère d’Horus et l’une des déesses les plus populaires. Pour une présentation générale d’Isis, voir DUNAND Françoise, Isis, mère des dieux, Paris, 2000 puis Arles, 2008 et CORTEGGIANI Jean-Pierre, « Isis », L’Égypte ancienne et ses dieux. Dictionnaire illustré, s. l., 2007, p. 244-249. Sur le rayonnement d’Isis dans le monde méditerranéen, voir le catalogue de l’exposition à Milan en 1997, ARSLAN Ermanno A. dir, Iside. Il mito, il misterio, la magia, Palazzo Reale, 22 février-1er juin 1997, Electa, Milan, 1997.

 

Ces statuettes, issues de commandes privées, étaient déposées dans les sanctuaires dédiés à la déesse afin d’accorder vie, prospérité et santé au dévot, comme Isis les a accordées à son fils et aux souverains égyptiens. Pour un corpus iconographique d’Isis lactans à l’époque gréco-romaine, voir TRAN TAM TIHN Vincent, LABRECQUE Yvette (coll.), Isis lactans. Corpus des monuments gréco-romains d’Isis allaitant Harpocrate, Etudes préliminaires aux religions orientales dans l’Empire romain 37, 1973.

 

Ce type de statuette était largement répandu à partir de la Troisième Période intermédiaire. Nombre de musées en possèdent dans leurs collections, en grande quantité. Nous ne donnons ici que quelques exemples datant tous de la Troisième Période intermédiaire ou de la Basse-Époque.

Musée du Louvre, Paris : Inv. N° E 3637, N 5022, AF 13341, E 3636 ...

Metropolitan Museum of Art, New York : Inv. N° 17.190.1641, 45.4.3a et b, 1972.62, 04.2.443 ...

Museo Egizio di Torino, Turin : Inv. N° Cat. 0154, S. 00034, S. 00033, Cat. 0156 ...

Penn Museum, Philadelphie : Inv. N° E 14293, E 14328, E 502, E 504, E 880 ...

Walter Art Museum, Baltimore : Inv. N° 54.415, 54.416, 54.417, 54.792 ...

Related pieces

Les collections du musée Rodin conservent d’autres exemples d’Isis Lactans, notamment Co. 209, Co. 210, Co. 1487, Co. 2409, Co. 2429, Co. 2433 et Co. 5787, en revanche, toutes ces oeuvres sont en bronze.

Inscription

Anépigraphe.

Historic

Acquis par Rodin entre 1893 et 1913.

Donation à l’État français en 1916.

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Bès combatttant

Égypte > Provenance inconnue

Nouvel Empire ou après

[VOIR CHRONOLOGIE]

Terre cuite

H.  18, 7 CM : L. 16, 2 CM 

Co. 3090

Comment

State of preservation

La statue est cassée au niveau du nombril, de l’épaule, de l’oreille et du flanc gauches, du bras droit et au-dessus du front.

Description

Il s’agit d’une représentation du dieu Bès en terre cuite. L’état de conservation ne nous permet d’admirer que le visage et le buste du génie. Bès réalise ici une mimique effrayante destiné à impressionner. Les sourcils sont épais et longs, les yeux étirés et globuleux semblent regarder vers le bas. Les pommettes sont saillantes et les joues charnues. Le nez, cassé sur le dessus, est épaté. Des longues moustaches encadrent ses lèvres et tombent en volutes jusqu’au menton, découvrant une bouche ouverte et une lèvre supérieure pulpeuse. Le génie tire la langue. La seule oreille conservée, la droite, est grande, le lobe orné d’un rond en relief qui figure peut-être un bijou. Les longues mèches de sa barbe tombent sur son cou. Le torse est paré d’une peau de léopard, dont la tête apparaît au milieu de la poitrine. Les plis de la peau peuvent aussi bien représentés les muscles que les bourrelets du nain. Selon la seule partie du bras droit encore conservés, il semble que le génie le levait en l’air. L’ancienne étiquette se trouve collée à l’arrière de la statuette, dont la surface est relativement plane.

