Roi

Tête provenant d'une statue

Égypte > provenance inconnue

Les derniers temps > Époque tardive > XXXe dynastie  ?

Époque hellénistique et romaine > Ptolémées > début de l’époque ptolémaïque  ?

[voir chronologie]

Calcaire

H. 33 CM : L. 38 CM : P. 31 CM

CO. 1121

Comment

State of preservation

Cette tête de statue, sectionnée au niveau du cou, est en état de conservation moyen. Une grande partie a été restaurée : les hélix et anthélix des oreilles, le nez, la joue droite, la bouche, l’essentiel de la partie inférieure du visage, la partie droite du cou, la nuque, le pan droit, la majorité du pan gauche et la queue du némès sont des ajouts modernes. En définitive, seuls les trois-quarts gauches de l’arrière du némès, le sommet de la tête, l’uraeus, les yeux et le côté gauche du visage sont d’origine. La pierre est très érodée, notamment au niveau de l’uraeus ; elle est également constellée de plusieurs éclats.

 

Des traces de coloration ocre jaune subsistent sur les parties d’origine, notamment dans les plis du némès. Reste à déterminer s’il s’agit de traces de polychromie intentionnelles – peut-être un enduit préparatoire teinté – ou de traces laissées par la terre d’enfouissement.

Description

Cette tête de statue représente un roi coiffé du némès et de l’uraeus. Le némès est sans doute la coiffe la plus emblématique des rois de l’ancienne Égypte, porté de l’Ancien Empire à l’époque romaine. Il s’agit d’un cache-perruque fait d’une étoffe quadrangulaire empesée et rayée, qui laisse les oreilles découvertes. Il se compose de plusieurs parties : la partie principale, qui couvre le haut et l’arrière de la tête, du front à la nuque ; les parties temporales, parties latérales qui forment un pli entre la coiffe et les ailes ; le bandeau frontal, qui permet de maintenir la coiffe en place et qui comprend parfois deux excroissances qui descendent sur les tempes ; l’uraeus, placé sur le front ; les ailes, qui encadrent le visage du roi, parties qui prennent naissance en haut des parties temporales et s’évasent jusqu’aux épaules ; les retombées, qui prolongent les ailes et retombent sur la poitrine du roi ; le catogan ou la tresse, qui resserre l’arrière de la coiffe et pend dans le dos.

Le némès est plissé au moyen d’incisions qui dessinent des rayures fines et régulières et doté d’un bandeau frontal en relief. Deux excroissances, distinctes du bandeau frontal, de forme plus ou moins trapézoïdale et aux côtés légèrement incurvés, sont indiquées sur les tempes par un relief détouré par une incision. Il s’agit de la matérialisation des pattes des cheveux du roi. Le corps de l’uraeus forme un 8 simple et symétrique avant de remonter jusqu’au sommet du crâne. L’uraeus est l’un des attributs de toutes les coiffes royales. Il s’agit d’un cobra femelle qui protège le souverain égyptien. Il est le symbole de la déesse Ouadjet, divinité tutélaire de la Basse-Égypte.

Malgré les lacunes, on distingue encore la courbure délicate et peu prononcée des arcades sourcilières, finement modelées. Les sourcils sont légers et légèrement arqués, fomr inspirée de la statuaire du début du Moyen Empire. Les yeux, étroits et ouverts, remontent vers les tempes.

 

Cette tête, de grandes dimensions, est donc celle d’un pharaon. Du fait de son état très fragmentaire, il est impossible de déterminer le type de statue auquel elle appartenait. Il pourrait s’agir d’une statue debout, assise, voire même d’un sphinx.

 

Pour la même raison, il est délicat d’avancer une datation, même si la forme des yeux, celle du corps de l’uraeus et des arcades sourcilières favorisent une date tardive. On peut considérer comme plausible la fin de la Basse Époque, si l’on compare notamment avec la tête de Nectanébo Ier conservée au British Museum de Londres (EA 97 : MYŚLIWIEC, 1988, p. 50, 64, 71 (12) ; JOSEPHSON, 1997, p. 23-24 (et n. 165-167), pl. 8a ; MÁLEK, 1999, p. 159-160 (800-871-000) ; PERDU, 2012, p. 196-197, n°97). Une datation du début de l’époque ptolémaïque est néanmoins fortement probable, d’après les similitudes avec la tête attribuée à Ptolémée II, conservée au Walters Art Museum de Baltimore (inv. 22.109 : STEINDORFF, 1946, p. 48 et pl. XX, n°141 ; JOSEPHSON, 1997, p. 25 (et n. 177), pl. 8d ; MÁLEK, 1999, p. 200 (800-942-080) ; STANWICK, 2002, p. 102, p. 163, fig. 22, n°A25 ; PERDU, 2012, p. 198-199, n°98). Les quelques variations observables comme le travail du coin de l’œil ou encore la taille des rayures du némès peuvent être attribuées à la différence de matériau utilisé pour chaque statue.

