ÉGYPTE > PROVENANCE INCONNUE
ÉPOQUE TARDIVE OU ÉPOQUE PTOLÉMAÏQUE > XXVIe - XXXIe dynastie > 656 - 30 AVANT J.-C.
BRONZE (ALLIAGE CUIVREUX)
H. : 6,6 cm ; L. : 2,3 cm ; P. : 4,5 cm
Co. 2385
ÉGYPTE > PROVENANCE INCONNUE
ÉPOQUE TARDIVE OU ÉPOQUE PTOLÉMAÏQUE > XXVIe - XXXIe dynastie > 656 - 30 AVANT J.-C.
BRONZE (ALLIAGE CUIVREUX)
H. : 6,6 cm ; L. : 2,3 cm ; P. : 4,5 cm
Co. 2385
L'oeuvre présente un état de conservation moyen. L’oxydation du métal a patiné les détails de l’objet. Il est complet, à l’exception du siège sur lequel le personnage était assis. Un trou perce l’œuvre entre les omoplates. À partir du niveau des cuisses, toute la zone arrière des membres inférieurs est nettement moins bien conservée que le reste de l’objet.
L’œuvre représente le dieu Harpocrate sous la forme d’un enfant assis. Les jambes sont jointes et les pieds posés à plat sur une fine base trapézoïdale. Cette base indique qu’il s’agit de la représentation d’un dieu enfant assis sur un siège, aujourd’hui disparu. Dans le cas d’un enfant assis sur les genoux de sa mère, les pieds sont ballants (voir Co. 209 et Co. 210 par exemple). Le bras gauche suit la position assise du corps et les doigts sont allongés à côté de la cuisse. Le bras droit est plié de façon à ce que le pouce et l’annulaire se rejoignent sous le menton. L’enfant est nu à l’exception d’une calotte ornée d’un uraeus frontal dont la queue s’étire sur le haut du crâne. Une mèche de l’enfance se dégage du côté droit de la coiffe. Épaisse, elle se termine par une volute devant l’épaule.
L’enfant possède une grande tête sur laquelle les traits sont encore visibles malgré l’oxydation du bronze. Le contour des grands yeux a été incisé dans le métal après le moulage de l’œuvre. Ces yeux encadrent un large nez qui surmonte lui-même une petite bouche pulpeuse. Les joues sont pleines et le menton est horizontal donnant ainsi à l’enfant un visage rond et potelé. Le cou est épais et court, il se poursuit sur des épaules larges et légèrement tombantes. Malgré les petites dimensions de cette figurine, le modelé des omoplates est particulièrement travaillé. Les bras sont d’égale épaisseur sur toute leur longueur et ne présentent aucun détail anatomique, contrairement au buste sur lequel les pectoraux, la taille, les hanches et le nombril sont marqués. Une légère protubérance met en évidence la zone pubienne. Le dos est également mis en valeur grâce au modelé des muscles dorsaux qui encadrent la colonne vertébrale et grâce à une petite dépression au niveau des reins séparant les muscles fessiers. Les jambes ont une longueur et des rondeurs correspondant aux proportions naturelles d’un enfant. Notons que les cuisses sont généreuses, que les pieds sont longs et plats et que les orteils n’ont pas été individualisés, de même que les doigts de la main gauche hormis le pouce.
Harpocrate est une divinité bien connue dans l’art égyptien. Son nom égyptien Horpakhered, « Horus l’Enfant », a été transcrit par les grecs en Harpocrate. Sa première attestation date de la XXIe dynastie et sa première représentation de l’an 22 de Chéchanq III sur une stèle commémorant une donation pour le « flûtiste d’Harpocrate » (cf. FORGEAU Annie, Horus-Fils-d’Isis, La Jeunesse d’un dieu, BdE 150, Le Caire, 2010, p. 308).