 

Bès est une divinité secondaire protectrice du foyer. Ses représentations sont incontestablement attestées dès le Nouvel Empire. Bès est un nom générique donné à toute une série de nains qui peuvent parfois être confondus avec d’autres génies tels Aha ou Hity. De forme naine, Bès possède de long bras, est joufflu et affublé d’épais sourcils, d’une longue barbe fournie et très souvent d’une couronne de plumes d’autruche. Au Nouvel Empire, Bès porte souvent une peau de léopard. Une des caractéristiques principales de son iconographie réside dans le fait que le génie est presque toujours représenté de face. Le nain a une parèdre, Beset, mais on lui attribue généralement Taoueret comme épouse. Protecteur du foyer, Bès assure aux humains un sommeil reposant, chasse les cauchemars et est réputé leur garantir une vie sexuelle épanouissante. La sexualité est un aspect essentiel de sa personnalité, ce qui lui conférait de toute évidence un esprit gai et jovial, renforcé par son surpoids, signe d’abondance. Bès est une figure particulièrement importante dans l’univers de la femme et de l’enfant. Il les protège pendant la grossesse et au moment de l’accouchement et garantit l’harmonie familiale. On doit son visage sévère, ses grimaces parfois effrayantes et ses postures guerrières à son devoir de protection. Bès protège les humains en éloignant les forces du mal et est ainsi généralement désigné comme étant le « Combattant ». Il est l’assistant magique de la déesse Hathor et non son égal. Bon nombre de ses représentations et effigies ont d’ailleurs été retrouvées dans les sanctuaires dédiés à la déesse. Bès est un personnage important dans le mythe de la déesse lointaine (voir INCONNU-BOCQUILLON Danielle, Le Mythe de la Déesse Lointaine à Philae, Bibliothèque d’Études, Institut Français d’Archéologie Orientale132, Le Caire, 200), dans lequel on raconte qu’il escorta Hathor durant son retour en Égypte en lui jouant de la musique. Le génie est donc aussi le protecteur des danseuses et des prêtresses d’Hathor. C’est pour cette raison que l’on retrouve souvent son image sur des sistres (par exemple au Walter Art Museum de Baltimore, 54.493). Il incarne les aspects violents et défensifs de la déesse, décourageant ainsi ses ennemis à s’en prendre à ses adorateurs. Bès connaîtra une postérité puisque l’on retrouve des représentations du nain jusqu’au premier siècle du premier millénaire de notre ère. On a retrouvé un certain nombre de ses effigies dans la ville d’Akhetaton et il est possible qu’un lieu ait été consacré à son culte dans l’oasis de Bahariya.

 

 

L’effigie Co. 3090 semble avoir été initialement une grande représentation du dieu, dont l’arrière était plat. Il est possible qu’un tel objet ait été placé dans une maison comme protection du foyer ou encore placés dans un sanctuaire dédié à Hathor comme offrande en vue d’obtenir les faveurs de la déesse ou en remerciement d’une grâce obtenue en lien, sans doute, avec la vie familiale, sexuelle ou la santé. Le musée du Louvre possède des statuettes similaires en terre cuite à l’instar de celle conservée sous le numéro AO 2171.  Le British Museum possède également des objets similaire au Co.3090 à l’image de celui conservé sous le numéro d’inventaire 1986,1208 7.

 

Cette effigie de Bès date peut-être du Nouvel Empire au moins, et plus vraisemblablement d’une période plus récente. 

 

La collection égyptienne du musée Rodin possède sept autres objets à l’effigie de Bès, à savoir ceux inventories sous les numéros Co. 2736, Co. 2596, Co. 3064, Co. 3385, Co. 966, Co. 5676, Co. 5677. Une autre representation de Bès en terre cuite est enregistrée sous le numéro Co. 2596.

Inscription

Anépigraphe.

Historic

Acquis par Rodin entre 1893 et 1913.

BOREUX 1913 : Hôtel Biron, 110, "Fragment d'une statue de Bès en terre cuite. La coiffure les bras et le bas du corps manquent. 18 x 16. Estimé deux cents francs."

