ÉGYPTE > PROVENANCE INCONNUE
ÉPOQUE TARDIVE OU ÉPOQUE PTOLÉMAÏQUE > XXVIe - XXXIe dynastie > 656 - 30 AVANT J.-C.
BRONZE (ALLIAGE CUIVREUX)
H. : 2,5 cm ; L. : 2,1 cm ; P. : 7,6 cm
Co. 2428
ÉGYPTE > PROVENANCE INCONNUE
ÉPOQUE TARDIVE OU ÉPOQUE PTOLÉMAÏQUE > XXVIe - XXXIe dynastie > 656 - 30 AVANT J.-C.
BRONZE (ALLIAGE CUIVREUX)
H. : 2,5 cm ; L. : 2,1 cm ; P. : 7,6 cm
Co. 2428
L'oeuvre présente un bon état de conservation.
L’œuvre est entière, mis à part le bout de la queue. L’oxydation du métal est visible sur le ventre de l’animal, toutefois les détails de la fourrure sont toujours reconnaissables.
L’œuvre représente une musaraigne debout sur une base plate rectangulaire. Les égyptiens étant de fins naturalistes, les caractéristiques de l’espèce sont soigneusement détaillées.
La tête, de forme triangulaire, est bilobée. Le premier lobe, qui comprend l’espace entre les oreilles et les yeux, adopte la forme d’une cloche. La seconde partie de la face, qui correspond au museau, a une forme plus étirée. L’extrémité du museau se compose de deux narines nettement distinctes l’une de l’autre. Sous le museau une grande incision en arc de cercle crée l’ouverture de la gueule. Les oreilles, triangulaires et courtes, dépassent de part et d’autre de la boîte crânienne. En leur centre, deux dépressions parallèles en restituent la profondeur. Cette dépression est observée en particulier à l’intérieur de l’oreille gauche. Le front est court et bombé. Les yeux mi-clos de la musaraigne, animal nyctalope, sont indiqués par deux incisons qui surmontent les bajoues de l’animal. Une collerette de fourrure encadre le bas de la tête, créant une rupture entre la tête et le cou assez grêle. Le dos est rond et potelé, les flancs sont rebondis, le ventre légèrement convexe. L’appendice caudal est sectionné à mi-hauteur. De multiples entailles dessinent le pelage, en particulier au-dessus de l’épaule gauche. On remarque que chaque membre, que cela soit les pattes ou la queue, est introduit par un resserrement qui sépare ainsi nettement chaque partie du corps. Les pattes sont longues, fines et arquées. Les caractéristiques morphologiques qui permettent de différencier les musaraignes des mangoustes, assez proches sur ces petites figurines en bronze, sont à chercher dans le tableau rédigé par OSBORN Dale J., OSBORNOVÁ Jana, The Mammals of Ancient Egypt, The Natural History of Egypt, Vol. IV, Warminster, 1998, p. 27. Les pattes se terminent par des pieds longs et plats sur lesquels quelques entailles matérialisent les doigts, en particulier sur la patte avant gauche. Un bourrelet de graisse entoure la naissance de la queue. Sous la queue, entre les pattes postérieures, notons la présence d’un ressaut de métal représentant probablement les testicules de l’animal.
Enfin, des éclats dorés parsèment de manière aléatoire le pelage de l’animal. Sous la base, au centre, un tenon de métal permettait le placement de l’animal sur un socle plus grand, comme un reliquaire par exemple. Ce tenon est actuellement fiché dans un socle en bois trapézoïdal, vraisemblablement contemporain de l’arrivée de l’objet sur le marché de l’art.
