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Soldat macédonien

Caricature ou acteur

ÉGYPTE > PROVENANCE INCONNUE
Époque Ptolémaïque
[VOIR CHRONOLOGIE]
TERRE CUITE 
 H : 9,5 cm ; L : 3,3 cm ; P : 3 cm
CO. 2748

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Description

Cette figurine représente un personnage masculin debout. Il est trapu et vêtu d'une tunique plissée qui descend jusqu'aux genoux et d'un gilet boutonné sur un ventre proéminent. Ses deux mains sont posées sur son ventre et tiennent chacune un attribut indiscernable. Il est coiffé d'une kausia, un béret militaire macédonien plat et à rebord saillants. Le visage est joufflu. Le front bas surmonte des arcades sourcilières en arc de cercle. Les yeux sont petits et enfoncés entre d’épaisses paupières. Le nez est épaté et les lèvres courtes mais lippues. Le revers de la statuette n'est pas détaillé à l'exception du rebord de la kausia.

La figurine Co. 2748 observe le même type qu’une autre œuvre de la collection d’Auguste Rodin, la figurine Co. 5637. Leur aspect très trapu et leur ventre bedonnant incitent à les interpréter comme des caricatures. Les représentations caricaturales sont généralement regroupées avec la catégorie générique des « grotesques », désignant un ensemble de motifs très populaires à l'époque hellénistique, ayant en commun la représentation de figures disgracieuses à l’allure plus ou moins ridicule. Ces figures ont été conçues en Grèce où elles dérivent des sujets théâtraux, apparus au Ve siècle av. J.-C. : les acteurs sont alors représentés dans leur rôle, caricaturaux, avec leur masque, un ventre postiche et un phallus postiche lorsque le rôle l'impose. Petit à petit, la représentation de l’individu en tant que tel vient se substituer à l’acteur qui l’incarne. Ainsi, les attributs de l’acteur intègrent l’iconographie : les visages congestionnés se substituent au masque et le ventre postiche est conservé sous la forme d’une bedaine, comme chez Co. 2748 et Co. 5637. Une figurine similaire, conservée au British Museum, est d’ailleurs identifiée comme un acteur par Donald M. Bailey en 2008 (Bailey 2008, cat. 3556, p. 135-136). Jutta Fischer, qui publie quelques figurines du même type (Fischer 1994, Nr 196-222, pl. 17-18), les désigne directement comme Macédoniens, démontrant qu’il n’est pas aisé d’établir une distinction claire entre représentations théâtrales, donc d’un rôle fictif, et représentations « réelles » d’un individu ou d’une catégorie d’individu, d’autant plus lorsque celles-ci entrent dans le champ de la caricature.

Les caricatures constituent des représentations à charge sociale et des effigies de l'altérité. Ces dernières sont diverses : le pauvre, l'esclave contre le notable ; le malade contre le bienportant ; l'étranger ou le barbare contre le Grec ou l'Egyptien. Ce dernier sujet peut être illustré par la tête Co. 2730, caricature de soldat macédonien. Même s’il s’agit de caricature, l’armée constitue par ailleurs un prétexte iconographique idéal pour représenter une autre communauté ethnique. Cette figurine, provenant d’Egypte ptolémaïque, est représentative de la réalité multiculturelle de l’Egypte lagide. Mais les effigies d’étrangers, notamment d’orientaux, produites en Egypte remontent au premier millénaire av. J.-C., à Memphis, et témoignent de l’antériorité de ce cosmopolitisme sur le territoire pharaonique (Ballet 2020, p. 96). Il s’agit également de l’évocation d’une réalité militaire : cette caricature peut être lue comme l’image du clérouque, un colon militaire d’origine macédonienne à qui est cédée une parcelle de terrain. 

Les figurines citées ci-dessus, publiée par Bailey et Fischer, sont datées par les auteurs du IIIe ou du IIe siècle av. J.-C., nous proposant ainsi une datation pour les trois figurines du musée Rodin. La figurine la plus ressemblante aux nôtres parmi celles publiées par Jutta Fischer est cependant datée de la fin du IIe voire du Ier siècle av. J.-C. (Fischer 1994, Nr 200), ce qui pourrait inciter à légèrement baisser la datation de ces objets au IIe siècle av. J.-C.

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