Applique de mobilier

ménade au tympanon sous un édicule

Égypte > provenance inconnue

IIe-IIIe siècle ap. J.-C. ?

H. 15 cm ; l. 3,4 cm ; ép. max. 0,5 cm

Os, métatarse de bœuf, face postérieure

Co. 2315

Comment

State of preservation

Lacunaire, la pièce présente un éclat dans son angle dextre, tandis qu’un arrachement endommage le bord senestre. L’ensemble de la surface externe est parcouru par des fissures longitudinales, qui génèrent des soulèvements et un délitement de la matière osseuse, surtout en partie inférieure. L’applique était d’ailleurs brisée en trois parties, avant sa restauration. Des petits manques de matière ont été engendrés par les cassures.

 

Le niveau d’altération du tissu osseux est important ; une desquamation s’observe tant sur la face principale que sur le revers, notamment dans la dépression créée par la cavité médullaire. La surface de l’élément de placage offre une tonalité crayeuse, alors que le dos se caractérise, au contraire, par une coloration très ambrée. Plusieurs zones du relief, notamment celles environnant les lignes de fracture, présentent une patine tirant sur le beige.

Description

Le profil légèrement courbe du bord dextre confère à l’élément de placage un dessin irrégulier, comme le sciage plus ou moins en biais des extrémités. Il s’insérait dans un décor assez plat, constitué de plusieurs appliques juxtaposées, de façon à composer une scène complexe. Un exemple de ce typologie de reliefs a été découvert lors des fouilles menées en 2002 sur l’acropole de Pergé en Turquie (Inv. K.F1 / 44.02.6 ej : ESCHBACH 2014, p. 75-76, Abb. 2 p. 77). D’autres ensembles conservés au département des Antiquités grecques, étrusques et romaines du musée du Louvre (inv. MND 1866 : MARANGOU 1976, Pl. 17a ; MICHON 1935-1937, p. 357-361, Pl.), ou appartenant au Staatliche Museum Ägyptischer Kunst de Münich (ÄS 5296 : MARANGOU 1976, Pl. 16c ; ESCHBACH 2014, n. 13 p. 78, Abb. 5 p. 79), illustrent ces vastes décors destinés à habiller de meubles de luxe. On remarquera ici, la découpe très audacieuse, se situant au milieu et sous la poitrine du personnage.

 

Le buste et le bras conservés appartenaient à une ménade progressant vers la droite, tenant au-dessus de sa tête un tympanon. Le tracé de l’arrachement du bord senestre, et ce qui subsiste du buste, invitent à penser que la jeune femme pivotait peut-être sa tête dans la direction contraire, comme cela s’observe fréquemment sur les représentations des suivantes de Dionysos. Sa position s’apparentait sans doute à celle de la ménade sculptée sur l’applique inv. 18881 du musée Benaki (MARANGOU 1976 n° 70 p. 99, pl. 23a), hormis le fait que celle-ci joue des cymbales. Notre jeune femme était vêtue d’un fin chiton, dégageant le sein gauche, ceinturé sous la poitrine. Ce schéma iconographique se retrouve en miroir sur une applique convexe du musée Rodin : Co. 2184. Une applique du Louvre, sculptée dans un métatarse de bœuf, et qui s’intégrait également dans un large panneau décoratif, offre un modèle symétrique à celui qui devait se développer sur l’ensemble auquel se rapportait la pièce du musée Rodin (inv. E 17194, département des Antiquités égyptiennes : VANDIER 1946, p. 10).

 

Notre applique a pour particularité d’inclure la représentation d’un membre du cortège dionysiaque dans un cadre architectural. En partie supérieure, se distingue encore la moitié gauche d’un fronton triangulaire, à la bordure soulignée de denticules, accueillant en son centre une coquille stylisée. Dans l’écoinçon, en guise d’acrotère, se déploient des feuilles d’acanthe, aux extrémités se terminant par des volutes. La structure était portée par des colonnes dont l’un des fûts lisses est encore discernable, derrière le bras droit de la ménade. La coquille marine incluse dans un fronton triangulaire trouve un parallèle éloquent sur un décor mettant en scène Aphrodite à sa toilette accompagnée d’Érotes, conservé anciennement dans la collection Grüneisen (cf. MARANGOU 1976, p. 40, pl. 38a ; GRÜNEISEN 1930 p. 74, pl. 22). On y reconnaît de part et d’autre des feuillages s’enroulant en volutes. Un fronton similaire, enrichi d’un fleuron, s’observe aussi sur une applique découverte dans le quartier de Rhakôtis à Alexandrie (inv. 12043, Alexandrie, musée gréco-romain, TÖRÖK 2005, n° 94 p. 149-150). Emprunté à la sculpture architecturale de l’époque hellénistique ou du début de l’époque impériale (voir BAKOWSKA-CZERNER & CZERNER 2021, fig. 5-6 p. 81-82), le motif de la conque inscrite dans un fronton pointu ou cintré, semble souvent associé à la figure d’Aphrodite. Il n’est toutefois pas exclu qu’il surmonte d’autres représentations mythologiques ou allégoriques. En témoignent une pièce du Walters Art Museum de Baltimore (inv. 71.46), sculptée d’une femme voilée d’un himation, et un fragment du cabinet des médailles de la bibliothèque nationale de France (inv. AA.IV.2-Chab 3203-bis), accueillant l’image d’une tychè. Le type d’ornementation à fronton triangulaire garni d’une coquille se maintient jusqu’au Ve-VIe siècle sur les diptyques officiels en ivoire (VOLBACH 1976, n° 3 p. 30, pl. 2 ; n° 17-22 pl. 8-9) et dans le domaine de la sculpture funéraire (STRZYGOWSKI 1904, n° 7293 p. 37).

 

L’harmonie des formes et la souplesse des lignes de la silhouette sont autant d’éléments en faveur d’une réalisation soignée confirmant un attachement aux modèles classiques, marqués par la sculpture hellénistique. Malgré un relief plutôt faible, imputable à la typologie de l’os retenu, l’artisan, par l’attention portée au modelé, a su conférer aux éléments en saillie une réelle impression de plasticité. La justesse d’observation dans les détails de la position du bras, ou l’ovale régulier du tympanon participent aussi à la qualité de facture de la pièce. Proposer une datation pour ce fragment qui s’intégrait dans une composition plus vaste constitue une gageure. Le contexte de découverte d’une partie d’un tel décor à Pergé, fournit un terminus ante quem : la fin du IVe siècle, tandis qu’une analyse des plis de drapé conduirait plutôt à un rapprochement avec des reliefs en os datés, sur la base d’une étude stylistique, du IIe - IIIe siècle. Aussi peut-on envisager un façonnage de cette applique au cours de la même période. Comparaisons : -Alexandrie, musée gréco-romain, inv. 12043 (fronton). -Athènes, musée Benaki, inv. 18881 (position). -collection Grüneisen (fronton).

Inscription

Anépigraphe.

Historic

Acquis par A. Rodin entre 1893 et 1917. Donation A. Rodin à l’État français en 1916.

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