La musaraigne est un animal nocturne se nourrissant d’insectes et de petits lézards. Cette petite souris est aveugle, symbolisant ainsi l’obscurité et les ténèbres. Elle obtient par conséquent le rôle de guide dans l’au-delà. La musaraigne est aussi étroitement associée à l’ichneumon, dont le musée Rodin conserve un exemplaire en bronze (Co. 2413). En effet, selon la mythologie égyptienne, chaque matin la musaraigne se transforme en ichneumon, symbolisant le lever du soleil et inversement, l’ichneumon se transforme en musaraigne chaque soir au moment du crépuscule. La musaraigne, animal nocturne, représente « l’Horus aveugle » et l’ichneumon, prédateur diurne, « l’Horus voyant » (sur la musaraigne en Égypte ancienne, voir YOYOTTE Jean, VERNUS Pascal, Bestiaire des Pharaons, Paris, 2005, p. 614 et 791). Cette souris possède également des vertus thérapeutiques. Sa graisse était utilisée dans les préparations médicinales pour guérir certaines blessures et des problèmes auriculaires (cf. OSBORN Dale J., OSBORNOVÁ Jana, id., p. 26).
Les reliquaires de l’Antiquité égyptienne sont des objets archéologiques assez bien connus, les cimetières d’animaux sacrés étant nombreux sur le territoire égyptien. Ils comprenaient deux types d’animaux, les « uniques » et les « multiples » (cf. CHARRON Alain (dir.), La mort n’est pas une fin, Pratiques funéraires en Égypte d’Alexandre à Cléopâtre, Catalogue d’exposition 28 septembre 2002-5 janvier 2003, Musée de l’Arles antique, Arles, 2002, p. 176). La première catégorie regroupe des animaux choisis, parmi ses congénères et par les prêtres grâce à une statue divine qu’ils manipulaient, pour représenter de son vivant une divinité particulière. Les « uniques » les plus connus sont les taureaux Mnévis et Apis dont la plus ancienne attestation d’inhumation date du règne d’Amenhotep III. Ici, avec l’œuvre Co. 2428 il s’agit du reliquaire d’un « multiple ». Ces « multiples » n’étaient pas choisis pour leur caractère sacré mais c’est par les rites de leur mise à mort, leur momification et les prières récitées à cet instant que leur était conféré un caractère divin. Les animaux les plus représentés sont les serpents, les chats, les chiens, les ibis et les crocodiles. Ils n’avaient pas de pouvoir à part entière, c’était le dieu qu’ils représentaient à leur mort qui était encensé. Ils devenaient alors un ba de la divinité, acquéraient un rôle de médiateur et devenaient capables de transmettre les doléances de la population. Les reliquaires étaient créés sur demande des dévots et les prêtres se chargeaient d’y insérer l’animal entièrement momifié, soit une partie de sa momie, voire même un paquetage imitant la forme de l’animal. Ces « meurtres » étaient pratiqués cachés du regard de la population car la loi égyptienne condamnait à mort toute personne ayant tué même accidentellement un animal. Quoiqu’il en soit, ils étaient courants afin de subvenir aux besoins des commanditaires. Au fil du temps, les commandes devenant de plus en plus nombreuses, certaines bêtes étaient ainsi élevées dans le seul but de servir à leur mort d’objet de dévotion.
Pour comparaison, un reliquaire est publié au Penn Museum de Philadelphie (E 12552) et au Metropolitan Museum of Arts de New York (1985.14). Le Musée de la Vieille Charité de Marseille conserve aussi une musaraigne en bronze (n° d’inventaire inconnu), ainsi que la Ny Carlsberg Glyptotek (ÆIN 762 et ÆIN 763).
Le Museo Egizio de Turin possède plusieurs objets de même type (Cat. 0926, Cat. 0927, Cat. 0928 et Cat. 0930) et le Musée égyptien du Caire compte parmi ses collections quatre exemples de cercueil de musaraigne, tous surmontés de la représentation en relief de l’animal en question. Notons toutefois que ces sarcophages sont en bois (CG 29786, CG 29787, CG 29788 et CG 29789).
Cet exemple de statuette de musaraigne en bronze est unique dans la collection d’antiques du musée Rodin.
Anépigraphe.
Acquis par Rodin entre 1893 et 1913. Les traces d’une étiquette ancienne, carrée, sont visibles sous le socle. Cette étiquette a disparu.
Donation à l’État français en 1916.