Donation Rodin à l’État français 1916.

 

Historic comment

Le relief fut exposé à l’hôtel Biron, parmi les chefs-d’œuvre de la collection égyptienne, là où Charles Boreux le décrivit à l’été 1913 dans l’inventaire qu’il fit en vue de la donation à l’État français.

 

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Amulette de Bès

Égypte > Provenance inconnue

Nouvel Empire

[VOIR CHRONOLOGIE]

Faïence

H. 3, 8 CM ; L. 2, 5 CM 

Co. 2736

Comment

State of preservation

L'œuvre est en mauvais état de conservation. Elle est en effet cassée au milieu de la tête et on observe des traces de brûlures à la base au revers.

Description

Il s’agit d’une petite effigie de Bès, cassée au milieu de la tête, juste au-dessus du nez. Du nain ne reste donc que la moitié du visage, dévoilant ainsi un bout du nez épaté et une bouche dotée de lèvres charnues. Dotée d’une large barbe dont les mèches épaisses retombent jusqu’au cou, la divinité était selon toute vraisemblance en train de tirer la langue, attitude d’intimidation et de protection. Le génie a les bras joints sous le visage, les mains n’étant pas sculptées. Le ventre est saillant, la dépression du nombril large et profonde. Les hanches sont larges, les cuisses, arquées, sont potelées et marquées de bourrelets. Les attributs sexuels du génie, bien visibles, ont été exécutés sommairement. Les pieds reposent sur une petite base. A l’arrière, le dos est plat, traversé dans le sens de la longueur par un tube de forme rectangulaire muni de deux larges orifices tubulaires qui le traversent à l’horizontale, un au niveau de la tête et un autre au niveau des jambes. Il est possible d’y voir un système de suspension destiné à disposer la figurine dans un collier prophylactique ou bien sur une paroi. Au pied de ce tube est inscrit le numéro d’inventaire actuel à l’encre noire sur une pellicule isolante. On observe des traces cramoisies à cet emplacement, traces d’incendie ou bien stigmates d’un objet soumis à une cuisson trop élevée.

 

Cette figurine à l’effigie de Bès est de toute évidence une amulette, réalisée en faïence égyptienne. Bien que souvent considéré comme un dieu, Bès est une divinité secondaire. D’origine nubienne, ses représentations sont attestées dès le Moyen Empire. Au Nouvel Empire, il devint une divinité extrêmement populaire. Bès est un nom générique donné à toute une série de nains qui peuvent parfois être confondus avec d’autres génies tel Aha ou Hity. De forme naine, Bès possède de longs bras, un masque de type léonin, est joufflu et affublé d’épais sourcils, d’une barbe-crinière aux longues mèches détaillées et très souvent coiffé d’une couronne de plumes d’autruche retenues par un bandeau (voir par exemple la statuette en calcaire musée Rodin Co. 3385) ou fichées dans un mortier. Au Nouvel Empire, Bès arbore souvent une peau de léopard. Une des caractéristiques principales de son iconographie réside dans le fait que le génie est presque toujours représenté de face, convention inhabituelle à l’art égyptien. Le nain a une parèdre, Beset, mais on lui attribue généralement Taoueret comme épouse. (Sur les divinités Bès et Beset, voir CORTEGGIANI 2007 p. 84-87). Protecteur du foyer, Bès assure aux humains un sommeil reposant, chasse les cauchemars et est réputé garantir une vie sexuelle épanouissante. La sexualité est un aspect essentiel de sa personnalité, ce qui lui conférait de toute évidence un esprit gai et jovial, renforcé par son surpoids, signe d’abondance. Bès est également une figure particulièrement importante dans l’univers de la femme et de l’enfant. Il les protège pendant la grossesse et au moment de l’accouchement et garantit l’harmonie familiale. On doit son visage sévère, ses grimaces parfois effrayantes et ses postures guerrières à son rôle de protecteur. Bès protège les humains en éloignant les forces du mal et est ainsi généralement désigné comme étant le « Combattant », adoptant dans ce cas une posture guerrière et arborant épée et bouclier (voir la figurine en terre cuite Co. 2596). Bès est l’assistant magique de la déesse Hathor et non son égal. Bon nombre de ses représentations et effigies ont d’ailleurs été retrouvées dans les sanctuaires dédiés à la déesse. Dans le mythe de la déesse lointaine (voir INCONNU-BOCQUILLON 2001), on raconte qu’il escorta Hathor durant son retour en Egypte en lui jouant de la musique, accordant ainsi au génie un rôle supplémentaire, celui de protecteur des danseuses et des prêtresses d’Hathor. Il incarne de plus les aspects violents et défensifs de la déesse, décourageant les velléités d’attaque de ses ennemis contre ses adorateurs. Bès connaîtra une postérité féconde, jusqu’au premier siècle de notre ère.