Harpocrate est, à l’époque de sa création, Khonsou-l’enfant, fils d’Amon et de Mout et fait partie de la triade divine thébaine. Il devient ensuite un dieu à part entière, c’est-à-dire Horus l’Enfant, fils d’une union posthume entre Osiris et Isis. Enfant royal, son front est ceint d’un uraeus. Le dieu Seth, son oncle, cherchant à le tuer afin d’acquérir le pouvoir dont il doit hériter de son père, il est élevé dans les marais de Chemnis, à l’abri de Seth. De par son histoire, il obtient une double symbolique. Il est à la fois le nouveau soleil du matin et l’héritier divin qui doit succéder à son père, ce qui fait de lui le représentant et la représentation idéale du roi. Les pouvoirs divins qui lui sont attribués évoluent rapidement. En effet, d’après sa mythologie, sa mère Isis l’aurait guéri d’une piqûre de scorpion. Il obtient ainsi des capacités guérisseuses et protectrices face aux animaux dangereux comme le montre les stèles dites d’« Horus sur les Crocodiles ». Sur ce type de stèle, on peut voir Horus enfant maitrisant de chaque main un animal considéré comme dangereux, tels que les lions, les serpents ou les scorpions. On peut également mentionner Nepri, dieu du grain et de la moisson, qui peut être représenté nu avec un doigt à la bouche. Harpocrate, qui possède la même iconographie, devient alors un dieu de la fertilité lié à Min et aux cultes agraires.
L’iconographie d’Harpocrate, dieu populaire à la fin des temps égyptiens, est simple et reconnaissable. Il s’agit d’un enfant nu portant la mèche de l’enfance du côté droit du crâne et généralement l’index à la bouche. Il peut être debout, assis sur un trône, sur une fleur de lotus ou sur les genoux d’une déesse qui l’allaite. Ses coiffes varient selon la divinité qu’il représente et c’est pourquoi, en plus de son iconographie infantile, il est l’image de tous les fils des triades divines et est ainsi naturellement distingué comme protecteur des enfants. De par son aspect juvénile caractéristique, nudité et attitude naïve du doigt sur la bouche, bonnet enserrant le crâne avec mèche de l’enfance, proportions des parties génitales, et enfin rondeur des joues et du ventre, Harpocrate devint l’image de tous les dieux enfants d’un panthéon égyptien de plus en plus sophistiqué. Les très nombreuses statuettes en terre cuite ou en bronze datant de l’époque hellénistique et romaine attestent de la popularité de son culte dont l’apogée se situe durant le IIe siècle de notre ère.
Enfin, notons que les auteurs classiques ont mal interprété le geste du doigt sur la bouche et l’ont compris comme étant « un symbole de discrétion et de silence », interprétation reprise par la suite par les ésotériques. En aucun cas cette attitude fait mention d’un quelconque respect des dieux par le silence. Ce geste de placer le doigt sur la bouche pour marquer le silence est un geste de notre époque et de notre culture et ne peut pas être appliqué aux égyptiens anciens. L’attitude d’Harpocrate est simplement l’image de l’enfance comme l’est la mèche tressée sur le côté du crâne.
La statuette Co. 2385 servait d'ex-voto. Elle a été commandé et probablement déposée dans un lieu de culte dédié à Harpocrate afin qu'acquérir sa protection.
Les statuettes d’Harpocrate constituent une série d’objets très connus et communs aux époques hellénistique et romaine, et de nombreux musées du monde conservent ce type d’œuvre. Nous pouvons en citer quelques uns tels que le Musée du Louvre (E 7735), le British Museum (1951.1003.1) et le Penn Museum de Philadelphie (E 12566, E 12549 et E 12581). Il s’agit ici d’Harpocrate seul assis sur un trône.
Les collections du Musée Rodin conservent les œuvres Co. 789 et Co. 810 qui présentent la même attitude et la même iconographie que l’objet Co. 2385, c’est-à-dire un enfant seul assis sur un siège.
Anépigraphe.
Acquis par Rodin entre 1893 et 1913.
BOREUX 1913 : Meudon, pavillon de l'Alma, vitrines 23 et 24, 518. "Lot de huit bronzes en très mauvais état de conservation : un Harpocrate assis (7 cent), Estimé vingt-cinq francs."
Donation à l’État français en 1916.
La figurine était exposée en 1913 dans une vitrine du Pavillon de l'Alma à Meudon.