ÉGYPTE > PROVENANCE INCONNUE
ÉPOQUE TARDIVE OU ÉPOQUE PTOLÉMAÏQUE > XXVIe - XXXIe dynastie > 656 - 30 AVANT J.-C.
BRONZE (ALLIAGE CUIVREUX)
H. : 2,8 cm ; L. : 2,2 cm ; P. : 6,1 cm
Co. 2406
ÉGYPTE > PROVENANCE INCONNUE
ÉPOQUE TARDIVE OU ÉPOQUE PTOLÉMAÏQUE > XXVIe - XXXIe dynastie > 656 - 30 AVANT J.-C.
BRONZE (ALLIAGE CUIVREUX)
H. : 2,8 cm ; L. : 2,2 cm ; P. : 6,1 cm
Co. 2406
L'oeuvre est en mauvais état de conservation.
Le métal est très oxydé. Le reliquaire, creux, est toujours scellé par une plaque de bronze qui a été apposée à l’arrière. Ce scellement est très détérioré. Il est impossible aujourd’hui, sans effectuer d’analyses, de déterminer si le reliquaire est vide. Un trou circulaire perce le dessous du socle en son centre. De part et d’autre de cette ouverture, on note plusieurs plaques de cire marron, ainsi que l’abrasion du métal qui a pris une teinte blanche. Ces éléments semblent indiquer qu’un soclage moderne, grâce à l’utilisation d'une tige métallique probablement, a été pratiqué à une époque récente.
Le reliquaire présente une couche de carbonates verts assez vifs (malachite) avec des oxydes bruns sur une paroi du socle. La surface est assez lisse. Des traces de terre d’enfouissement sont encore bien visibles. Des chlorures sont disséminés sur la surface. Il a été peut-être soclé autrefois dans la collection car il présente un percement sous la base et deux spots d’adhésif.
L’œuvre figure un lézard allongé, la tête relevée, sur un socle creux rectangulaire. Le reptile est légèrement décalé sur le côté gauche.
Le corps de l’animal est d’une longueur équivalente à celle de la queue. Celle-ci, longue et fine, s’étire jusqu’à l’arrière de la base. L’équilibre des proportions de l’objet ayant été soigneusement pensé, on constate en effet que la longueur de la tête de l’animal a été calculée en fonction de son attitude. L’animal ayant la tête redressée, elle est figurée légèrement en retrait de la base. Cela suggère que si celle-ci reposait à plat, sa longueur s’accorderait avec celle du socle et elle s’étirerait jusqu’à l’extrémité avant du reliquaire. De part et d’autre, deux bélières ont été rapportées sur l’objet. L’une, à l’avant, est située du côté droit ; l’autre, à l’arrière, est placée à gauche. Elles permettaient de suspendre le reliquaire par un système aujourd’hui inconnu. Sur la tête, deux sillons horizontaux dessinent les yeux. Les pattes, posées à plat, s’évasent en X de chaque côté du corps. Une légère dissymétrie est visible dans les proportions. En effet, les pattes du côté droit de l’animal sont plus courtes que celles du côté gauche. Le corps de l’animal se confond avec le dessus du reliquaire. L’artisan a soigneusement complété la physiologie de l’animal. Si la décoration des pattes antérieures a disparu, de fines entailles en épis recouvrent les pattes postérieures pour y voir la représentation des écailles du reptile. De légers points ont été ponctionnés sur le dos, les flancs et la queue de l’animal, matérialisant également des écailles.
Le Metropolitan Museum of Art de New York conserve deux beaux exemples de reliquaire lézard, 04.2.510 et 04.2.513.