Bien qu’artificielle, la couleur bleu-vert de cette amulette est chargée de symbolique divine, soigneusement disinguée dans l’écriture de la couleur bleue naturelle pour laquelle les Egyptiens ajoutaient maa (véritable) devant hesebedj (bleu). Parmi les matières premières nécessaires à la fabrication d’objets émaillés de couleur dite “bleu égyptien”  se trouve la silice, élément nécessaire à la vitrification. La silice se trouve en particulier dans le quartz (disponible dans le désert oriental et à Assouan) ainsi que dans le sable d’Egypte.  L’ajout de feldspaths à la pâte peut compléter l’apport en silice. Comme il est nécessaire d’ajouter des substances au quartz pour le faire fondre à basse température, on retrouve dans les pâtes égyptiennes des alcalins tels que la soude, présente dans le natron disponible en particulier dans le Ouadi Natroun. L’ajout de chaux permet de former des silicates, permettant la fusion du quartz à basse température. Des éléments tels que la gomme arabique, l’argile et le natron sont également nécessaires pour conférer de la plasticité au quartz. C’est par l’oxyde de cuivre, issu de la calcination et de l’oxydation du cuivre, que naît cette tonalité bleue caractéristique de l’ancienne Egypte. Le cuivre était disponible dans le Sinaï, le désert oriental ou importé de Nubie et d’Asie mineure. L’ajout de cobalt pour renforcer la couleur bleue est possible. Les ingrédients réunis sont réduits en poudre, puis soumis à une cuisson comprise entre 750°C et 850°C afin d’en mélanger les composants. Cette technique de “frittage” s’étend sur plusieurs heures voire quelques jours. L’ensemble obtenu est ensuite brusquement refroidi, puis broyé et fondu à une température comprise entre 1000 et 1200°C, opération recommencée jusqu’à obtention d’une masse vitreuse résistante de qualité suffisante. Le résultat final, comme pour l’amulette Co. 2736, peut être moulé ou taillé.

 

Cette figurine Co. 2736 est à considerer comme une amulette à l’effigie de Bès, de toute evidence destinée à assurer une forme de protection. Des objets similaires ont été retrouvés en très grand nombre en contexte domestique, funéraire ou religieux, notamment, dans les sanctuaires dédiés à Hathor. Un bel exemple d’amulette à l’effigie de Bès réalisé en faïence égyptienne, parmi des milliers d’autres, est celui conservé au Metropolitan Museum of Art de New York sous le numéro d’inventaire 26.7.878. Il est possible que la figurine Co. 2736 date du Nouvel Empire, période durant laquelle les amulettes deviennent extrêmement présentes, mais des analyses chimiques pourraient en préciser la datation. La presence de cobalt d’origine égyptienne serait l’indice d’une fabrication antérieure à la Troisième Période intermédaire, son absence une date postérieure à cette période. Celle de cobalt importé d’Iran correspondrait à une fabrication attestée seulement à partir de la XXVe dynastie. De plus, si le natron est l’unique agent fondant détecté dans la pâte, alors sa fabrication ne pourrait avoir eu lieu qu’au premier millénaire av. J.-C.

