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Femme sur un lit en calcaire

Egypte > provenance exacte inconnue

Nouvel Empire à XXIe dynastie, probablement

[voir chronologie]

Calcaire

H. 8,1 CM , L. 4,2  CM ; P. 3,4 CM

Co. 5842

Commentaire

Etat de conservation

L'œuvre est en mauvais état de conservation. La figurine est cassée au revers, sur l’angle supérieur gauche ainsi qu’à la base des pieds. La surface antérieure est empoussiérée et noircie. La surface postérieure, concave, est mieux préservée. 

Description

Cette figure féminine nue inédite appartient au type particulier de femme allongée sur un lit. La tête, carrée, est ornée d’une perruque mi longue encadrant le visage et recouvrant les oreilles. Une incision horizontale entre la base des cheveux et les yeux correspondrait à un bandeau, ou plus probablement à l’indication de la chevelure naturelle apparaissant sous la perruque, expression de la féminité dans la statuaire depuis l’Ancien Empire. Taillé dans un éclat de calcaire et fruit d’un atelier local, l’exécution rudimentaire de cette figurine lui confère un caractère d’intimité saisissante. Les traits du visage sont grossièrement dessinés. Deux petits trous marquent les yeux et deux traits verticaux, particulièrement sommaires, se rapprochent vers le front pour indiquer la présence du nez. Le travail d’exécution du visage semble inachevé, volontairement ; le sculpteur n’a figuré ni la bouche, masquée sous le travail préparatoire du nez, ni dégrossi le cou. Le visage de la femme n’est pas mis en valeur et l’importance du corps est reportée sur le tronc et les membres inférieurs. Les seins, volumineux, sont  ronds mais plats et la partie saillante est émoussée. L’incision du nombril épouse la forme d’un triangle. Le triangle pubien n’est pas très marqué. Les jambes sont grossièrement ciselées et se terminent par une cassure récente au niveau des pieds, en particulier le pied gauche. Les bras pendent le long du corps, atteignant le haut des cuisses mais ni les mains ni les doigts n’ont été matérialisés. Les pieds reposent sur une base assez volumineuse, mieux conservée sur la partie droite de l’objet, et totalement disparue à gauche. Perpendiculaire à la surface et arrondie vers le haut, cette base est, selon toute vraisemblance, la représentation d’un lit. La surface inférieure de la base du lit n’ayant reçu aucune finition, la figurine doit rester couchée et ne peut tenir debout, à l’instar de certaines figurines de femmes nues en calcaire représentées debout, les bras le long du corps, avec les jambes volontairement tronquées sous les genoux (voir Londres, Petrie, Museum of Archaeology, University College, Moyen Empire  UC 59313. Aucune parure, aucun vêtement ni aucun ornement n’apparaît sur la figurine. Aucune trace de polychromie n’est visible sur le corps. La figurine est légèrement voûtée vers la droite et il est à noter que toute la partie droite du relief est très nettement plus saillante que la gauche. Il s’agit peut-être d’une astuce du graveur pour s’adapter à la forme d’origine du morceau de calcaire, irrégulière. Cette figurine, d’aspect fruste, suit des principes de représentation assez similaires à trois autres exemples également réalisés en calcaire. Le premier est conservé au musée de Louvre (Inv. N° E 14994), où la collection d’objets de type « concubines » est particulièrement conséquente (nous remercions Catherine Bridonneau et Vincent Rondot pour leur accueil). Sur cette figurine inédite qui provient de Tanis, la forme de la tête est carrée, le corps est décalé vers la droite, et les mains sont inapparentes. Les deux autres exemples ont été retrouvés sur les sols des unités d’habitation de la forteresse de Tell el-Herr (Nord-Sinaï), donc dans des niveaux bien plus tardifs (MARCHI 2014, p. 97 et fig. 135 a et b). Les principes rudimentaires d’exécution du corps de la femme sont identiques à ceux des figurines Musée Rodin Co. 5842 et Musée du Louvre E 14994.

Attribuables à des inclusions dans la pierre, la surface sur laquelle repose le corps laisse apparaître des traces ocre à deux endroits. Sur la partie droite du lit, elles sont visibles au niveau du ventre et du haut de la cuisse gauche de la femme. Sur la partie gauche, elles sont visibles au niveau du mollet droit de la femme.

