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Ithyphallique

Égypte > Provenance inconnue

Basse Époque

[VOIR CHRONOLOGIE]

Calcaire 

H. 7,5 CM ; L. 3,5  CM ; P. 3,8 CM

Co. 2510

Commentaire

Etat de conservation

L'œuvre est en bon état de conservation. 

Description

Il s’agit de la représentation d’un personnage nu, enlaçant un phallus disproportionné. Le membre, dressé, est parallèle au corps du personnage ; il est deux fois plus grand que lui. Le personnage est assis sur une base, les jambes repliées. Le pied gauche est cassé et semblait se situer sous le phallus, collé au pied droit. Les orteils de ce pied sont irrégulièrement dessinés et maladroitement collés à la jambe droite. Les deux bras, qui étreignent le membre viril, sont eux aussi légèrement repliés, avec les deux mains posées sur le sexe au niveau de la tête du personnage. Un gros éclat mutile le bras gauche, de l’épaule jusqu’au coude. Sa tête, qui semble soutenir son membre, est tournée vers la gauche. Le crâne, chauve, est allongé et particulièrement plat au sommet ; l’oreille gauche très légèrement saillante, flanquée de deux traits verticaux de couleur ocre. Les traits du visage sont frustres et émoussés, ne laissant apparaître que deux trous au niveau des yeux ainsi que deux autres trous en direction du menton, figurant peut-être les commissures des lèvres. Le phallus, représenté conforme à l’anatomie humaine, est parcouru de fissures peu profondes sur sa face externe dans le sens de la longueur. On remarque l’absence de testicules, le membre dressé occupant tout l’espace. Des traces de polychromie ocre sont conservées à plusieurs endroits, dans les plis et creux de la figurine (en particulier oreille gauche, globes oculaires, orifice du sommet du phallus, sillons délimitant le gland et le sillon inter-fessier). Ces mêmes pigments ocre se retrouvent de façon irrégulière sur la partie droite du dos.