La collection égyptienne du musée Rodin possède sept autres objets à l’effigie de Bès, à savoir ceux inventories sous les numéros Co. 3090, Co. 2596, Co. 3064, Co. 3385, Co. 966, Co. 5676, Co. 5677. Il s’agit ici de la seule amulette à l’effigie de Bès de la collection.

Inscription

Anépigraphe.

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Baubo

Égypte > Provenance inconnue

Époque Hellénistique et romaine

[VOIR CHRONOLOGIE]

Terre cuite

H. 5,3 CM ; L. 6,8 CM 

Co. 6091

Comment

State of preservation

L'œuvre est en mauvais état de conservation. Elle est cassée au niveau de la tête, des coudes, du pied gauche et de la partie saillante du sein gauche.

Description

La figurine représente une femme nue, assise sur les fesses. La tête est manquante. Les jambes sont repliées, cuisses collées contre les jambes, laissant le sexe apparent. Les bras sont particulièrement longs. Ils partent des épaules, formant une ligne horizontales puis un angle droit au-dessus des genoux. Ils plongent entre les cuisses, les entourent, les mains venant saisir les fesses. Tous les doigts sont ciselés. Les zones entre les bras et le corps sont comblées. A l’endroit où était la tête sort une petite tige métallique. Entre la tête et les seins apparaît un bourrelet horizontal. Les seins sont de taille moyenne, ronds et fermes. La partie saillante du sein gauche est cassée. Le mamelon droit est figuré à l’aide d’une petite perforation peu profonde. Le volume de la poitrine est souligné à l’aide d’incision pratiquée autour des deux seins. De fines incisions ondulées entre la poitrine et le nombril représentent les bourrelets du ventre. Le nombril est incisé et est de forme triangulaire, la pointe du triangle tournée vers le bas. La zone entre le nombril et le pubis est saillante, mettant en valeur le volume du ventre. Le pubis a ses bords incisés profondément. Les parties génitales de la figurine sont représentée à l’aide d’une large et profonde incision verticale dont le sommet est arrondi. On y observe des traces noires. Les cuisses ainsi que les jambes sont larges. Le pied droit est grossièrement modelé, les orteils n’étant pas représentés. Le pied gauche est cassé. La forme générale du dos est plate. On remarque, au niveau des omoplates, une incision horizontale. Au niveau des lombaires, un léger creux a été formé à l’aide du doigt du potier. Les fesses sont rondes, séparées par une incision verticale relativement profonde. Le dessous des fesses est plat, permettant à la figurine de tenir debout.

 

La figurine Co. 6091 appartient au type de figurine féminine « baubo ». Il s’agit de figurines qui font leur à la période ptolémaïque et qui perdurent jusque pendant la période romaine. L’iconographie de ces figurines est grecque ou gréco-romaine. Les figurines de ce type retrouvées en Egypte proviennent en très grande majorité de Basse Egypte, principalement d’Alexandrie et de Naucratis ainsi que du Fayoum. Leurs contextes de découvertes sont variés, allant de casernes aux temples en passant par des ateliers. La majorité des figurines de type Baubo, réalisées au cours de la période gréco-romaine, à l’instar de la figurine Co. 6091, celles fabriquées en Egypte sont réalisés en terre cuite moulée. Mais des exemplaires de la même époque existent également en faïence égyptienne, à l’image de la figurine conservée au Metropolitan Museum of Arts sous le numéro d’inventaire 15.43.329 et en verre, à l’image des figurines conservées au British Museum sous le numéro d’inventaire 18,710612.22  retrouvées en Egypte mais de fabrication phénicienne. Ces figurines sont toutes représentées nues, toutes offrants leur sexe, jambes écartées, la position exacte des mains et des bras variant d’une figurine à l’autre. Certaines sont dépourvues de tête, d’autres peuvent chevaucher un sanglier, d’autres encore jouent de la harpe et ce type inclue également les figurines où la tête est placée au-dessus de la vulve.