 

Il existe de nombreuses similitudes entre les productions de la XXXe dynastie et de la dynastie lagide, ce qui explique les difficultés d’attribution souvent rencontrées. La tête attribuée à Nectanébo Ier et conservée au British Museum (EA 97) peut ainsi être rapprochée de la partie supérieure d’une statue royale en calcite, également présente dans la collection (EA 941 : JOSEPHSON, 1997, p. 30-31 (et n. 213), pl. 11a ; MÁLEK, 1999, p. 198 (800-940-600) ; STANWICK, 2002, p. 46-47, 102, 162, fig. 18-19, n°A23), qui a d’abord été datée du règne de Ptolémée II avant d’être rattachée à Nectanébo II (PERDU, 2012, p. 196). Quant à la tête attribuée à Ptolémée II et citée plus haut (Walters Art Museum de Baltimore, inv. 22.109), elle se démarque assez peu d’une tête conservée dans la même collection et attribuée à Nectanébo Ier (Walters Art Museum de Baltimore, inv. 22.108 : STEINDORFF, 1946, p. 48 et pl. XX, n°140 ; JOSEPHSON, 1997, p. 25 (et n. 177), pl. 8c ; MÁLEK, 1999, p. 156 (800-870-300) ; PERDU, 2012, p. 198 (inventaire fautif 20.308). Le site du Walters Art Museum date la tête de l’époque saïte).

 

Notons également que certains détails comme la forme des arcades sourcilières et le contour des yeux ne sont pas sans rappeler les productions statuaires de l’époque saïte (XXVIe dynastie ; 672-525 av. J.-C.). On constate en effet, tant pour les statues de la XXXe dynastie que pour celles du début de l’époque lagide, une forte inspiration saïte. Dans le premier cas, il s’agit pour les derniers souverains indigènes d’Égypte de s’inscrire dans un courant néo-archaïsant qui fait revivre les fastes d’une période où le pays du Nil était encore indépendant et puissant, avant la première domination perse (XXVIIe dynastie ; 525-504 av. J.-C.). Dans le second cas, le style qui sera propre à la dynastie lagide ne s’est pas encore imposé, la production artistique étant encore tributaire des tendances en vogue à la période précédente (PERDU, 2012, p. 196 et 198).

Related pieces

Le musée Rodin possède dans sa collection d’antiquités égyptiennes un modèle de sculpteur ( ?) – sous le numéro d’inventaire Co. 786 (STANWICK, 2002, p. 102, 161, fig. 15-16, n°A21) – particulièrement intéressant lorsqu’il est mis en relation avec la tête Co. 1121. Il s’agit d’un buste de souverain en plâtre en fort relief. L’œuvre peut être datée de la XXXe dynastie – règne de Nectanébo II ? – ou du début de l’époque lagide – règne de Ptolémée II ? –, soit la même période que notre œuvre. Malgré la différence d’échelle, les similitudes entre les deux objets sont frappantes. Si l’on ne peut affirmer avec certitude que le buste Co. 786 a servi de modèle à la tête Co. 1121, ni même qu’il s’agit du même souverain, il est plaisant d’imaginer qu’un modèle de sculpteur similaire a pu servir à la réalisation de la tête royale en calcaire.

Inscription

Anépigraphe. 

Historic

Acquise par Rodin auprès de l'antiquaire Oxan Aslanian le 5 août 1911.

BOREUX 1913 : Hôtel Biron, 72, "Tête royale en calcaire, coiffée de la nemsit. Tête de sphinx. Epoque saïte ? Tout le bas est refait. Haut. 33 cent. Larg. 38. Estimée cinq cent francs."

Donation Rodin à l’État français 1916

Historic comment

La tête fut exposée à l’hôtel Biron, parmi les chefs-d’œuvre de la collection égyptienne, là où Charles Boreux la décrivit à l’été 1913 dans l’inventaire qu’il fit en vue de la donation à l’État français.

Elle y fut photographiée par Eugène Druet entre 1913 et avril 1914, à côté d'une oeuvre de Rodin, le buste de la Duchesse de Choiseul dont la chevelure émergeant du marbre n'est pas sans évoquer la coiffure du roi égyptien (musée Rodin, Ph.06031).

 

 

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