 

La figurine s’apparente au type 6b établi par Géraldine Pinch. Il s’agit de figurines féminines datant du Nouvel Empire, attestées dès fin de la XVIIIdynastie et produites durant tout la période ramesside. Elles ont été retrouvées principalement en contexte funéraire et domestique mais également en contexte religieux dans les sanctuaires dédiés à la déesse Hathor à Mirgissa et au Serabit el-Khadim. Les figurines du type 6b de Pinch ont principalement été retrouvées en contexte funéraire et domestique et sont toutes couchées sur des lits. Contrairement au type 6a, et à l’instar du type 6c, elles sont fixées au lit sur lequel elles reposent. Les figurines représentant des femmes nues sont connues en Egypte depuis l’époque Prédynastique, leurs caractéristiques ayant évolué jusqu’à l’époque gréco-romaine, réparties sur l’ensemble du territoire égyptien, y compris le Sinaï, ainsi que la Nubie (Mirgissa) et la Palestine (Deir el-Balah). Pendant longtemps, ces figurines féminines étaient étroitement associées à la sexualité masculine, exclusivement. Leur présence dans les tombes semblait tout naturellement indiquer qu’elles avaient pour rôle de revivifier le défunt et donc de renaître dans l’au-delà, à l’image d’une Isis revivifiant Osiris et qui, en s’unissant à lui, permettait à son époux défunt de se régénérer en la personne de leur fils Horus. Les figurines féminines ayant un rôle similaire à jouer vis-à-vis du défunt, ceci explique  l’importance de leur nudité et l’insistance sur leurs attributs sexuels. Les figurines ont ainsi été considérées pendant longtemps comme étant de simples « concubines du mort ». Néanmoins, la découverte de ces figurines dans des tombes de femmes ainsi qu’en contexte domestique et au cœur de sanctuaires impose de nuancer cette théorie. Le type 6 établi par Pinch, inclue exclusivement des figurines reposant sur des lits. Ainsi, il semblerait que la sexualité ne soit pas l’unique aspect mis en valeur mais également la fertilité et la maternité. Elles ont, en effet, toutes été retrouvées dans des sanctuaires dédiés à la déesse Hathor. Etroitement associées à Hathor, toutes ne sont pas des images de la déesse elle-même. Si certains types de figurines, y compris le type 6 de Pinch, peut présenter des similitudes avec les attributs de la déesse, notamment en ce qui concerne la forme de la perruque, l’évolution des coiffures des figurines semble davantage refléter l’évolution de la mode féminine que la volonté de représenter la déesse. Hathor est la déesse de la féminité, de la fertilité, de la fécondité, de l’amour ainsi que la protectrice des défunts. Son culte, particulièrement important au cours de l’Ancien et du Moyen Empire, inclut différentes institutions religieuses regroupant des officiantes, particulièrement actives lors des rites liées à la naissance et à la mort. La plupart des figurines féminines datant du Moyen Empire et de la Deuxième Période Intermédiaire représentent, selon toute vraisemblance, certaines de ces officiantes dédiées à la déesse. Leur présence dans des maisons, des tombes et des temples permettait de perpétuer les rituels hathoriques exercés par ces prêtresses. Ces figurines féminines étaient donc fort probablement des catalyseurs utilisés lors de rituels hathoriques et offerts à  la déesse afin qu’elle facilite la fécondité et la naissance, qu’elle protège les enfants ainsi que les défunts, leur permettant de renaître dans l’au-delà. Ces figurines étaient ensuite déposées en différents contextes en fonction des vœux, d’où leur présence dans des maisons, des temples et des tombes.

La figurine Co. 5842 est donc un exemple de ces figurines féminines, telles qu’elles étaient fabriquées au cours du Nouvel Empire, témoignage d’objets relevant du domaine de la piété personnelle. Le pouvoir de ces figurines féminines, en l’occurrence ici un très haut relief, semble volontairement neutralisé (pas de pieds, de main, d’oreille, de bouche ni d’yeux). Toute l’importance de cet objet réside dans les caractéristiques féminines du personnage, une dame élégante (perruque) parée de toutes les qualités pour porter la vie (seins, ventre, pubis, hanches arrondies). 

Aucune autre des figurines féminines de la collection n’appartient à ce type.

La plupart des figurines de ce type sont réalisées en calcaire, peint ou non. Cependant, certaines sont réalisées en terre-cuite ou en faïence comme la figurine provenant de Serabit el-Khadim présentée dans PINCH, 1993, pl.51.D. 

D’autres figurines similaires à la Co. 5842 ont été mises au jour à Mirgissa et datent de la XVIIIdynastie (voir THOMAS, 1981, pl.54.) Un des rares exemples de ce type de figurine retrouvé dans un temple a été mis au jour au sanctuaire d’Hathor à Mirgissa (voir VERCOUTTER, 1970, p.350).

Inscription

Anépigraphe.

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