Egypte > provenance inconnue
Nouvel Empire
H. 13,7 CM ; L. 21,5 CM ; P. 2,5 CM
Calcaire polychromé
Co. 3184
Egypte > provenance inconnue
Nouvel Empire
H. 13,7 CM ; L. 21,5 CM ; P. 2,5 CM
Calcaire polychromé
Co. 3184
L’œuvre est en bon état de conservation. On constate cependant des traces de moisissures et une mauvaise adhérence de la polychromie. La pierre est également légèrement pulvérulente à certains endroits. On note aussi la présence d’un important éclat dans l’angle inférieur droit ainsi que d’une cassure courant le long de la tranche du dessous.
Sur ce fragment de bas-relief en calcaire ocré, six cobras tournés vers la gauche sont dressés. En position défensive, ils gonflent leurs capuchons. Les silhouettes de deux autres cobras se devinent, à l’extrême gauche et l’extrême droite de la frise. Chaque cobra arbore un disque solaire sur sa tête. Ils s’appuient sur une base horizontale qui masque le bas de leur corps, vraisemblablement étendu derrière eux. On observe la présence d’une ligne horizontale au-dessus des disques solaires ; deux bordures encadreraient ainsi la rangée de reptiles.
Aucune tranche de ce fragment n’est d’origine. Toutes sont cassées et on observe des traces d’outils sur le chant inférieur, témoins d’une reprise ultérieure du fragment. Des traces de râpe sont également visibles au revers, totalement aplani. De plus, de nombreux restes d’un mortier ainsi que d’un enduit blanc sont encore présents sur la face du relief. À cela s’ajoutent des traces de polychromie à savoir du bleu égyptien clair et foncé, de l’ocre rouge et jaune et des pigments blancs. Pigments bleus et jaunes s’observent dans le fond, l’ocre au niveau du corps des cobras et des disques solaires ainsi que le blanc. On retrouve également des traces d’enduit et de pigments blancs au niveau de la base. Aucune trace de repeint n’est observée sur le relief. L’ancien numéro d’inventaire est DRE 264. La qualité de la gravure est bonne. On note un effort supplémentaire fourni pour la réalisation des yeux et des têtes tandis que les corps présentent moins de détails.
Le serpent générait chez les Egyptiens des sentiments mêlés mais toujours passionnés (voir SAUNERON, 1989, p. 137-215) comme l’illustrent les nombreux textes, notamment le papyrus du Brooklyn Museum de nature médicale, religieuse et littéraire. L’image de serpents était utilisée dans l’écriture, tel que le son f (voir HANSEN, 2001, p.296-299). En réalité, deux espèces de cobras sont originaires d’Egypte. Il s’agit d’une part du cobra égyptien (dont le nom savant est naja haje), qui semble avoir été le modèle des représentations de l’uræus et le cobra du désert (dont le nom savant est Walterinnesia aegyptia).
L’uræus, forme latinisée du grec ouraios, traduisant l’égyptien ỉ'rt et qui signifie « celle qui est élevée » est un cobra femelle, personnifiant l’œil brûlant de Rê. La tradition relate que l’œil de Rê découvrit, au retour d’une mission, que le dieu Rê l’avait remplacé. Afin d’apaiser sa colère, Rê le transforma en cobra et le plaça sur son front, avec pour consigne de cracher « la flamme de son venin » sur ses ennemis (voir JOHNSON, 1990, p.5). La plupart des dieux imitèrent rapidement l’exemple de Rê, se protégeant à leur tour par un uraeus. Cette représentation de cobra protecteur se retrouve sur les couronnes royales, ainsi que sur une multitude d’autres objets et monuments. L’uraeus peut parfois présenter une tête de femme, de lionne ou de vache et être pourvue d’ailes ouvertes et peut être coiffé de la couronne rouge, blanche, du pschent ou du disque solaire comme c’est le cas sur le relief Co. 3184. La déesse uræus Ouadjet, déesse de Bouto et maîtresse de la Basse-Égypte est associée à Nekhbet, déesse vautour de Nekhen ou Hiérakonpolis et maîtresse de la Haute-Égypte. Les deux déesses formaient ainsi le double uræus protecteur des couronnes royales et étaient reconnues sous le nom de nbty « les Deux Maîtresses », titre faisant partie de la titulature pharaonique. Il arrive que le vautour soit complètement assimilé au cobra, notamment dans les représentations du double uræus entourant le disque solaire.
Les différents noms associés à l’uræus illustrent la nature du cobra, parmi lesquels nsrt qui désigne la flamme de l’uræus, wsrt « la Puissante », mnḥy.t « celle qui est lovée », ḥry.t-tp « celle qui est sur la tête », wr.t-ḥḳȝw « Grande de la magie », ce dernier nom étant l’épithète des couronnes, des déesses ainsi que de l’uræus. L’uræus, en tant que cobra dressé, se retrouve également dans les inscriptions en tant que déterminatif du nom de déesses.
De toute évidence, le fragment Co. 3184 était intégré dans une composition plus large, provenant d’un monument (un sanctuaire le plus probablement) au sommet duquel la fonction de ces uræus était de repousser tout ennemi. Le style de ce type d’élément architectural n’a que très peu évolué au cours de la période classique. Le bas-relief Co. 3184 évoque cependant le Nouvel Empire.
Le musée Rodin conserve un autre élément provenant vraisemblablement d’une frise monumentale d’uraeus, le Co. 2310, réalisé en faïence bleue.
Anépigraphe.
Acquis par Rodin entre 1893 et 1913.
BOREUX 1913 : Hôtel Biron, 264, "Frise composée de 6 ureus sculptés en demi relief et peints en rouge, jaune et bleu. Elle formait sans doute le couronnement d’une stèle. Époque thébaine. Calcaire. 21 cent. x 13 cent. Estimé dix francs."
Donation Rodin à l'État français 1916.