La figurine Co. 2510 appartient aux figurines ithyphalliques que l’on trouve en Egypte tout au long de la période pharaonique. Les matériaux utilisés sont généralement le bois, la pierre, la terre cuite et parfois la faïence. Les plus anciennes figurines ithyphalliques en calcaire retrouvées à ce jour sont datées de l’Ancien Empire, notamment celles déposées dans le temple de Satet à Assouan. Les sites où furent mis au jour ces figurines sont très souvent associés à des sanctuaires, à l’instar de Deir el-Bahari, Mirgissa, Timna ou le Gebel Zeit. L’essentiel du corpus provient de la période gréco-romaine, époque où leur production s’intensifia. Longtemps mis à l’écart par la communauté savante en raison de leur caractère obscène apparent, ce matériel suscite encore toute une série de questions. Le sexe masculin est un élément bien connu de l’iconographie égyptienne. C’est un des attributs et caractéristiques principaux de nombreuses divinités telles qu’Osiris, Baba, Min, Amon-Rê ou encore Bès. Le phallus d’Osiris joue un rôle crucial dans la version du mythe rapporté par Plutarque qui indique que le dieu, martyrisé par son frère Seth, fut découpé en quatorze morceaux dispersés dans les eaux fluviales, rassemblés ensuite par sa sœur et épouse Isis afin de reconstituer le corps de son époux. Dans ce récit, l’unique morceau qu’elle ne put retrouver était le phallus d’Osiris, avalé par le poisson oxhyrinque. Utilisant la magie, la déesse parvint à le reconstituer pour permettre la conception de leur fils, Horus. Osiris est une divinité fortement liée à la fertilité du monde végétal. On attribue la crue du Nil à l’écoulement des lymphes, ou rejdouou, du cadavre du dieu. Parmi les Mystères d’Osiris, célébrés au mois de Khoiak, on peut mentionner les « osiris végétant », figurines faites de boue dans lesquelles on faisait germer des plantes, symbolisant la gestation et renaissance du dieu. Osiris est une divinité masculine de la fertilité et de la terre. La terre est d’ailleurs un élément masculin dans l’univers égyptien, incarné par le dieu Geb. Min est une autre divinité masculine vouée au maintien de la fertilité. Très ancienne divinité représentée quasi systématiquement de façon momiforme, il arbore invariablement un phallus en érection. Le dieu babouin Baba, dont l’aspect phallique est mis en valeur dès la rédaction des Textes des Pyramides, est également le garant de la fertilité humaine et animale. Bès, le nain d’aspect grotesque est également une personnalité divine étroitement liée à la fertilité sous toutes ses formes. A cette courte liste, on pourrait ajouter les noms d’autres dieux tels qu’Amon-Rê ou Rê. Procréation et  naissance étant autant l’apanage des divinités masculines que féminines, il est tentant d’associer ce type de figurines masculines épanouies et prêtes à donner la vie à  celles des figurines féminines appelées à tort « concubines du mort », prêtes à la recevoir. On remarque que certaines des divinités représentées ithyphalliques comme Min ou encore Bès sont étroitement associées à Hathor, déesse, entre autre, de la fertilité et de la fécondité. Ainsi, Min de Koptos est-il adoré en partenariat avec Hathor au Gebel Zeit, par exemple. Ce duo divin personnifie le pouvoir créateur par l’association des éléments masculins et féminins. G. Pinch évoque l’hypothèse qu’il était possible d’offrir des offrandes similaires à l’une comme à l’autre divinité (PINCH 1986, p. 239). Bès, qui est également associé à Hathor sans pour autant en être son égal à l’instar de Min, reçoit de toute évidence des figurines ithyphalliques en offrandes et ce dès l’époque ptolémaïque au moins, notamment dans ses sanctuaires à Saqqarah. Hathor, dont uns des noms est « La Dame de la Vulve », est célébrée lors des festivals ayant lieu à Edfou. Au cours de l’un deux, elle est présentée avec le phallus de Rê-Atum. Selon la cosmogonie égyptienne, c’est en effet par la masturbation que le démiurge engendra les autres divinités. Hathor est parfois identifié à la main du dieu qui a permis la masturbation créatrice ou même à son sperme. L’offrande de phallus votifs à la déesse en cette occasion permettait peut-être donc de revivre cette union originelle. L’exhibition du sexe masculin était peut-être aussi l’équivalent de l’anasyrma, ce geste consistant à dévoiler son sexe, et qu’Hathor avait exécuté afin de sortir le dieu Rê de sa bouderie. Le phallus, symbole évident de fertilité, peut faire office d’offrandes à plusieurs divinités, notamment à Hathor et ils ont été retrouvés en nombre conséquent dans des sanctuaires dédiés à Hathor, notamment à Deir el-Bahari. Pour autant, la vocation exacte de ce type d’objet reste quelque peu vague. Un seul phallus inscrit est connu à ce jour, dédié par le scribe Ramose à Hathor. Il date du Nouvel Empire et a été retrouvé à Deir el-Medineh. L’inscription est difficile à interpréter, s’agit-il d’une supplication pour avoir des enfants ou bien pour être régénéré au sein du temple ? Un autre phallus en stéatite, de provenance inconnue, porte le cartouche de Thoutmosis III (Conservé au musée national d’histoire et d’art du Luxembourg (Inv. N° 2012-025/0004. Il est d’une longueur de 10,65 cm et d’un diamètre de 1, 95 cm. En contexte égyptien, le phallus humain est non seulement associé à la fertilité humaine mais également aux mondes végétal et animal. La figurine Co. 2510 est donc à considérer soit comme un objet apotropaïque, soit comme un objet rituel destiné à favoriser l’union de la déesse Hathor au principe masculine et permettant ainsi la régénération permanente des éléments.

La figurine Co. 2510 s'inscrit dans cette longue tradition égyptienne des erotica. Comme ce n’est pas seulement un phallus qui est représenté, mais un personnage tout entier, il s’agirait plutôt d’un ex-voto qu’un objet rituel. On observe que le personnage, outre qu’il est dépourvu de vêtement et de bijoux, est également dépourvu d’autres attributs particuliers. Cette constante sur ce type de figurines, associée aux traits peu marqués du visage indique, selon Christine Hue-Arcé, la volonté d’évoquer l’aspect d’un singe. L’allongement du visage associé au crâne plat de la figurine Co. 2510 sembleraient aller dans le sens proposé par Ch. Hue-Arcé. Le singe possédait en Egypte ancienne une forte connotation érotique et c’est sous ces traits que sont représentés beaucoup d’hommes dans de nombreux graffiti érotiques. L’animal n’est pas seulement lié à l’érotisme, mais également à la déesse Hathor dont le Mythe de la déesse lointaine rappelle qu’elle fut apaisée grâce au son de la harpe produit par un singe. Les caractéristiques de la figurine Co.2510 rappellent les erotica retrouvés à Naucratis, à l’instar de ceux conservés au British Museum sous les numéros 2011. 5011.13 , 90337 , 1965,0930.933  ainsi que celui conservé au Petrie Museum sous le numéro d’inventaire UC35949 .

 

La collection du musée Rodin possède deux autres figurines ithyphalliques conservées sous les numéros d’inventaires Co. 2518 et Co. 2358.

Inscription

Anépigraphe.

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