 

Le nom de Baubo fait référence à la version orphique du mythe de Déméter rapportée par Clément d’Alexandrie. L’hymne raconte que la déesse, désespérée par l’enlèvement de sa fille, Perséphone, par Hadès, trouve refuge à Eleusis où elle est recueillie par Baubo. Celle-ci l’invite à boire, mais essuie un refus de la part de Déméter. Elle décide alors de soulever ses jupes, lui dévoilant ainsi ses parties génitales, faisant rire la déesse qui accepte la boisson. Ce mythe fait écho à l’hymne homérique où Iambé remplaçant Baubo parvient à dérider la déesse en lui disant des plaisanteries grossières. La découverte de figurines représentant chacune une femme dont le visage est posé juste au-dessus de la vulve datant de la fin du IVe siècle av. J.-C. dans les vestiges du temple de Déméter à Priène incita les archéologues à donner leur donner le nom de Baubo, bien que ces figurines n’immortalisent pas le geste de dévoiler ostensiblement ses parties génitales tel que rapporté dans l’hymne orphique de Déméter. Les figurines découvertes en Egypte reçurent également naturellement le nom de Baubo, leur posture rappelant plus clairement celle de Baubo dans le mythe orphique.

 

Avant d’être des représentations de corps féminins, ces figurines sont avant un geste, celui de l’anasyrma, terme grec désignant le fait de soulever ses jupes dans le but d’exposer sa vulve. Un parallèle égyptien existe selon lequel la déesse Hathor aurait également eu recours à l’anasyrma afin de sortir le dieu Rê de sa bouderie, après qu’il ait été offensé par le dieu Baba. Différents rituels égyptiens incluent ce geste à l’image des rituels hathoriques incluant des danses interprétées par les khenerout, où celles-ci exposaient leur vulve au moment culminant du rituel, ou encore lors du festival de Bubastis, durant lequel les femmes y participant dévoilaient leurs parties génitales, selon Hérodote et Diodore de Sicile. On peut également mentionner le culte du taureau Apis. En effet, durant les quarante jours auprès le choix du nouveau taureau sacré, les officiantes lui exhibaient leur vulve afin d’assurer la régénération posthume du précédent taureau décédé en le corps du nouveau choisi, assurant ainsi la transmission des attributs divins d’un animal à un autre. Ainsi, si l’anasyrma possède de toute évidence un caractère bénéfique et régénérateur en Egypte, il est à noter que les auteurs s’accordent à dire que le même geste effectué dans un contexte grec et diriger vers une personnalité masculine perd sa fonction consolatrice comme dans la légende de Baubo, et devient au contraire un geste de défiance et de honte.

 

Faut-il voir dans ces statuettes des représentations de Baubo ? La réponse n’est pas si aisée. Certains éléments peuvent effectivement renvoyer au mythe de Déméter et à la gestuelle de Baubo. Il y a tout d’abord l’exhibition de la vulve ainsi que le caractère grossier et grotesque des figurines qui fait écho à un moment précis des Mystères d’Eleusis durant lequel les initiés devaient adopter un comportement et un langage grossier. La présence occasionnelle du sanglier sous la figurine féminine pourrait éventuellement évoquer certains aspects des Mystères d’Eleusis. L’étymologie-même du nom de Baubo fait débat. Sa racine forme des termes se rapportant à divers domaines, notamment à celui du sommeil mais également au mot Baubo, qui désigne un godemiché. Cependant, on peut aussi rapprocher le nom de Baubo de celui de la déesse sumérienne Bau, vénérée également chez les Phéniciens parfois sous le nom de Baev et qui est une divinité des eaux primordiales. Le nom de Baubo est loin de faire l’unanimité parmi les chercheurs, certains proposant plutôt d’y voir une représentation d’Omphale, reine de Lydie connue pour avoir soumis Héraclès à sa volonté avant de l’épouser. En effet, des amulettes à l’effigie d’Omphale étaient répandues dans le monde romain et réputées protéger les futurs mères et leur bébé. Quoi qu’il en soit, l’intérêt de ces figurines réside vraisemblablement moins dans la figure mythique qu’elles peuvent représenter que dans le geste qu’elles immortalisent.

