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Cuiller d'offrandes en forme d'Oryx

ÉGYPTE > PROVENANCE INCONNUE

NOUVEL EMPIRE à ÉPOQUES TARDIVES 

[voir chronologie]

BRONZE (ALLIAGE CUIVREUX)

H. : 6,5 cm ; L. : 13,2 cm ; P. : 1,6 cm 

Co. 5784

Commentaire

Etat de conservation

L’œuvre est en assez mauvais état de conservation. 

Bien que complète, le métal est très oxydé et la surface corrodée présente des lacunes en écailles. De la terre d’enfouissement est encore incrustée entre les pattes de l’animal et au niveau des cornes. 

Description

Cette cuiller à offrande en alliage cuivreux prend la forme d’un oryx aux pattes ligotées. La tête et le cou de l’animal servent de poignée à l’ustensile tandis que le corps, concave, permet d’accueillir un contenu, qu’il soit de type cosmétique ou alimentaire dans le cadre des offrandes destinées à un défunt. Une petite zone orangée se remarque dans le récipient ; il serait possible d’y voir les vestiges du contenu. Ce type de cuillers ouvragées était produit surtout au Nouvel Empire, avec une très forte popularité à la XVIIIe dynastie, mais également jusqu’à la Basse Époque. Ces ustensiles soignés, appelés cuiller à offrande ou à fard, étaient plus fréquemment réalisés en bois ou en pierre, mais aussi occasionnellement en métal, ce qui est le cas de la cuiller Co. 5784. 

Le bovidé est ligoté, ses quatre pattes maintenues ensemble par une corde enroulée à trois reprises, ses longues cornes annelées plaquées le long de l’échine. L’espace entre le cou est les cornes a été laissé plein dans un souci de solidité. La queue, à peine visible aujourd’hui, crée le rebord arrière de la cuiller et on peut encore en distinguer la touffe de poils finale sur la face concave. L’état de conservation de l’œuvre ne permet plus d’observer un niveau de détail qui devait être élevé, à en juger par la finesse des anneaux des cornes ou du rendu de l’oreille et des yeux.

L’animal ligoté représente un type très fréquent pour cette catégorie d’artefacts, qu’il soit utilitaire, funéraire ou bien votif (voir les Inv. N° E3217 ou E3678 du musée du Louvre ; N° EA26817, N° EA14231 et N° EA55275 du British Museum ; N° 44.4.15 du Metropolitan Museum of Art de New York et N° 49.54 et N°  82.226.16 du Brooklyn Museum.

 

L’oryx, encore présent à l’état sauvage en Afrique subsaharienne, est en général considéré comme une antilope quoiqu’il n’appartienne pas strictement au genre Antilopinae. Il est caractérisé par ses très longues cornes droites et est, avec la gazelle dorcas et le bouquetin, l’un des animaux emblématiques du milieu désertique dans la pensée égyptienne (sur l’oryx, voir VERNUS YOYOTTE 2005). Ces espèces constituant un gibier de choix et une viande privilégiée pour les offrandes funéraires égyptiennes, l’animal sauvage est ici représenté en tant que proie par excellence.

 

Le statut de l’oryx sur ce type d’objet reste extrêmement ambigu (Bulté 2012). Les gazelles, les bouquetins et les oryx, qui apparaissent très fréquemment à la XVIIIe dynastie – période où sont également produites la majeure partie de ces cuillers décorées (Wallert 1967) –, étaient des symboles très positifs, associés à la jeunesse, à la fécondité et à la renaissance. Ainsi, ils sont notamment l’un des motifs favoris de l’iconographie du Nouvel An, qui fête en Egypte ancienne le retour de la crue du Nil (Quaegebeur 1999). C’est seulement plus tard que l’oryx fut assimilé aux forces maléfiques. Représentant l’animal chassé par excellence, il était destiné à être tué, à l’instar des ennemis. Cette connotation maléfique de l’animal ne semble pas exister avant l’extrême fin du Nouvel Empire (Derchain 1962). Aux époques tardives, cet animal en vint même à être considéré comme un ennemi d’Horus et d’Osiris, au point d’être régulièrement sacrifié dans les temples ptolémaïques au cours de rites pour repousser le chaos. 

 

Les objets réunis dans le cadre de l’exposition du Louvre consacrée au règne animal dans l’Égypte ancienne sous la direction d’Hélène GUICHARD (Des animaux et des pharaons 2014) illustrent cette ambiguïté (comparer en particulier les cuillers d’offrande en forme d’oryx du musée du Louvre Inv. N° E 3678 (cat N° 7b p. 30 (notice de Geneviève PIERRAT-BONNEFOIS), objet réalisé en grauwacke et daté du Nouvel Empire) et Inv. N° E 3217 (cat N° 99b p. 118-119 (notice id. ib.), objet réalisée en bleu égyptien et daté de la Troisième Période intermédiaire avec la figurine d’officiant à genoux effectuant le sacrifice d’un oryx ligoté musée du Louvre Inv. N° E 3347 (cat. N° 108 p. 125 (notice de Fanny HAMONIC), objet réalisé en alliage cuivreux et daté de la Basse Époque).

 

Néanmoins, plutôt qu’y voir un symbole de l’annihilation des forces du chaos, ou une manifestation du dieu Seth déposée comme ex-voto dans un sanctuaire d’époque tardive (voir supra musée du Louvre E 3347), l’oryx formant le corps de la cuiller zoomorphe Co. 5784 serait un symbole de jouvence et de régénération, destiné à figurer dans un trousseau funéraire, en accord avec le contenu cosmétique qu’il offrait, ainsi que comme la représentation métonymique des plaisirs de la chasse pratiquée par les élites. Cette image de gibier capturé ferait référence à son statut de viande de luxe, très prisée par la noblesse pour les offrandes funéraires depuis l’Ancien Empire, et donc à des symboliques liées à la renaissance après la mort. 

Œuvres associées

Aucune autre œuvre n’est similaire à Co. 5784 dans les collections du musée Rodin. En revanche, l’objet Co. 1489 fait également partie d’un ensemble lié aux cosmétiques. Il s’agit d’un petit couvercle originellement associé à un récipient qui contenait probablement du parfum, de l’onguent ou du khôl. 

Inscription

Anépigraphe. 

Historique

Acquis par Rodin entre 1893 et 1913.

BOREUX 1913 : Meudon / pavillon de l'Alma / vitrine 6, 325, "Partie supérieure d'une statuette de Ptah en basalte gris, le Dieu tient le sceptre [dessin]. Anépigraphe.Haut. 9 cent. Estimée trente francs."

Donation à l’État français en 1916.

Commentaire historique

L'objet était exposé dans une vitrine du pavillon de l'Alma à Meudon, du vivant de Rodin.

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