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Tête d'homme

"Grotesque" pathologique

ÉGYPTE > PROVENANCE INCONNUE

Époque ptolémaïque

[VOIR CHRONOLOGIE]

TERRE CUITE 
CO. 2462

Comment

State of preservation

Etat fragmentaire. Seule la tête est conservée. L’oreille gauche a été arrachée.

Description

L’homme a la tête penchée et tournée vers la gauche. Il est chauve et imberbe. Son haut front est marqué de rides d'expressions. Il a les arcades sourcilières épaisses et les yeux enfoncés dans leurs orbites. Les coins des yeux sont marqués de pattes d'oie. Il a les pommettes hautes, les joues creuses, le nez épaté mais écrasé dans le moule. Sa bouche est grande ouverte. Son oreille droite est hypertrophiée.

Cette figurine, relevant d’un ensemble de représentations regroupées sous l’appellation générique de « grotesques », s’inscrit sans doute dans une catégorie plus spécifique, celle des cas pathologiques. Ce terme désigne une série de motifs très populaires à l'époque hellénistique ayant en commun la représentation de figures grimaçantes et contorsionnées à l'aspect disgracieux. Ce terme est employé pour désigner les figurines de plusieurs ensembles iconographiques : les caricatures de certaines catégories sociales comme les prêtres ou les nourrices ; les représentations dites « réalistes », que l'on peut rapprocher des « sujets de genre », qui comprennent également les représentations ethniques ; enfin, les cas pathologiques, comme la figurine Co. 2462 – la qualité de la réalisation de beaucoup de ces objets permettent d'ailleurs de reconnaître des maladies et des handicaps : hydrocéphalie, lordoses, gibbosités, etc…

Les contextes de découverte des « grotesques » sont généralement mal connus, à quelques exceptions près. Outre l’exemple cultuel fourni en Egypte par le sanctuaire de Ras el-Soda, des contextes funéraires sont attestés à Myrina et des contextes domestiques à Priène. La diversité apparente des contextes d’utilisation, conduit à une interprétation difficile de la fonction. Les traductions ponctuelles des « grotesques » en métal et en ivoire montrent que ces effigies devaient avoir une certaine importance, ou du moins que leurs propriétaires devaient être parfois d'un certain niveau social. Les ateliers de Smyrne en particulier sont réputés pour leur importante production de « grotesques » pathologiques, dont la production a été autrefois reliée à la présence d’écoles de médecine dans la cité. Ces types auraient alors eu une fonction médicale de documentation. En l’absence de texte antique confirmant cette hypothèse, celle-ci n’est pas toujours retenue par la communauté scientifique (Hasselin & Laugier 2009, p. 172 ; Jeammet & Ballet 2011, p. 73).

Hans Peter Laubscher suggérait en 1982 qu'il s'agisse d'accessoires de table. Suivant l'idée que le rire exorcise et protège, ces objets qui représentent certaines catégories de la société (l’handicapé, l’indigent, l’esclave, etc..) faisaient l'objet de moqueries à charge sociale. Les attitudes contournées de certaines figures permettraient d'ailleurs de contrer le mauvais œil. Etant donné l’axe de la tête Co. 2462, il est probable que la figure adoptait une pose similaire. En dehors de la tombe et du temple, ces personnages auraient donc été le sujet de plaisanteries, mais aussi de méditations pendant les banquets. Certains « grotesques », dont des exemplaires de la collection d’Auguste Rodin comme la figure Co. 2505 ou la tête Co. 2538, arborent des couronnes et des colliers de fleurs, dont la connotation festive dénote leur lien avec le banquet.

Luca Giuliani, en regard d'un texte d'Athénée (IV, 128 cff), propose un niveau de lecture additionnel à l’hypothèse de Laubscher : plus que de simples représentations pour la table, l'infirme, l’esclave ou la vieille auraient été véritablement présents lors des festivités afin de distraire l'assemblée de bourgeois. Les « grotesques festifs » peuvent alors être identifiés comme des grulloi (bouffons dansants, souvent atteints de nanisme) ou des gelotopoioi (personnes risibles par leur attitude). Ces figurines et leurs modèles qui prêtaient à rire à ces occasions, auraient constitué, pour les classes aisées et fortunées, la garantie par contraste de leur propre bien-être et de leur intégrité physique, voire de leur intégrité mentale (Jeammet & Ballet 2011, p. 74-75).

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