 

Si la vulgarité apparente de ces figurines peut faire immédiatement penser à des objets à caractère purement et uniquement érotique, il n’est pas certain qu’il faille les limiter à ce seul aspect. En effet, plusieurs représentations féminines offrant ostensiblement leur sexe à la vue de tous, écartant parfois même ses lèvres à pleines mains existent dans différentes cultures et à différentes époques. On peut citer, à titre d’exemple, la déesse indienne de la ferilité Lajja Gauri (une de ses représentations est conservée au Metropolitan Museum of Arts sous le numéro d’inventaire 2000.284.13) dont les attributs divins sont précisément symbolisés par son exhibition sexuelle. Les figurines de type Baubo découvertes en Egypte sont à remettre dans le contexte de la longue et riche évolution des figurines féminines nues d’Egypte. Dès le Moyen Empire, un certain nombre de types de figurines féminines font leur apparition en Egypte. Représentées nues, ces femmes n’ont ni la posture éhontée des Baubos ni leur apparence grosse. Elles sont au contraire longilignes et dépourvue de toute vulgarité, en dépit de leur nudité. Une autre grande catégorie est connue en Egypte, c’est celle des figurines féminines nues accompagnées d’un enfant. Dans les deux cas et peur importe leurs caractéristiques iconographiques, elles sont liées à la fertilité et possèdent des fonctions protectrices et régénératrices aussi bien pour les vivants que pour les morts. A la Basse Epoque apparaît une nouvelle catégorie de figurines, préparant l’apparition des Baubos. Il s’agit d’un type de figurine représentant la vulve, jambes écartées, prémisses des figurines de l’époque ptolémaïque. Un exemplaire est conservé au British Museum sous le numéro d’inventaire 1965,0930,954. Plusieurs auteurs s’accordent à dire qu’il est possible que les Baubos ne représentent pas des femmes naturellement corpulentes mais peut-être plutôt des femmes enceintes. D’ailleurs, selon Clément d’Alexandrie, au moment de l’exécution par Baubo de son anasyrma, il semblerait qu’elle ait eu quelque chose à l’intérieur de son vagin. Il peut s’agir d’un objet phallique ou bien d’un enfant. La possibilité d’une grossesse expliquerait la corpulence des figurines. Les Baubos sont des petits objets pour beaucoup pourvus d’un orifice au sommet du crâne permettant de les suspendre et peut-être de les porter sur soi comme des amulettes. Il semblerait donc qu’on ait affaire à des figurines garantissant la fertilité, la protection et la régénération à l’image des précédentes figurines égyptiennes connues jusqu’à lors. De telles amulettes font écho aux photographies de prostituées montrant leur vulve retrouvées dans les poches des soldats japonais tués lors de la Seconde Guerre mondiale. Dans la culture japonaise, la vulve possède un pouvoir magique certain et de telles représentations assuraient aux soldats protection et régénération dans      l’au-delà.

 

Les figurines de type Baubo sont donc à comprendre à la fois comme une étape fondamentale de la longue évolution des figurines féminines égyptiennes ainsi que comme une tradition hybride, mêlant des influences grecques évidentes, à des traditions égyptiennes et sans doute aussi des influences orientales, aux fonctions apotropaïques.

 

La figurine Co. 6090 s’inscrit dans cette tradition de la piété personnelle. De toute évidence, la tête était moulée à part et devait se ficher sur le cou en s’enfonçant sur la tige de métal. L’absence d’orifice au niveau du fessier indique l’absence d’une perforation verticale. Ainsi, la figurine n’était pas suspendue mais tenait debout par elle-même. On peut donc supposer qu’elle était déposée dans un lieu précis, peut-être un contexte domestique, funéraire ou au sein d’un sanctuaire.  

La collection égyptienne du musée Rodin possède trois autres figurines de type Baubo conservées sous les numéros d’inventaire Co. 2714, Co. 2798 et Co. 6120.

Inscription

Anépigraphe.

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