Applique de mobilier

Néréide

Égypte > provenance inconnue

IVe - Ve siècle ap. J.-C.

H. 3,9 cm ; L. 9,6 cm ; P. max. 1,6 cm

Os, humérus ou fémur de bœuf

Co. 2189

Commentaire

Etat de conservation

La pièce, à la teinte beige clair, est lacunaire, brisée sur deux de ses angles et en partie inférieure. Si un léger fendillement s’observe sur sa face principale, des fissures longitudinales barrent le revers. Des taches brunes doublées de fines concrétions maculent le dos, se concentrant surtout sur le côté dextre. Des marques noires recouvrent les parties les plus en saillie du relief.

Description

Le thiase marin, au défilé duquel participent les Néréides, est fréquemment illustré sur les appliques en os tardo-antiques, mises au jour en Égypte. Les filles de Nérée évoluent dans un monde aquatique, généralement escortées par des Tritons, ou chevauchant des animaux hybrides. Sur cette applique, la nymphe apparaît seule, glissant sur les flots, vers la gauche. Ses bras placés en avant paraissent tenir un objet, en parti disparu. Son voile ou péplos, qui gonfle sous l’emprise du vent, entoure sa tête d’une large ellipse, animée de plis profondément creusés. L’étoffe se déploie également le long des jambes, en plusieurs pans soulevés par la brise marine. Un second voile, qui décrit un arc-de-cercle, doté de plis sculpturaux, occupe l’espace près du bord dextre. Il faut sans doute y reconnaître le péplos d’une autre Néréide, enflé par le vent. Cette figure était sans doute sculptée sur une pièce placée dans le prolongement de la nôtre, le tout formant une frise complète.

 

La Néréide nageant vers la gauche rencontre plusieurs équivalences au sein du corpus des appliques de mobilier en os. L’exemplaire du département des Antiquités égyptiennes du musée du Louvre (AF 6302 : LE POGAM, MAURICE-CHABARD & PERROT 2017, notice 125 p. 126), offre une silhouette à l’attitude très proche, hormis le fait que la nymphe s’agrippe au poitrail d’un cheval marin. La pose rappelle aussi de façon générale la composition de l’applique 18745 du musée Benaki (MARANGOU 1976, n° 167 p. 117, pl. 49c). Le buste de la créature marine, qui porte une coupe à hauteur du visage, est davantage relevé que sur la pièce du musée Rodin. Le battement des jambes de notre naïade renvoie également à celui visible sur deux fragments du musée Rodin (Co. 2197 et Co. 2220), même s’il semble beaucoup moins énergique. Sur un spécimen de la collection d’E. von Sieglin conservée à Dresde (PAGENSTECHER 1913, n° 4 p. 233, pl. LVII-4), on repère une Néréide allongée, qui se dirige dans la direction opposée à la nôtre. Ce schéma iconographique répond donc à un modèle fréquemment exploité par les artisans, introduisant des variantes et exprimant leur tempérament artistique par des styles différents.

 

L’intérêt pour le volume se lit dans le corps solidement structuré et la plasticité accentuée des drapés, dans lequel vient s’engouffrer le vent. Par ses gestes vigoureux, l’artisan est parvenu à insuffler un dynamisme à la scène. Le travail heurté de la matière à l’arrière-plan contraste avec la rotondité du visage, à l’œil suggéré en léger relief, et le poli des chairs du ventre et de la jambe droite. La jeune nymphe à la tête inclinée, semble tenir un objet contre sa poitrine, à moins que celle-ci n’ait pas été dégrossie. La maîtrise du mouvement et le naturel de l’attitude sont les signes d’une facture assez personnelle, qui fait sienne également un certain degré d’inachèvement. Ces critères permettent d’envisager une datation au cours du IVe siècle ou du Ve siècle.

 

Comparaisons

-Athènes, musée Benaki, 18745.

-Dresde, Albertinum Museum, ancienne collection Herold (PAGENSTECHER 1913, pl. LVII-4 : contrepartie).

-Paris, musée Rodin, Co. 2197, Co. 2200 (position des jambes).

-Paris, musée du Louvre, DAE, AF 6302.

Historique

Acquis par A. Rodin entre 1893 et 1917. Donation A. Rodin à l’État français en 1916.

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