ÉGYPTE > PROVENANCE INCONNUE
ÉPOQUE TARDIVE > XXVIe dynastie > 672 - 525 AVANT J.-C.
GRANIT ROSE
H. : 26,8 cm ; L. : 28,2 cm ; P. : 14,9 cm
Co. 951
ÉGYPTE > PROVENANCE INCONNUE
ÉPOQUE TARDIVE > XXVIe dynastie > 672 - 525 AVANT J.-C.
GRANIT ROSE
H. : 26,8 cm ; L. : 28,2 cm ; P. : 14,9 cm
Co. 951
L’œuvre est en mauvais état de conservation.
Elle est brisée au niveau du bassin et la tête et les bras manquent. Plusieurs impacts sont visibles sur les pectoraux et sur les muscles abdominaux. La présence de plâtre gris s’y remarque.
L’œuvre est un tronc d’homme. Il porte un pagne dont la limite supérieure est visible dans son dos. On note l’absence de ceinture ou d’ornementation sur ce vêtement, qui monte haut sur les reins. Les dimensions de la cassure au niveau du cou suggèrent que l’homme était coiffé d’une perruque bouffante s’arrêtant sur les épaules telle qu’une perruque dite « en bourse », ou de toute autre coiffure courte, y compris une couronne blanche, une couronne rouge ou un pschent. Pour l’exemple, voir la statue agenouillée E25390 + E25475 conservée au Musée du Louvre (cf. PERDU Olivier, Les statues privées de la fin de l’Égypte pharaonique (1069 av. J.-C. - 395 apr. J.-C.) I, Hommes, Musée du Louvre, Paris, 2012, p. 282-289).
Malgré l’état de conservation, on remarque que le buste de l’homme a été sculpté avec finesse et soin. Les trapèzes forment un oblique naturel jusqu’aux épaules dont la rondeur annonce des biceps galbés. Le creux de l’aisselle est profond, mettant ainsi en valeur la ligne des pectoraux. Au-dessus de ceux-ci, de longues clavicules ont été modelées en léger relief. Elles prennent leur course au sommet des épaules pour rejoindre la fourchette sternale formant un V largement ouvert. Notons deux sillons horizontaux placés à la pointe du sternum et au niveau de la taille. Ces sillons découpent le torse de l’homme en trois parties, accentuées par le creusement des flancs, dessinant ainsi les muscles abdominaux. Ce modelage du buste est communément appelé tripartition (cf. ibid., p. 60-62). Elle est caractéristique de la Basse Époque et particulièrement de la XXVIe dynastie, de même que la disposition des clavicules s’inclinant vers le milieu du torse dès le début de l’époque saïte. Enfin, la taille est marquée sans être fine et l’orifice ombilical est à peine creusé.
Quant à l’attitude originelle de cette œuvre, l’absence de pilier dorsal, de dossier de siège, le pagne sensiblement rebiqué vers le haut ainsi que l’inclinaison légère des bras vers l’avant suggèrent que l’homme était assis sur un siège cubique ou assez probablement agenouillé, les mains posées à plat sur le cuisses ou tenant un objet. Un très bel exemple de la XXVIe dynastie conservée au Musée du Louvre est à rapprocher de la statue Co. 951 de part le modelé du buste, le placement des bras et le dos droit (cf. ibid., p. 272-281, voir le site du Musée du Louvre). Comme dernier élément de datation, nous pouvons inclure le pagne simple sans ornementation qui a bénéficié d’une certaine faveur aux époques tardives, notamment pour les statues agenouillées (cf. ibid., p. 46).
Sans autre élément raccordé à l’œuvre Co. 951, nous ne pouvons infirmer s’il s’agit d’une statue privée ou royale.
Le Musée Rodin conserve d’autres exemples de statues masculines datables de la XXVIe dynastie, notamment les Co. 784, Co. 821, Co. 880 et Co. 5872 qui présentent également une perruque à bourse comme Co. 951.
Anépigraphe.
Acquis par Rodin auprès de l'antiquaire Joseph Altounian le 13 juin 1912.
BOREUX 1913 : Hôtel Biron, 274, "Fragment d'un torse en granit de Syène les deux bras manquent presque entièrement ainsi que la tête et tout le bas du corps à partir de la ceinture. Epoque thébaine. Haut. 27 cent. Larg. 27 cent. Environ. Estimé cinq cent francs."
Donation à l’État français en 1916.
Ce bas-relief fut acheté auprès de l’antiquaire Joseph Altounian qui l’expédia dans un lot d’objets le 31 août 1912 et le décrivit ainsi : « 1 tronc d’homme XIIe dyn. Granit poli noir à pois roses 250 » (ALT 147, archives musée Rodin).
L’antiquaire Joseph Altounian, écrivait à Rodin du Caire le 10 Août 1912 : « Cher Maître, J’ai l’honneur de vous faire savoir que je viens de rentrer aujourd’hui même au Caire après avoir accompli le voyage dans la Haute-Égypte dont voici les principales étapes. Éléphantine, Abydos, Phylae, Héracleopolis, Sakhara, Memphis, etc., ou j’ai séjourné pour recueillir pour votre collection des fragments de bas-reliefs, granit, calcaire, basalte, bref tout ce que j’ai jugé pouvant vous intéresser. Ce lot renferme 24 pièces des bas-reliefs et des reliefs en creux des grands et des petits, le tout appartenant aux différentes dynasties ayant régné dans les régions que j’ai traversées, plus 19 pièces de fragments en ronde bosse le tout présente la sculpture des meilleures dynasties. » J. Altounian était parti du Caire en juillet 1912, et l’on peut suivre son périple sur son agenda (archives Altunian) : Minieh, Mallawi, Assiout, Abou Tig, Assiout, Sohag, Achmim, Abou Tig, Baliana, Abydos, Baliana, Keneh, Kous, Louxor, Sohag, Achmim, Sohag, Mallawi, Le Caire, où il arriva le 7 août.
Le 28 Août 1912, Altounian écrit au sculpteur : « Cher Maître J’ai l’honneur de vous annoncer que je suis arrivée à Paris depuis quelques jours. Je me suis présenté 77 rue de Varenne mais on m’a dit que vous étiez absent ; jour cela. Je vous adresse la présente à votre adresse à Paris espérant qu’on vous la faira suivre. Donc je vous prie cher Maître de me dire le jour que vous rentrez à Paris afin que je vienne vous soumettre le bordereau avec la nomenclature des objets que je vous ai expédié du Caire.». Le 6 septembre, Altounian recevait de Rodin « la somme de frs 850 (huit cent cinquante francs) comme prêt pour m’aider à dégager les 6 caisses antiques de la Douane ; Monsieur Rodin n’est pas engagé à acheter ce lot d’antiquités s’ils ne lui plaisent pas. Il achètera que ce qu’il lui plaira.». Rodin choisit un grand nombre d’œuvres de ce lot dont le torse Co.951 et versa à l’antiquaire 5000 francs le 11 septembre 1912.
Le torse fut exposé à l’hôtel Biron, parmi les chefs-d’œuvre de la collection égyptienne, là où Charles Boreux le décrivit à l’été 1913 dans l’inventaire qu’il fit en vue de la donation à l’État français.