Les reliquaires de l’Antiquité égyptienne sont des objets archéologiques assez bien connus, les cimetières d’animaux sacrés étant nombreux sur le territoire égyptien. Ils comprenaient deux types d’animaux, les « uniques » et les « multiples » (cf. CHARRON Alain (dir.), La mort n’est pas une fin, Pratiques funéraires en Égypte d’Alexandre à Cléopâtre, Catalogue d’exposition 28 septembre 2002-5 janvier 2003, Musée de l’Arles antique, Arles, 2002, p. 176). La première catégorie regroupe des animaux choisis, parmi ses congénères et par les prêtres grâce à une statue divine qu’ils manipulaient, pour représenter de son vivant une divinité particulière. Les « uniques » les plus connus sont les taureaux Mnévis et Apis dont la plus ancienne attestation d’inhumation date du règne d’Amenhotep III. Ici, avec l’œuvre Co. 2406 il s’agit du reliquaire d’un « multiple ». Ces « multiples » n’étaient pas choisis pour leur caractère sacré mais c’est par les rites de leur mise à mort, leur momification et les prières récitées à cet instant que leur était conféré un caractère divin. Les animaux les plus représentés sont les serpents, les chats, les chiens, les ibis et les crocodiles. Ils n’avaient pas de pouvoir à part entière, c’était le dieu qu’ils représentaient à leur mort qui était encensé. Ils devenaient alors un ba de la divinité, acquéraient un rôle de médiateur et devenaient capables de transmettre les doléances de la population. Les reliquaires étaient créés sur demande des dévots et les prêtres se chargeaient d’y insérer l’animal entièrement momifié, soit une partie de sa momie, voire même un paquetage imitant la forme de l’animal. Ces « meurtres » étaient pratiqués cachés du regard de la population car la loi égyptienne condamnait à mort toute personne ayant tué même accidentellement un animal. Quoiqu’il en soit, ils étaient courants afin de subvenir aux besoins des commanditaires. Au fil du temps, les commandes devenant de plus en plus nombreuses, certaines bêtes étaient ainsi élevées dans le seul but de servir à leur mort d’objet de dévotion.
Le lézard est un des animaux les plus représentés dans l’iconographie égyptienne et ce grâce à son utilisation dans l’écriture égyptienne comme signe hiéroglyphique signifiant « nombreux, multiples, beaucoup ». Il était également utilisé en médecine de façon prophylactique ou comme ingrédient entrant dans la fabrication de potions favorisant la repousse des cheveux ou l’élimination de problèmes oculaires (cf. papyrus médical Ebers 66, 18 ; 63, 13-18). Il entrait régulièrement dans la composition de préparations destinées à la protection de la maison, le lézard étant naturellement un prédateur de nuisibles tels que les insectes. Il acquiert alors un rôle protecteur, notamment contre les serpents. En effet, dans la mythologie égyptienne, il chasse le serpent Apophis qui souhaite stopper le voyage nocturne de Rê avant sa renaissance à l’aube (cf. le Texte des Sarcophages, chap. 1069). C’est sans doute pour cette raison que le lézard est parfois associé à une divinité solaire comme Atoum. Bien que présent sur de nombreux supports tels que des vases (British Museum EA 53885), des sceaux (PETRIE W. M. Flinders, Buttons and design Scarabs, BSAE 38, Londres, 1925, n° 293-4, p. 2, pl. V) ou des bijoux (collier en or de la XVIIIe dynastie, British Museum EA 3081), c’est dans le contexte funéraire que le lézard est le plus représenté. Il accompagne, en tant qu’attribut, les génies gardiens du défunt sur les sarcophages et les reliefs des tombes royales (pour une étude plus poussée du contexte funéraire des lézards, voir la communication de Nadine GUILHOU à la IVe Rencontres archéozoologiques de Lattes du 26 juin 2009).
Le reliquaire Co. 2406 étant issu d’une commande privée, il semble probable d’imaginer qu’il avait pour fonction de protéger la maison des nuisibles, ou bien de prévenir ou de guérir une maladie.
Au British Museum (EA 71433, EA 71441, EA 71436, EA 71435, EA 71431, EA 71429, EA 71437, EA 36159, ...), au Museo Egizio di Torino (S. 18071, Cat. 2397, Cat. 2398), au Musée archéologique d’Aix-les-Bains (n°200) et à la Glytotek Ny Calrsberg de Copenhague (A 440) sont conservés des exemples de reliquaires de lézard.
Dans les collections du Musée Rodin, l’œuvre Co. 2406 présente une iconographie unique. En revanche, on retrouve ce type de reliquaire dans différents musées.
Anépigraphe.
Acquis par Rodin entre 1893 et 1913.
BOREUX 1913 : Meudon, atelier de peinture, vitrine 11, 406, "Lézard sur une base quadrangulaire creuse à double bélière. Bronze six cent. Sur 2. Estimé vingt-cinq francs."
Donation à l’État français en 1916.
L'objet était exposé du vivant de Rodin, en 1913, dans la vitrine 11 de l'atelier de peinture à Meudon.